FESSÉES CROISÉES (2)
6 Août
Une
petite auberge de campagne… Enchâssée dans un écrin de verdure…
– On
sera bien là, non ?
– Faudrait
être difficile…
Il
nous a fait apporter des cocktails, dehors, sous la tonnelle…
– Bon…
Eh bien je t’écoute…
– Tu
m’écoutes, Gilles ? Mais à propos de quoi ?
– Comme
si tu le savais pas…
– Non…
Non… Je t’assure…
– Je
vais te mettre sur la voie alors… Enzo…
– Enzo ?
Non, mais alors là, je sais pas qui t’a raconté quoi, mais…
– Mais ?
– Oui…
Bon… C’est vrai… Mais je m’en veux assez, tu sais… C’était
une connerie… Une énorme connerie…
– Oh,
mais faut pas dire ça… Faut pas regretter… Parce que… t’en
as bien profité, non ? Un vrai talent il a ce jeune homme,
apparemment, pour expédier au septième ciel toutes les femmes qui
lui tombent sous la main…
– Je
te jure, Gilles, je te jure que c’est fini Enzo… Et bien fini…
Tu me crois ?
– Tu
n’as pas répondu à ma question… Il baise bien ?
– Non…
Oui… Enfin c’était pas non plus…
– Si
extraordinaire que ça ? Ah, oui ? Qu’est-ce que tu lui
trouvais alors ? T’en étais amoureuse ?
– Non…
Oh, non… Ça, il y a pas de risque…
– Donc,
c’était pour le cul…
– Oui,
dans un sens…
– Dans
un sens ?
– Non,
mais oui… Disons ça comme ça : c’était pour le cul…
Oui… Seulement, comme je t’expliquais tout-à-l’heure, Enzo,
c’est du passé… Rayé de la carte Enzo… Disparu… Oublié…
– Parce
que sa copine lui mène la vie impossible… Sinon…
– Mais
jamais de la vie, Gilles, enfin !
– Bien
sûr que si ! C’est lui qu’a décidé de tirer un trait sur
votre histoire… C’est pas toi… Et s’il l’avait pas fait, ça
continuerait vous deux… Vous auriez remis ça aux prochaines
vacances… Peut-être même que vous auriez pas pu attendre jusque
là… Que vous vous seriez revus, de temps à autre, à la sauvette,
ici ou là… C’est pas vrai peut-être ?
– Non,
Gilles, non…
– Ben,
voyons ! Supposons qu’il t’appelle… Demain…
Après-demain… Dans quinze jours… Dans trois mois… Qu’il te
dise qu’il veut te voir… Tu vas faire quoi ?
– Lui
raccrocher au nez…
– Peut-être…
Dans un premier temps… Mais il rappellera… Autant de fois que
nécessaire… Il sait qu’avec toi il finira de toute façon par
avoir gain de cause… Tu auras quelques scrupules de conscience…
Pour la forme… Et puis, tôt ou tard, tu courras le rejoindre…
Non ? Je me trompe ?
– Si…
Non… Je sais pas quoi te dire…
– La
vérité…
– La
vérité, c’est que… Oui… Peut-être que tu as raison…
– Évidemment
que j’ai raison… Et si c’est pas lui, c’en sera un autre…
– Gilles !
– Mais
bien sûr que si ! Tu auras beau prendre toutes les bonnes
résolutions que tu voudras, freiner des quatre fers, il arrivera
toujours un moment où tu finiras par craquer… Parce que le type,
en face, il a une belle petite gueule d’amour qui te fait fondre…
Ou parce que l’envie qu’il a de toi t’émeut… Parce que tu as
besoin de séduire… De te sentir désirée par un autre que ton
mari… De lire dans les yeux de ton amant quelle importance ça a,
pour lui, d’être en toi… Toi et personne d’autre… D’y
libérer son plaisir…
– Je
me suis jamais sentie aussi nue…
– Seulement
tu le vis pas à plein tout ça… Tu culpabilises… Tu t’en veux
avant… Tu t’en veux après… Et même… quelquefois… tu t’en
veux pendant… Tu te gâches ton plaisir… Pour te punir…
– Mais
comment tu fais ? C’est ça, Gilles… C’est exactement ça…
Non, mais je te promets… Je vais essayer… Tu m’aideras… Je
vais tout faire pour que ça arrive plus…
– Mais
je te le demande pas… D’abord parce que tu vas te torturer pour
rien… Tu tiendras un mois… Deux mois… Et ça te reprendra…
Malgré tous tes efforts… Non… Faut se faire une raison… Et
regarder les choses en face… T’en as besoin… T’en auras
toujours besoin… Alors autant que tu le vives du mieux possible…
Sans t’encombrer de tout un tas de préoccupations parasites…
– Comment
ça ?
– Ben
déjà, pour commencer, en jouant complètement franc jeu avec moi…
– Oui,
mais toi ?
– Moi,
je préfère – et de très loin – vivre avec une femme
épanouie, bien dans son corps et dans sa tête, plutôt qu’avec
une femme bardée, dans un cas, de frustration et de mal être et,
dans l’autre, de culpabilité et de remords…
17 heures
Il
est resté en moi… M’a caressé les sourcils… Les paupières…
Les lèvres… Du bout du pouce…
– Il
y avait longtemps… Il y avait longtemps qu’elle avait pas eu un
plaisir aussi tonitruant la petite madame…
– C’est
qu’il y a longtemps que la petite Madame s’était pas sentie
aussi proche du monsieur… Aussi bien comprise…
– Tu
me diras, hein ? Tu me promets ?
– Tout…
Je te dirai tout… Même s’il y a rien… Si c’est juste dans ma
tête qu’il se passe des trucs avec un type… Et puis toi, alors,
tu me puniras pour ça… Tu me donneras la fessée… Une bonne…Une
sévère…
– Qui
te remettra en paix avec toi-même…
– Voilà,
oui… Tu comprends tout… Mais pourquoi tu m’en donnais plus ces
derniers temps ? T’avais plus envie ?
– C’est
pas que j’avais plus envie, c’est qu’elles sonnaient faux…
Que tu ne les investissais plus vraiment… T’étais ailleurs…
Avec elles… L’essentiel, c’était vous trois…
– Oui,
oh, alors là… Si tu savais…
– Si
je savais quoi ? Que tout a commencé parce que Jaufret a
flanqué une fessée à Christine et que Charles s’en est rendu
compte ? Que, pour faire passer la pilule, vous avez inventé
une histoire à dormir debout et que vous avez fini par vous prendre
à votre propre jeu ? Et pas qu’un peu…
– Ah,
ben d’accord ! En somme, si je comprends bien, c’est depuis
le début qu’on avait des détectives au cul…
– Il
n’y a jamais eu de détectives… Alexandre a inventé ça de
toutes pièces… Pour vous donner le change… Au cas où vous
finiriez par avoir des soupçons…
– Pas
de détectives ? Alexandre… Des soupçons ? Des soupçons
de quoi ? J’y comprends plus rien…
– Le
frère aîné d’Alexandre est un ami d’enfance de Charles… Son
meilleur ami… Et Alexandre est une vraie fouine… Qui a assisté à
pas mal de choses… Qui connaît Ludo… Qui connaît Enzo… Qui
connaît Jaufret… Et qui n’a pas son pareil pour tirer les vers
du nez à son interlocuteur… Mélanie, entre autres, en a souvent
fait les frais… Toi aussi, d’ailleurs, quelquefois…
– C’est
par lui que t’as su alors pour Enzo ?
– Évidemment
que c’est par lui… Par le truchement de son frère en fait…
Mais ça revient au même…
– Quel
petit salopard ! Non, mais quel petit salopard !
– À
un rapport quotidien on avait droit… Et je peux te dire qu’il
fourmillait de détails… On n’ignorait rien de vos parties de
jambes en l’air aux unes et aux autres… On a toujours su où vous
étiez… Ce que vous faisiez… Avec qui… Quels étaient vos
projets… Vos plans d’action…Comment vous envisagiez de nous
rouler dans la farine… Comment vous croyiez y être parvenues…
Comment vous vous en réjouissiez…
– Tel
est pris qui croyait prendre, quoi ! Vous nous avez bien eues…
Mais ce type, là… Le frère d’Alexandre…
– Cyrille…
– C’était
quand qu’il venait vous raconter tout ça ? Parce qu’on l’a
jamais vu, nous… Même pas croisé comme ça, par hasard…
– Il
venait pas… On allait chez lui… Le matin, pendant que vous
faisiez vos ablutions… Et on y retournait l’après-midi…
– Eh
ben dis donc !
– Cyrille
était intarissable… Il en avait jamais fini avec vous… Vous le
fasciniez à un point… Toi surtout…
– Moi ?
Pourquoi moi ?
– Parce
que tu leur distribuais généreusement des fessées aux deux autres,
mais que toi, tu n’en recevais jamais… Il rêvait du jour où son
frère lui apprendrait que… enfin… enfin… vous aviez interverti
les rôles…
– Oui…
Ben raté…
– Il
a eu mieux… Beaucoup mieux…
– Comment
ça ?
– Tu
as la mémoire courte…
– Ah,
oui… C’est vrai… J’y pensais plus… Il y a eu le club…
– Et
Nathalie… La copine d’Enzo… Qui ne t’a pas ménagée…
– Il
y était Alexandre ?
– Ils
y étaient tous les deux…
– Et
toi aussi… Forcément…
– Non…
La faute à Charles… Persuadé qu’on avait largement le temps de
faire l’aller et retour à Nice avant… Résultat des courses :
quand on est arrivés tout était terminé… Et pourtant ça valait
son pesant d’or à ce qu’il paraît… Mais tu me raconteras…
Et puis qui sait ? Tu recroiseras peut-être la route d’Enzo…
Et celle de Nathalie dans la foulée…
7 Août
Un
doigt sur mes fesses… À en épouser interminablement les contours…
À y dessiner courbes et arabesques… Il y a posé les lèvres…
– Qu’est-ce
que c’est beau comme ça… Le lendemain… Le surlendemain…
Quand ça a viré… Un chatoiement de couleurs… De noirs profonds…
De violets subtils… De jaunes incandescents… De rouges
miraculeux… C’est magnifique… C’est émouvant… Très…
Mais pour arriver à ce résultat-là…
– Il
faut qu’on ait mis le paquet…
– Et
elle l’a mis…
– Elle
m’en voulait à mort…
– Ce
qu’on peut comprendre… T’avais couché avec son mec…
– Je
sais, oui… Elle me le faisait payer… Et il y avait quelque chose
en moi qui lui donnait complètement raison… Qui trouvait même
qu’elle en faisait pas assez… Que les claques qu’elle
m’assénait sur les fesses… Que les mots de rage qu’elle me
disait en même temps, c’était rien… C’était pas suffisant…
Ça méritait beaucoup plus que ça ce que j’avais fait…
– Et
ça mérite encore…
– Ah,
ça, c’est sûr…
– Il
y a autre chose aussi qui mérite…
– Quoi
donc ?
– Tu
as beaucoup montré, à ce qu’il paraît, pendant cette fessée…
En fait tu n’as rien laissé ignorer à l’assistance de ton
anatomie… On s’est, semble-t-il, bien régalé…
– Oui,
mais attends, Gilles ! Quand t’es dans cette position et qu’on
te martèle à tout va le derrière, il arrive un moment où tu
maîtrises plus rien… Où t’es obligée de battre des jambes dans
tous les sens… Tu peux pas t’empêcher…
– Mouais…
– Si,
c’est vrai, hein !
– Il
y a une autre explication possible… Tu avais tout un parterre de
mâles à ta disposition…L’occasion était trop belle… Tu en as
profité pour les asticoter un peu… Pour leur laisser admirer, dans
les moindres détails, tes trésors cachés…
– Non,
Gilles… Non… Je t’assure…
– Même
pas un peu ?
– Je
sais pas… Je…
– Mais
si, tu sais !
– Peut-être
un peu quand même… Si ! Oui…
– Ah
tu vois… Au point que ça mérite ?
– Je
crois quand même, oui…
– On
va se la mettre de côté alors cette fessée… Qu’on profite
jusqu’au bout, en attendant, de celle que Nathalie t’a donnée…
Tant qu’elle ne se sera complètement effacée…
Et
son doigt a repris son cheminement… Son voyage… Inlassablement…
S’est insensiblement rapproché de la raie entre les fesses… S’y
est insinué… M’a ouverte…
– Viens,
Gilles, viens ! S’il te plaît, viens !
Il
est venu…
11 heures
– Wouah !
T’as vu l’heure ? On s’est rendormis…
– Quelle
importance ? On est en vacances, non ?
Je
me suis blottie contre lui…
– Comment
c’était trop bon tout-à-l’heure… Pour toi aussi ?
– Ça
s’est pas vu ?
– Si !
T’as grogné… C’est pas souvent… N’empêche que finalement…
– Finalement ?
– Non…
Rien… J’allais dire une connerie…
– Qu’heureusement
qu’il y a eu Enzo ?
– Ben
oui… Oui, dans un sens… Parce qu’on était complètement en
train de se perdre tous les deux… Tu me voyais plus…
– Ni
toi non plus…
– Parce
que tu me voyais plus… C’était la spirale infernale…
– Bon,
mais c’est du passé tout ça…
– Oh,
oui, hein ! Jamais plus on se laissera rattraper par la routine…
Jamais… Tu me promets ?
14 heures
– Le
jour où tu l’as rencontré Enzo, t’étais habillée comment ?
– Pourquoi
tu me demandes ça ?
– Parce
que… T’étais habillée comment ?
– Comment
tu veux que je me rappelle…
– Mais
bien sûr que si que tu te rappelles…
– Peut-être
ma robe rouge… Oui, c’est ça… Ça me revient… Ma petite robe
rouge…
– Pas
étonnant qu’il ait craqué Enzo… Passe-la !
– Hein ?
Mais pour quoi faire ?
– Tu
verras bien… Vas-y ! Mets-la !
– Mais
où tu m’emmènes ?
– Tu
commences pas à t’en douter un peu ?
– Ben…
Dans la mesure où on est à Toulon…
– Où
tu as d’excellents souvenirs, non ?
– Tu
vas pas…
– Te
remmener boire un coup là-bas ? Si ! Que tu poses ton
petit derrière si joliment puni par Nathalie sur la chaise même où
tu as fait la connaissance de son petit ami… La boucle sera
bouclée… Et on pourra passer définitivement à autre chose…
C’est pas une bonne idée ?
– Je
sais pas… Peut-être… J’en sais rien…
– C’était
cette chaise-là ?
– Oui…
L’autre, c’était Christine…
– T’as
de la chance… Elle est libre… Bon, ben je te laisse…
– Comment
ça, tu me laisses ? Tu vas où ?
– Un
peu plus loin là-bas… Je te laisse méditer sur tout ça… En
toute tranquillité… Ça devrait te faire le plus grand bien…
Dès
que je l’ai vu s’approcher le type, l’air faussement distrait,
j’ai su qu’il allait le faire… Qu’il allait s’installer à
la table d’à côté… Ce qui n’a pas loupé…
– Il
y a quelqu’un là ?
– Vous
voyez bien que non…
– Vous
pourriez attendre des amis… Et avoir besoin de la table… Des
chaises…
– Ce
n’est pas le cas…
– Oui,
hein ! Moi, c’est pareil… Pour se faire des amis
aujourd’hui…
– En
ce qui me concerne en tout cas j’en ai…
– Ben,
on dirait pas… Vous êtes là, toute seule, avec la tête de
quelqu’un qui vient d’enterrer toute sa famille…
– Vous
inquiétez pas pour moi… Prenez pas cette peine… Tout va très
bien…
– Ben,
vous en avez de la chance ! Parce que moi… Oh, mais je vais
pas vous prendre le chou avec mes problèmes… Vous vous en fichez
n’importe comment…
– Elles
ont toujours une fin les mauvaises passes…
– Vous
vous rendez pas compte dans quelle situation je suis… Non… Vous
pouvez pas… Parce que voilà cinq minutes que je discute avec une
super nana… Une beauté à se mettre à genoux devant… Que je me
dis que c’est peut-être la femme de ma vie… Et que si je ne
trouve pas les mots pour la retenir, pour lui donner envie de me
revoir, elle va disparaître à tout jamais…
– Pauvre
malheureux que vous êtes…
– Si
vous saviez ! C’est désespérant…
Je
me suis levée…
– Vous
vous en remettrez…
– On
se reverra ? Laissez-moi au moins un espoir…
– Je
crois pas, non…
Et
je me suis éloignée… J’ai regagné la voiture…
– Ah,
ben bravo !
– Mais
enfin, Gilles ! Qu’est-ce que je peux y faire, moi, si un type
il vient s’asseoir à la table d’à côté…
– T’étais
pas obligée de discuter avec…
– Vu
comment elle s’était engagée la conversation, c’était
impossible de pas lui répondre…
– Ben,
voyons !
– Si,
c’est vrai, hein !
– Ça
te déplaisait pas… Ça se voyait comme le nez au milieu de la
figure… Et je suis bien tranquille que si tu m’avais pas su là,
derrière, ça aurait duré beaucoup plus longtemps… T’y aurais
passé l’après-midi… Et après…
– Tu
te fais un film, Gilles, je t’assure…
– Regarde-moi !
Il te plaisait pas ce type ?
– Peut-être
un peu…
– Un
peu plus qu’un peu, non ?
– Il
avait du charme… Et puis des yeux… C’est fou des yeux comme ça…
– Des
yeux pleins de désir pour toi… Et ça, c’est quelque chose à
quoi tu n’as jamais pu résister…
Je
me suis blottie contre lui… Il m’a doucement caressé la joue…
– Qu’est-ce
qu’il va y en avoir des fessées en attente…
– Tant
que tu voudras, Gilles… Tout ce que tu voudras…
8 Août
– Elle
s’estompe… Cette fois elle s’estompe vraiment cette fessée…
Demain… Après-demain au plus tard il faudra la réactiver…
– À
cause de ce type, hier, au café ?
– Ou
d’un autre type… Dans un autre café…
– Qu’est-ce
que tu veux dire ?
– Ivan
aussi, c’est dans un café que tu l’as rencontré, non ?
– Ivan ?
– Ivan,
oui…
– Alors
comme ça, tu sais… Pour lui aussi, tu sais…
– Il
y a beaucoup de choses que je sais et que tu ignores que je sais…
Bon, mais Ivan…
– Comment
t’as su ?
– Ça
n’a aucune importance comment j’ai su… Parle-moi de lui plutôt…
– C’est
pas facile…
– Je
vais t’aider alors… Le café s’appelait « Le Marigny »…
Tu y étais attablée devant une limonade… Ivan a fait son
apparition… Dix minutes après il te sautait dans les chiottes…
– Pas
dix minutes, non !
– Vingt ?
Trente ? On n’est pas à quelques minutes près… Et ça
change quoi au fait qu’il t’a tirée dans les chiottes ?
– J’étais
dans un état second… Je savais plus ce que je faisais… Si, je
t’assure, Gilles…
– Le
lendemain aussi ? Et les jours suivants ? Ça dure, chez
toi, dis donc, les états seconds…
– Non,
mais c’est vrai, hein ! C’était complètement fou ce truc…
Quelque chose hors du temps… Hors de tout… Je sais pas comment
expliquer…
– Essaie
quand même…
– Du
désir pur c’était… Brut… Que c’est même pas la peine
d’essayer de résister… Que t’y arriveras pas de toute façon…
– C’est
un peu facile, non ?
– Mais
c’est vrai ! Je te jure que c’est vrai… Dès que je l’ai
vu, j’ai su que ça allait se passer comme ça… Qu’il allait
pouvoir me demander tout ce qu’il voulait… Et que ce qu’il
voulait, j’en crevais moi aussi d’envie… On s’est pas
dérobés… On s’est regardés… J’ai pas baissé les yeux…
Pas une seule fois… Même quand il s’est levé… Qu’il s’est
approché… Il m’a prise par la main… Sans un mot… Et il m’a
emmenée en bas… Il nous y a enfermés… Et ça a été là, comme
ça, contre la porte… Tout de suite… Sans même me déshabiller…
Avec juste la culotte ramenée sur le côté… À toute allure c’est
venu… Pour lui… Mais aussi pour moi… Et alors là d’une
façon ! Jamais j’avais connu ça, moi ! Je pensais même
pas que ça pouvait exister…
– Et
t’as plus eu qu’une idée en tête… Recommencer…
– Ben
oui… Mets-toi à ma place… Sauf qu’il était parti comme un
voleur… Et que j’avais beau venir y passer mes journées au
Marigny… Du matin au soir… Pas d’Ivan… Personne le
connaissait là-bas… Personne pour me mettre sur une piste
quelconque… J’étais dans un état !
– Et
c’est moi qui trinquais… Tu étais d’une agressivité à mon
égard…
– Je
suis désolée… Je…
– On
verra ça plus tard… Continue !
– Et
juste comme j’allais désespérer… Que j’étais en train d’en
prendre mon parti… Je ne le reverrais plus…
– Il
a ressurgi…
– Comme
la première fois… Exactement pareil… Sauf que là il s’est pas
assis… Il est venu droit sur moi et il m’a emmenée… À l’hôtel
en face… On y a passé l’après-midi… Et toute la nuit… Plus
rien d’autre ne comptait… Que nous deux… Que notre désir l’un
de l’autre… Sa femme n’existait plus… Tu n’existais plus…
Tout juste si j’ai pris le temps de te prévenir que je ne
rentrerais pas… Je sais même plus ce que je t’ai donné comme
prétexte d’ailleurs…
– Que
ta copine Amanda était au trente-sixième dessous… Que tu pouvais
pas la laisser toute seule… Que t’avais peur qu’elle fasse une
bêtise…
– Ah,
oui, c’est vrai… Je me rappelle maintenant…
– Trois
mois vous êtes restés sur votre petit nuage… Et puis, du jour au
lendemain…
– Ça
nous est passé, oui… Comme ça nous était venu…
– Le
désir, une fois qu’il est assouvi, s’il y a rien d’autre à
côté…
– T’as
toujours su alors ? Tout du long…
– Pour
pas se rendre compte… Ça te transpirait de partout…
– Oui,
mais que c’était Ivan ? Et les détails… Le Marigny… Tout
ça…
– Tu
prenais si peu de précautions que c’était un jeu d’enfant que
de te suivre à la trace… Quant aux clients du Marigny, ils sont
très bavards… Même quand on leur demande rien…
– Je
vois… Et tu n’as rien dit ? Tu m’as pas volé dans les
plumes ?
– Ça
aurait avancé à quoi ? Tu te serais braquée… Ça aurait
dégénéré… On se serait peut-être séparés… Sûrement même…
Tandis que là… Tu as vécu ce que tu avais à vivre… Que tu ne
pouvais pas ne pas vivre…
– Et
c’est maintenant que tu me présentes la note… Cinq après…
– C’est
le bon moment… Tu es décidée à la payer… Tu sais qu’il faut
que tu la paies…
– Ce
sera quand ?
– Bientôt…
Très bientôt…
13 heures 30
– Tu
veux faire quoi cet après-midi ?
– Je
sais pas…
– Même
pas une petite idée ?
– Non…
Pas vraiment, non…
– Pas
vraiment… Donc, un peu quand même… Ce que tu te demandes en
fait, c’est si ton soupirant d’hier sera encore là aujourd’hui…
Et tu crèves d’envie d’aller vérifier… Non ? C’est pas
ça ?
– Non…
Enfin si… Mais c’est pas pour ce que tu crois…
– Ce
que je crois surtout, c’est que si t’y vas pas, ça va
t’encombrer la tête… Demain… Après-demain… Et tous les
jours qui suivront… Et que, de toute façon, tu finiras par y
aller… Alors autant que t’y ailles tout de suite… Ce sera fait…
– Oui,
mais…
– Mais
quoi ? Il y a un risque ? Évidemment qu’il y a un
risque… Tu le sais et je le sais… Surtout après notre
conversation de ce matin… Qui a dû te faire remonter plein de
choses… Les réactiver… Mais, quelquefois, ne pas le prendre le
risque, c’est, à terme, encore plus risqué que de le prendre…
Non ? Tu crois pas ?
Gilles
a garé la voiture dans une petite rue latérale…
– Je
bouge pas d’ici… Je t’attends… Prends tout ton temps…
J’étais
à peine assise qu’il a surgi…
– Je
le savais que vous reviendriez… J’en étais sûr…
– Oui,
ben rêvez pas ! Ça n’a rien à voir avec vous… C’est
juste que l’endroit me plaît et que je m’y sens bien…
– En
attendant, vous avez bien meilleure mine qu’hier…
– J’ai
mieux dormi…
– À
moins que…
– Que
quoi ?
– Une
femme, quand elle plaît, qu’elle sent qu’on la désire, tout de
suite ça la change du tout au tout… Ça l’illumine de
l’intérieur… Et là, vous resplendissez…
– Et
vous seriez l’artisan de cette métamorphose ?
– Je
pense y contribuer, oui…
– Petit
prétentieux ! Et vous avez raconté ça à combien de femmes
depuis hier ?
– Depuis
hier ? Je ne pense qu’à vous…
– Mais
bien sûr ! Je vais vous croire…
– C’est
pourtant vrai… Et vous ? Vous avez pensé un peu à moi ?
– Non…
– Il
est bien timide votre non… Je suis sûr que si… Que vous avez
imaginé que je vous serrais dans mes bras… Au moins ça…
– Et
puis quoi encore !
– Ça
viendra peut-être…
– Oui,
ben alors là… Sûrement pas…
– On
ne sait jamais de quoi demain sera fait…
– Mais
de quoi il ne sera pas fait, si !
– Oui,
oh, alors ça !
– Je
suis mariée…
– Moi
aussi… Ça m’empêche pas de vous trouver à mon goût…
– Taisez-vous !
Il ne faut pas…
– Et
vous de me trouver au vôtre…
– Vous
vous l’imaginez…
– Il
y a des signes qui ne trompent pas…
– Ah,
oui ? Et lesquels selon vous ?
– Ça,
c’est mon secret… Que je ne vous dévoilerai pas… Vous vous
efforceriez de les dissimuler… Vous vous compliquez beaucoup trop
la vie, petite madame… Laissez-vous aller… Laissez parler votre
corps… Vos désirs…
Il
m’a posé la main sur la cuisse… Je l’y ai laissée… Je ne
l’ai pas repoussée… Quelques secondes… Quelques secondes de
trop… Et puis je me suis levée…
– Faut
que j’y aille…
Il
m’a tendu un petit bout de papier…
– Mon
06… Si vous voulez… Quand vous voudrez…
Je
l’ai pris… Et je me suis enfuie… Sans me retourner…
– Alors ?
– Oh,
ben alors, rien…
– Tout
ce temps-là pour rien ?
– On
a parlé…
– Et ?
– Il
a envie de coucher avec moi, ça, c’est sûr…
– Et
toi aussi…
– Peut-être
un peu, oui…
– Un
peu ? T’en crèves d’envie…
J’ai
posé ma tête sur son épaule…
– Il
me trouble… Si, c’est vrai… Comment il me trouble…
9 août
– Enzo
avait une copine… Ivan était marié… Ton soupirant actuel aussi…
C’est une constante chez toi, dis donc…
– Ça
se trouve comme ça… C’est un pur hasard…
– À
moins que…
– Me
dis pas ça, Gilles… S’il te plaît, me dis pas ça…
– Pourquoi ?
Parce que tu sais que c’est vrai ?
– Mais
jamais de la vie enfin !
– Tu
la connais la femme d’Ivan ?
– Non…
Bien sûr que non… Comment tu veux ?
– Elle
a été au courant pour vous ?
– Je
crois, oui… En tout cas, c’est ce qu’Ivan m’a laissé
entendre…
– Et
t’as pas cherché à savoir ?
– À
savoir ? Mais à savoir quoi ?
– Comment
elle l’avait vécu, elle, ta relation avec son mari…
– Je
me suis pas posé la question…
– Tu
t’en fichais…
– Mais
non, mais…
– Bien
sûr que si que tu t’en fichais ! Du moment que tu pouvais
t’envoyer en l’air tant et plus avec Ivan… Le reste, pour toi,
ça ne présentait pas le moindre intérêt…
– J’étais…
– Dans
un état second… Je sais… Tu l’as déjà dit…
– Mais
pourquoi tu me parles d’elle ?
– Tu
sais ce qu’elle est devenue ? Ce qu’ils sont devenus ?
– Comment
je pourrais ? Je l’ai complètement perdu de vue Ivan…
– Eh,
bien, je vais te le dire, moi ! Quand tu as eu disparu de leur
existence, ils ont essayé de reprendre cahin caha une vie de couple
normale… Avec des hauts… Avec des bas… Ils n’y sont jamais
parvenus… Elle n’a jamais réussi à lui pardonner… Si bien
qu’ils ont fini par se séparer… Définitivement…
– Je
suis désolée…
– Tu
peux bien l’être tant que tu veux… Ça ne changera strictement
rien à la situation… Ah, t’en auras fait du dégât, ça, on
peut pas dire…
– C’est
pas de ma faute…
– Pardon ?
– Non…
Rien… Excuse-moi ! Tu vas me punir ?
– Uniquement
si tu estimes, en conscience, l’avoir mérité…
– Évidemment
que je l’ai mérité… Et puis…
– Et
puis ?
– Maintenant
que je sais… Que tu m’as dit… je vais culpabiliser comme une
malade… Tandis que si tu me punis…
– T’auras
payé… Et tu te sentiras mieux… Beaucoup mieux…
– Voilà,
oui…
– Et
ce qui serait encore plus efficace, ce serait que ce soit Emma
elle-même, la femme d’Ivan, qui te la donne cette fessée… Non ?
Tu crois pas ?
– Peut-être,
oui… Sûrement même… Seulement c’est pas possible, ça…
– Bien
sûr que si ! Dans une heure elle sera là…
11 heures
Une
grande femme brune… Sèche… Hautaine… Qui m’a fixée,
d’emblée, droit dans les yeux… J’ai baissé les miens…
– Alors
comme ça c’est toi… Fais-toi voir…
Son
doigt sous mon menton… Pour m’obliger à relever la tête…
– Ça
m’étonne pas… T’as bien la gueule à ça… À foutre le
bordel dans les couples des autres… C’est ton petit plaisir, ça,
hein ?
– Mais
non, mais…
– Déshabille-toi,
va ! Ça vaudra mieux que de raconter n’importe quoi…
Je
n’ai pas discuté… Je me suis exécutée… Lentement… De plus
en plus lentement… Je me suis interrompue…
– Eh
bien ? La culotte ! Elle mettait moins de temps à tomber
quand il s’agissait de te faire troncher par Ivan, hein ?
Je
l’ai retirée… En lui tournant le dos…
Elle
a ri…
– C’est
ça ! Mets-toi dans le bon sens…
Une
brusque poussée au creux des reins… J’ai été projetée, à
plat ventre, sur le canapé… Et ça a cinglé… Aussitôt… Un
martinet… Qui s’est abattu et réabattu… Dix fois… Vingt
fois… Trente fois… Inlassablement… À pleines fesses…
– Ah,
t’en as pris du bon temps… T’en as pris… Eh bien chacun son
tour…
Ça
a été encore plus fort… Plus rapproché… J’ai gémi… J’ai
crié…
Ça
s’est arrêté d’un coup…
C’est
Gilles qui m’a fait relever…
– Remercie
Emma… Qui a eu la gentillesse de venir te remettre en paix avec
toi-même…
– Oui…
Merci, Emma… Merci…
13 heures
– Elle
est pas restée…
– Non…
Elle avait à faire… Oh, mais elle va revenir… Très bientôt…
C’est prévu… Avec son mari…
– Son
mari ?
– Son
mari, oui… Parce que tu lui as rendu un fier service finalement en
couchant avec Ivan… Ils étaient dans une impasse tous les deux…
Ils n’avaient plus de couple que le nom… Il lui fallait
l’impulsion pour sauter le pas… Pour mettre un terme… Tu la lui
as donnée… Elle a rencontré quelqu’un d’autre… Elle est
heureuse…
– Mais
alors… Tout-à-l’heure…
– Ça
change rien… Tu méritais quand même, non ?
– Si…
Oui… Oui…
– Ah,
tu vois… Bon, mais tu vas faire quoi de ton après-midi ?
Aller là-bas ? Te laisser conter fleurette par ce charmant
jeune homme qui te met en émoi ?
– Je
sais pas… Je crois pas, non…
– Parce
que ?
– Comme
ça… J’ai pas trop envie aujourd’hui…
– Je
te comprends… Parce que s’il se montre très entreprenant – et,
au point où vous en êtes, il y a toutes les chances qu’il le
soit – tu ne pourras pas lui céder… T’en crèves d’envie,
mais tu ne pourras pas… Vu l’état de ton derrière… Tu ne vas
pas quand même pas lui exhiber ça sous le nez… Surtout pour une
première fois… Alors ? Lui résister ? Lui dire non ?
Tu n’aurais pas d’autre solution… Quoi qu’il doive t’en
coûter… Et il t’en coûterait beaucoup… Il te faudrait
pourtant en passer par là… Au risque qu’il prenne ce refus
ponctuel lié aux circonstances pour un refus définitif… Qu’il
s’en offusque… Ou qu’il se décourage… Non… Tu as raison…
Mieux vaut éviter de le rencontrer tant que ton derrière ne sera
pas redevenu présentable… Tant que tu n’auras pas les coudées
franches… Allez, vas-y, va ! Appelle-le ! Dis-lui que
t’es désolé, mais que t’as un empêchement… Invente quelque
chose… Quelque chose de plausible… Mais ça tu sais très bien
faire… Bon, eh bien je te laisse alors… Je vous laisse tous les
deux… Vous allez certainement avoir des tas de choses à vous dire…
15 heures
– À
quelque chose malheur est bon, tu vois… On va pouvoir passer
l’après-midi ensemble… Tous les deux… Rien que nous deux…
Génial, non ?
– Où
tu m’emmènes comme ça ?
– Tu
t’en doutes pas un peu ? Vu la direction qu’on a prise…
– C’est
pas ?
– Là
où tu t’envoyais en l’air avec Enzo ? Si ! Pourquoi ?
– Ben,
parce que…
– Parce
que quoi ? Après le café où tu as fait sa connaissance, la
petite plage où vous vous ébattiez… Avoue qu’il y a une logique
là-dedans…
– Alors ?
Vous vous installiez où tous les deux ?
– Par
là… Je sais plus trop au juste…
– Mais
si, tu sais… Tu sais même très bien… C’était où ?
– Là-bas…
Dans le petit renfoncement…
– Ah,
ben tu vois quand tu veux…
Il
m’a prise par le bras… Entraînée…
– Là ?
– À
peu près, oui… Peut-être un tout petit peu plus à gauche…
– Là
alors ? Parfait…
Et
il s’est déshabillé… Tout… Complètement…
– Eh
ben allez ! Toi aussi ! Il fait beau… Qu’on en
profite ! Ça durera peut-être pas… Qu’est-ce tu regardes ?
De quoi t’as peur ? Qu’il arrive quelqu’un ? Tu t’en
fichais quand c’était lui… Ou plutôt non… C’est pas que tu
t’en fichais… C’est que tu te posais même pas la question…
Ah, ben voilà… Voilà…
Je
me suis allongée à ses côtés… Il m’a posé une main sur le
ventre… M’a lissé, du bout du pouce, le pourtour du nombril…
Est remonté… A escaladé un sein… L’a empaumé… En a
délicatement sollicité la pointe…
– Tu
sais quoi ? Tu es de plus en plus désirable… Plus les années
passent et plus…
Il
n’a pas terminé… Il s’est dressé contre ma cuisse… A enfoui
sa tête dans mon cou… Il a voulu… On s’est voulus…
10 août
– Il
y a longtemps que t’es réveillée ?
– J’ai
pas fait attention… Une heure… Peut-être deux…
– Et
tu pensais à quoi ? À tout ce que t’as encore à me
raconter ?
– Oh,
il y en a pas tant que ça…
– Question
de point de vue… Allez, vas-y ! Vide ton sac ! Tu te
sentiras mieux après, tu verras…
– C’est
pas facile, Gilles… Aide-moi !
– Que
je t’aide ? C’est-à-dire ? Que je te lance sur une
piste… C’est ça que tu veux, hein ? Histoire d’être sûre
que tu ne me révèles que ce que je sais déjà… Eh, non, ma
chère… Non… C’est trop facile… Cette fois l’artiste
travaille sans filet…
– Mais
je sais pas, moi ! Comment tu veux ?
– C’est
bien ce que je disais… Il y en a tellement que tu sais pas par quel
bout commencer…
– Mais
pas du tout, Gilles, enfin ! Pas du tout ! Bon… Mais ma
copine Andrea… Tu te rappelles bien Andrea quand même ? On
était à son mariage… Rémi il s’appelait lui…
– Peut-être…
Ça remonte loin…
– Oh,
oui… Un an après le nôtre de mariage c’était…
– Et
alors ?
– Et
alors il m’est tombé dessus la veille de la cérémonie… À la
déclaration en règle j’ai eu droit… Qu’il m’aimait comme un
fou… Qu’il n’avait jamais aimé que moi… Que s’il y avait
eu quelque chose entre Andrea et lui, c’était parce qu’on était
amies toutes les deux… Que ça lui permettait de me voir… De me
parler… Mais qu’il suffirait d’un mot de moi pour qu’il
annule tout…
– Ah !
Et t’as répondu quoi à ça ?
– Qu’il
s’imaginait qu’il m’aimait, mais qu’en réalité… Il m’a
juré que si… Il m’aimait… Il m’adorait… Il s’est jeté à
mes genoux… Il me les a embrassés… Il m’a suppliée…
– Et
t’es sortie comment de ce guêpier ?
– J’étais
mariée… Je n’avais pas la moindre intention de te quitter… Et
puis Andrea l’aimait… Est-ce qu’il imaginait une seule seconde
que je pourrais faire un truc pareil à ma meilleure copine ?
– Je
reconnais bien là ton haut sens moral…
– Fiche-toi
bien de moi…
– Et
donc ? Ce Rémi ?
– Il
a fini par partir… Complètement effondré…
– Et
s’est, au bout du compte, montré raisonnable… Le lendemain, il
était marié…
– Raisonnable…
Si on veut…
– Parce
que ?
– Tu
te rappelles où il avait lieu le mariage ?
– Vaguement…
Un château avec un parc immense…
– Plein
de recoins… De bosquets… De labyrinthes… Oui… Dans
l’après-midi la tête s’est mise à me tourner… L’alcool…
Le bruit… J’ai voulu m’isoler un peu… Il y avait un écrin de
verdure… Avec un banc… Je m’y suis réfugiée… Je n’y étais
pas depuis cinq minutes qu’il a surgi… Qu’il s’est assis à
mes côtés… Et qu’il a fondu en larmes… Il faisait pitié…
Vraiment…
– Si
bien que tu t’es dévouée pour lui offrir un peu de réconfort…
C’était vraiment très généreux de ta part… Et toi ?
– Quoi,
moi ?
– J’espère
que toi aussi t’y as trouvé ton compte…
– Écoute,
Gilles…
– Ben,
oui… Forcément… Se taper le mec de sa meilleure amie le jour où
elle se marie comment ça doit être excitant… Non ?
– C’était
pas ça… Tu comprends pas…
– Sans
compter qu’elle était pas loin… Qu’elle aurait pu se mettre à
le chercher… Vous tomber dessus… Ou bien moi… J’aurais pu me
demander où tu étais passée… Tu imagines ? Mais tu adores
ça jouer avec le feu… T’y prends un pied pas possible… Donc tu
dis que c’était bien… Que tu t’es éclatée…
– Hein ?
Mais j’ai jamais dit ça…
– Ah,
oui ? C’était sans plus, quoi, alors ! Décevant en
somme… C’était pourtant pas l’impression que ça donnait de là
où j’étais… Deux fois t’as joui… Une fois tout en retenue…
Du bout des lèvres… Et l’autre à fond… T’as tout lâché…
Mais peut-être que tu faisais semblant…
– T’étais
là ? C’est pas vrai que t’étais là… T’étais où ?
– Tu
n’as pas répondu à ma question…
– Non,
je faisais pas semblant… Non… Tu le sais bien… Mais t’étais
où ?
– Ça
n’a aucune espèce d’importance où j’étais… L’essentiel,
c’est que tu l’aies enfin dit… Que ce soit enfin sorti…
Depuis le temps que je l’attendais cet aveu-là… Il en aura fallu
des tours et des détours pour qu’enfin tu t’y résolves…
– T’es
fâché ?
Il
m’a attirée contre lui… Serrée dans ses bras…
14 heures
– Tu
fais voir ?
– Quoi ?
Mon derrière ?
Il a
fait signe que oui… Oui…
Je
me suis déculottée… Tournée… Il y a longuement promené son
doigt…
– Ça
se voit encore… Et pas qu’un peu…
– Ben
oui… Forcément… D’hier seulement ça date…
– Tu
veux aller le retrouver quand même ?
– Non,
Gilles, non… Vaut mieux pas… Pas encore… Plus tard… Parce que
j’y ai repensé à ce que t’as dit… T’avais complètement
raison… Je suis piégée si j’y vais… Dans tous les cas de
figure…
– Finalement
j’aurais un bon moyen de t’empêcher de le voir définitivement…
Ce serait de te mettre fessée sur fessée… Que t’aies le
derrière constamment rougi…
– Je
sais pas…
– Tu
sais pas quoi ?
– Si
ça y ferait vraiment… Parce qu’au bout d’un moment je pourrais
pas m’empêcher… J’aurais trop envie… J’irais quand même…
Et tant pis s’il voyait… Il se passerait ce qui se passerait…
– Bon,
mais on en est pas là… Ou pas encore…
15 heures
– J’en
étais sûre que t’allais me ramener là… Certaine…
On
s’est déshabillés… On a tout enlevé… On s’est installés…
Exactement au même endroit…
– Oh,
ben oui… Oui… C’est tellement excitant pour toi de faire ça
avec ton mari là où tu le faisais avant avec ton amant…
– Mais
non, Gilles…
– Non ?
On a vu ce que ça donnait hier… Et je suis bien tranquille que
c’est la même chose aujourd’hui… T’es déjà toute trempée,
je suis sûr… Rien que d’être là… Rien qu’à l’idée…
Il
m’a parcourue… Du bout des doigts… Je l’ai laissé faire…
Descendre… S’aventurer…
– Ah,
tu vois ! À quoi ça t’avance de nier l’évidence comme ça,
hein, tu peux me dire ? À te faire du mal et puis c’est tout…
Accepte les choses telle qu’elles sont… Accepte-toi telle que tu
es… Et tout ira beaucoup mieux, tu verras…
– Oui,
mais…
– Il
n’y a pas de mais qui tienne…
Et
il m’a prise contre lui… S’est fait tout doux… Très
amoureux… Ça a été un plaisir plein… Intense… Que j’ai
psalmodié, nouée à lui…
Il
est resté en moi…
– Tu
m’as pas dit pour Rémi…
– Je
t’ai pas dit quoi ?
– Si
tu l’as revu… Si vous avez remis ça…
– Non…
Je te jure, Gilles… Non…
– Mais
tu y as pensé…
– Quelquefois,
oui…
– Et
t’as essayé de le revoir…
– Non…
Mais c’est vrai que j’ai espéré… Que j’ai attendu…
J’étais sûre qu’il allait se manifester…
– Ce
qu’il n’a pas fait… Il avait eu ce qu’il voulait… Tu
l’intéressais plus…
– Je
crois pas que ce soit ça, non…
– C’est
quoi alors ?
– Je
sais pas… Il y en a plein des explications possibles… Mais pas
celle-là…
– Parce
qu’elle te ferait trop mal ?
– Non…
Parce que ça lui ressemble pas… C’est pas lui, ça… Ça peut
pas être lui…
– Tu
y crois toujours, hein ?
– Pas
vraiment, non…
– Mais
quand même un peu…
– Ce
qui me fait mal, c’est de pas savoir… De pas arrêter de me
demander…
– Tu
y es retournée ? Au château ? Sur le banc du jour du
mariage… Tu y es retournée ? Oui… Évidemment que tu y es
retournée… Des après-midis entières tu y as passé… À
attendre… Des fois qu’il finisse par y venir lui aussi… Qu’il
ait la nostalgie de ce qui s’est passé là entre vous deux…
– Tu
me fais peur… Tu sais tout… Tu devines tout…
– Et
si ?
– Quoi ?
– Si
on y allait ensemble un jour là-bas ? Tous les deux ?
– Tu
comprends tout… Tu comprends vraiment tout…
– Peut-être
que ça le ferait venir…
– Tais-toi,
Gilles ! S’il te plaît, tais-toi ! Dis rien !
11 août
Dix
fois je l’ai reposé le téléphone… Dix fois je l’ai repris…
Ça a sonné… Cinq fois… Six fois… Ça a décroché…
–Allô…
Oui…
– Bonjour…
Monsieur Joubert ?
– Ah,
non ! C’est pas monsieur Joubert, non…
– Excusez-moi !
J’ai dû me tromper… J’ai vérifié pourtant… Chiffre à
chiffre… Je comprends pas…
– Attendez !
Raccrochez pas ! Elle me dit quelque chose votre voix…
N’importe comment si vous avez mon numéro, c’est forcément
qu’on se connait…
– Je
vois pas…
– Je
suis dans votre répertoire ?
– Non…
Sur un petit bout de papier…
– Ah,
ça y est ! J’y suis… Vous êtes la fille du café… Vous
allez bien ?
– Du
café ? Quel café ? Ah, oui ! Désolée… Joubert
aussi m’avait laissé son numéro sur un papier… Je me suis
emmêlé les pinceaux…
– Pas
grave… Ça fait plaisir de vous entendre… Alors ! Qu’est-ce
que vous devenez ?
– Oh,
rien de spécial…
– En
attendant, vous me faites faux bond… Tous les après-midis je suis
fidèle au poste… Et tous les après-midis j’attends pour rien…
– S’il
y a que ça pour vous faire plaisir, je finirai bien par revenir
faire un bout de causette avec vous…
– Quand ?
– J’en
sais rien quand… Quand je pourrai…
– Cet
après-midi ?
– Vous
êtes bien pressé…
– Oh,
oui… Oui… C’est un tel bonheur de passer un moment avec vous…
– En
faites pas trop…
– Vous
viendrez ?
– J’essaierai…
– Oh,
si, vous viendrez… Si ! Dites oui…
– Vous
verrez bien…
11 heures
– Gilles…
– Oui…
– Tu
comptais qu’on fasse quoi cet après-midi ?
– Pourquoi
tu me demandes ça ?
– Parce
que je l’ai eu au téléphone le type du café, tu sais…
– Ce
qui veut dire que tu l’as appelé… Il te manquait tant que ça ?
– Non…
Enfin, si ! Un peu…
– Et
alors ?
– Ben,
je vais y aller…
– Tu
fais bien ce que tu veux…
– Mais
si tu préfères qu’on soit tous les deux, je reste là, c’est
pas un souci…
– Il
n’en est pas question… Non, non… Tu y vas…
14 heures
– Bon,
ben à tout-à-l’heure alors…
– Attends !
Une petite seconde… Viens voir là…
– Qu’est-ce
qu’il y a ?
– Elles
y sont plus les marques ?
– Pratiquement
plus… Faut vraiment le savoir…
– Faut
remédier à ça alors… Non ?
– Gilles…
– Oui ?
– Non…
Rien…
– On
va te faire toute belle, tu vas voir… Quelque chose de soigné…
Qu’il soit content… Qu’il apprécie… Si d’aventure elle se
termine au lit votre après-midi… Allez ! Mets-moi ce petit
derrière à l’air…
15 heures 30
– Tu
m’as manqué…
Le
tutoiement… D’emblée…
– Comment
j’aurais pu vous manquer ? On se connaît à peine…
– N’empêche
que c’est comme ça… Tu éclaires mes journées… Tu les
habites…
– Je
suis un trompe-l’ennui en somme… Que ce soit moi ou une autre, ça
n’a pas la moindre espèce d’importance… Du moment qu’il y a
quelqu’un à vos côtés pour vous distraire…
– Tu
sais bien que c’est pas ça…
– Non,
justement… Je sais pas…
– Promets-moi !
– Que
je vous promette ? Mais que je vous promette quoi ?
– De
ne pas me laisser, comme ça, des semaines entières sans ta
présence… Sans la moindre nouvelle…
J’ai
ri… De bon cœur…
– Des
semaines entières ? Ça fait trois jours…
– Une
éternité… Promets-moi !
– Si
tu veux…
– Merci…
Il
m’a posé la main sur le genou… Je l’y ai laissée… Trois
secondes… Dix secondes… Et puis je l’ai doucement – tout
doucement – repoussée…
– Chuuut…
– Ça
vous ennuierait qu’on aille marcher un peu ? Non, parce qu’à
force de vous attendre, comme ça, pendant des heures et des heures,
j’ai fini par attraper des fourmis dans les jambes, moi !
Ça
m’ennuyait pas, non…
Il
s’est levé… Je me suis levée…
– Vous
m’emmenez où comme ça ?
– Nulle
part… N’importe… Où ça voudra…
Ça
a voulu dans tout un tas de petites rues… Où il m’a très
doucement pris le bras… Je ne le lui ai pas retiré… Ça nous a
amenés dans un square… Déposés sur un banc, bien à l’abri,
dans un petit réduit de verdure…
– On
est bien là, hein ?
On
était bien, oui…
Il
s’est penché vers moi… A plongé ses yeux dans les miens…
– Tu
sais quoi ? J’ai une envie folle de t’embrasser…
Il a
attendu une réponse… Qui n’est pas venue…
Il a
approché ses lèvres… Plus près… Encore plus près… A
effleuré les miennes… S’en est éloigné… Est revenu… A
recommencé… Et c’est moi… Moi qui ai jeté les bras autour de
son cou… Qui l’ai attiré… Retenu… Pour un interminable
baiser…
Il
s’est détaché… M’a caressé la joue… Le cou…
– Si
tu savais comme je l’ai attendu ce moment-là ! Comme j’en
ai rêvé…
– Et
moi donc !
On
s’est souri… Encore embrassés…
– Et
maintenant ?
J’ai
haussé les épaules…
– On
le sait bien ce qui va se passer…
– Tu
as envie ?
– Très…
Mais j’ai encore plus envie qu’on se fasse un peu attendre… Le
temps d’avoir un peu plus envie encore…
19 heures
– Le
temps que les marques se soient estompées… C’est ça, hein ?
– Je
sais pas… Peut-être… J’ai du mal à savoir…
– À
savoir quoi ?
– Ce
qu’il en penserait… Comment il réagirait…
– Ça
va l’exciter… Il y a toutes les chances… Et toi avec, par la
même occasion…
– Et
si ça le choque ?
– Oui,
oh, alors là, tu sais ! L’immense majorité des hommes dans
un cas comme celui-là… Non… Ce qu’il y a… Il va vouloir
savoir, ça, c’est sûr… Connaître les tenants et les
aboutissants… Il va te poser des tas de questions…
– Qu’est-ce
que je vais lui dire ?
– Ben,
la vérité… Qu’est-ce tu veux lui dire d’autre ?
– Rien…
Rien… Seulement…
– Seulement
il va savoir que tu es très très complice avec ton petit mari… Ça
t’ennuie ?
– Oh,
non… Non… Bien sûr que non…
– Eh
bien alors ! Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes…
12 Août
– Deux
heures au téléphone… Et vous vous voyez cet après-midi… C’est
plus de l’amour, c’est de la rage…
– Non,
Gilles, non… C’est pas ça… C’était pas lui…
– Ah,
oui ? C’était qui alors ? Attends ! Laisse-moi
deviner ! Un type qui voulait te vendre des panneaux solaires…
C’est ça, hein ?
– Te
moque pas ! C’est déjà assez compliqué comme ça…
– On
peut savoir ?
– Qu’est-ce
que je peux être conne quand je m’y mets… J’aurais dû lui
raccrocher au nez… Et puis voilà…
– C’était
Enzo, hein ?
– Comment
tu le sais ?
– Enzo
que sa Nathalie vient de plaquer…
– Pour
de bon cette fois…
– Oui,
oh, alors ça !
– Je
voulais pas, hein, mais comment il sait y faire ce salaud ! Il
m’a complètement entortillée…
– Et
comme t’adores te laisser entortiller…
– Mais
non, mais… Je sais pas comment je me débrouille, mais à l’arrivée
tout tourne toujours comme je voudrais pas…
– Comme
t’essaies de te faire croire que tu voudrais pas… Et donc, vous
allez vous revoir…
– Je
lui ai pas dit oui…
– Tu
lui as pas dit non non plus…
– Je
crois pas que j’irai finalement…
– Parce
que ?
– Parce
qu’il se fout de moi… S’il croit qu’il va lui suffire de
claquer des doigts… C’est pas parce que sa chieuse l’a plaquée…
– Vas-y !
Vas-y ! Casse-lui du sucre sur le dos… Défoule-toi ! Ça
te fera du bien… T’iras le retrouver, après, dans de bien
meilleures dispositions…
– Je
t’assure, Gilles…
– Te
voile pas la face… T’en crèves d’envie… Par contre, tu vas
organiser ton emploi du temps comment ? Enzo le matin et le
petit nouveau l’après-midi ? Il va plus te rester beaucoup de
place pour moi, dis donc !
– Tu
sais bien que si ! C’est toi l’essentiel… C’est avec toi
que j’ai envie d’être… C’est vers toi que je reviens…
Toujours…
– Eh
ben dis donc !
– Oui…
Hou la la… Comment c’était bon… C’est de la folie… Pour
toi aussi, Gilles ?
– Ça
se voyait pas ?
– Si !
Si ! Bien sûr… Et pas qu’un peu… N’empêche qu’il y a
des trucs, j’ai du mal à les comprendre…
– Quoi,
par exemple ?
– Ben,
les autres nanas, quand elles vont voir ailleurs, c’est parce que
ça va plus avec leur mari… Parce qu’il les néglige… Qu’elles
sont devenues transparentes… Et moi, c’est exactement le
contraire… Plus ça va bien avec toi et plus j’ai envie de vivre
aussi quelque chose avec d’autres… Plus j’en rencontre d’autres
et plus ça me rapproche de toi… Et donc plus… C’est sans fin…
Comment t’expliques ça ?
– Est-ce
qu’il faut forcément chercher à expliquer ? T’es bien
comme ça… Je suis bien comme ça…
– Toi
aussi ? C’est vrai ? Je me demande des fois, tu sais…
– Je
suis bien… Parce que je vois que tu es bien…
– N’importe
comment c’est ta faute, dans un sens, tout ça…
– Ben,
voyons !
– Si !
Parce que tu sais ce que je me disais tout-à-l’heure quand je
parlais avec Enzo au téléphone ? C’est que c’était vilain
ce que j’étais en train de faire… Que t’allais me flanquer une
fessée pour la peine… Sauf que c’était exactement l’effet
inverse que ça faisait… Plus j’y pensais et plus j’avais envie
que tu me la flanques… Plus j’en rêvais… Et plus je le
laissais dire Enzo… Et plus j’entrais dans son jeu… Je faisais
même carrément ma petite allumeuse…
– Si
c’est pas un appel du pied, ça !
– Ben
oui… Si ! Tu vas me la donner ?
– Je
vais te la donner, oui…
– Quand ?
– C’est
là-bas que tu vas le retrouver ? À l’endroit habituel… Là
où l’autre jour, toi et moi…
– Sûrement,
oui…
– Alors
c’est là-bas que j’irai vous surprendre… Et c’est là-bas
que je te la donnerai… Devant lui…
– Génial !
Trop génial ! Je lui envoie un SMS… On se voit
tout-à-l’heure…
– Et
l’autre ? Ton amoureux transi ?
– Il
attendra… Il est pas à un jour près…
15 heures
Il a
voulu se lancer aussitôt dans tout un tas d’explications… De
justifications à n’en plus finir…
– Non,
parce que tu comprends… Nathalie…
– Écoute,
Enzo, ce que t’as vécu avec Nathalie… Ce que tu vis peut-être
encore avec elle…
– Il
n’y a plus rien, je t’assure…
– Ça
ne me regarde pas… Je m’en fous… Et j’ai pas du tout
l’intention de passer des heures et des heures à t’écouter m’en
parler… Alors ou bien, quand t’es avec moi, il y a que moi qui
compte… Il y a que nous… On prend du bon temps et on oublie tout
le reste… Comme on faisait avant… Ou bien alors on s’en tient
là… Chacun sa route… Ça vaudra mieux… Pour tout le monde…
Il
m’a attirée contre lui…
– Excuse-moi !
Je suis idiot il y a des moments…
Serrée
dans ses bras… Et il y a eu le goût de ses lèvres… Ses yeux en
chavire… Son désir pressé contre mon bas-ventre…
Je
lui ai pris la main…
– Viens !
Là-bas…
Il a
souri…
– Notre
petit chez-nous… Oh, mais il y a eu des squatteurs, on dirait… Et
de vrais forcenés… L’herbe en est encore toute traumatisée…
On
s’est allongés… On s’est enlacés… Il a glissé une main
sous mon tee-shirt… Est remonté… S’est emparé d’un sein…
Enzo…
Sa douceur… Son ardeur… Et Gilles… Quelque part… Déjà…
Sûrement… À attendre son heure…
– Tu
m’as manqué… Tellement…
– Toi
aussi, Enzo… Toi aussi… Si tu savais…
Sa
bouche… Ses mains… Sur moi… Partout… Son désir… Mon désir…
Sa queue…
– Viens !
Oh, s’il te plaît, viens !
J’ai
refermé les jambes autour de lui…
Pas
tout de suite, Gilles ! Ne viens pas ! Pas tout de suite…
Pas encore… Je t’en supplie, attends ! Laisse-moi le temps !
Laisse-moi jouir…
– Oh,
Enzo, mon amour ! Je jouis… Je vais jouir… Oh, c’est bon !
Que c’est bon !
On
est restés blottis l’un contre l’autre… Des martinets
dessinaient de grands cercles dans le ciel… Sa queue a repris
consistance contre ma cuisse… J’ai ri…
– Mais
c’est que tu serais insatiable…
– Il
y avait si longtemps… Non, mais qu’est-ce qu’on a pu être
cons !
– Qu’est-ce
que TU as pu être con…
– Il
y a quelqu’un…
Il a
tendu la main vers ses vêtements… Qu’il a ramenés vers lui…
– Quoi ?
– Il
y a quelqu’un… Un bonhomme… Il vient vers nous…
Dont
il s’est maladroitement efforcé de se faire un rempart…
– Où
ça ? Oh, merde ! C’est mon mari…
– Ton
mari ? Mais qu’est-ce qu’il fait là ?
– Pose
pas de questions idiotes, je t’en prie… C’est pas le moment…
Gilles
nous a tenus un long moment sous son regard… Tous les deux… L’un
après l’autre…
– Eh,
bien, ma chérie, tu ne me présentes pas ce charmant jeune homme ?
– Enzo…
C’est Enzo…
– Enchanté
de faire votre connaissance, Enzo… Vous avez sympathisé avec ma
femme, à ce qu’il semble… Vous m’en voyez ravi…
– Écoute,
Gilles…
– Que
j’écoute ? Que j’écoute quoi ? Qu’est-ce que tu vas
essayer de m’expliquer ?
– Rien…
Non, rien…
– J’aime
mieux ça… Bon, mais tu sais ce qui t’attend ?
– Maintenant ?
Pas maintenant… S’il te plaît, Gilles, pas maintenant…
– Maintenant,
si ! On paie cash chez moi… La maison ne fait pas crédit…
Donne-moi ta ceinture, toi, le Don Juan… Qu’elle serve à quelque
chose… Et toi, ma chérie, mets-toi sur le ventre… Là… Comme
ça… Parfait… Allez, tu es prête ? On y va…
19 heures
– Trop
génial ton idée de te servir de sa ceinture…
– Tu
as aimé ?
– Tu
parles si j’ai aimé… Qu’est-ce qu’il faisait, lui ?
– Il
regardait, tiens ! Qu’est-ce tu voulais qu’il fasse ?
– Et
ça lui plaisait ?
– Il
le montrait pas… Il montrait rien…
– Dommage…
J’aurais bien aimé savoir…
– Peut-être
la prochaine fois…
– La
proch…
– Ça
te dit pas ?
– Oh,
si ! Bien sûr que si !
13 août
– Il
y aura pas de prochaine fois, Gilles…
– Hein ?
Mais pourquoi ça ?
– Parce
que… Tiens, écoute ! C’est un texto d’Enzo… « Désolé
pour hier… J’espère pour toi que ça va… Mieux vaut s’en
tenir là… C’est trop dangereux… Je garderai un excellent
souvenir de toi… De nous… Je t’embrasse… Enzo… »
– Et
t’as répondu quoi à ça ?
– Rien
encore…
– En
tout cas te voilà fixée sur les sentiments de ce monsieur à ton
égard…
– Il
y a longtemps que je l’étais…
– Et
sur sa façon d’affronter les situations…
– Je
ne me faisais aucune illusion là-dessus non plus…
– Et
donc… maintenant ?
– Ben,
t’as entendu… Il veut plus…
– Oui,
mais… Et toi ? C’est toi qui comptes…
– Il
y a cru hier… Il a pensé que tu me punissais vraiment…
– Ce
qui était effectivement le cas…
– Oui…
Enfin non… Oui et non… Je le savais… On était d’accord…
Sauf que lui, il y a vu que du feu…
– Ce
qui t’a ravie…
– Tu
sais bien…
– Et
tu te faisais une fête de remettre ça…
– Et
pas qu’un peu…
– Eh
ben alors ! Fais-le changer d’avis !
– Tu
crois ?
– Je
crois que quoi ? Que tu vas y arriver ? Évidemment que tu
vas y arriver ! Vas-y ! Appelle ! Mets le haut-parleur
et appelle-le !
– Je
vais le faire, oui… Mais d’abord je vais aller prendre un bain…
10 heures
– Allô…
Enzo ? C’est moi… J’ai eu ton texto…
– Oui…
C’est mieux comme ça, je crois… Pour tout le monde…
– Je
vois pas en quoi…
– Ah,
ben si ! Si ! Maintenant que ton mari est au courant…
– Ça
change quoi ?
– Mais
tout enfin !
– Pour
moi, ça change pas mal de choses, oui… Mais c’est mon problème…
Ça te concerne pas…
– Quand
même un peu, non ?
– Est-ce
qu’il t’a dit quelque chose ? Est-ce qu’il t’a fait la
moindre réflexion ?
– Non,
mais…
– Mais
quoi ? T’as peur qu’il vienne te foutre sur la gueule, c’est
ça ?
– Non…
Non, mais j’ai pas envie de te faire courir le risque, à toi, d’en
ramasser une autre…
– Parce
que tu t’imagines que… Non, mais attends ! Je suis pas
idiote… Ça m’a servi de leçon… C’est de ma faute aussi…
J’aurais bien dû me douter que retourner là-bas, c’était la
dernière des choses à faire… Il y a bien trop de monde qui sait
que c’est là qu’on se retrouvait… Mais c’est pas une raison
non plus pour mettre un terme… Suffira de faire attention à
l’avenir… De prendre des précautions… De se voir ailleurs…
Et tout se passera bien, tu verras…
– Oui…
Enfin… Il va se méfier maintenant… Te surveiller…
– Oh,
alors ça, j’en fais mon affaire… Gilles, dans deux jours je
l’aurai rassuré… D’autant qu’il demande que ça…
– Il
y aura quand même toujours un risque…
– Ah,
ben ça, oui… Forcément… Il peut toujours y avoir un
impondérable… On peut commettre une maladresse… Une imprudence…
N’importe quoi il peut se passer… On ferait plus jamais rien si
on attendait d’être sûr à cent pour cent…
– Je
sais bien, mais…
– Eh,
ben alors ! Le tout, c’est de faire en sorte qu’il y en ait
le moins possible des risques… Tu crois que j’ai envie de me
refaire tanner le cul, moi ? N’empêche que le risque je suis
quand même prête à le prendre… Pour le bonheur d’être dans
tes bras… De me serrer contre toi… De sentir ton désir se
dresser contre mon ventre… Venir y éclater… Maintenant si toi,
de ton côté, t’en as plus rien à foutre de moi… Si t’es prêt
à te jeter sur n’importe quel prétexte pour me larguer…
– Mais
jamais de la vie, enfin !
– Eh,
ben alors ! Bon, mais laisse-moi faire… Je m’occupe de tout…
Je nous trouve un endroit et je te rappelle demain… Sans faute…
D’accord ?
– Si
tu veux, oui…
– À
demain alors… Je t’embrasse…
Gilles
s’est penché sur moi…
– Tu
as été absolument parfaite, ma chérie…
14 heures
Gilles
m’a rejointe dans la salle de bains… Il m’a regardée me
coiffer… Me maquiller…
– C’est
pour aujourd’hui, hein, avec le bel inconnu…
Nos
regards se sont enlacés dans la glace…
– Il
y a des moments j’aimerais vraiment savoir comment tu me vois tout
au fond de toi… Comment tu me juges…
– Je
ne te juge pas…
– Non…
Tu m’en laisses le soin… Tu te contentes d’exécuter la
sentence…
– On
peut voir ça comme ça, oui…
15 heures
Personne…
Ni à « notre » table ni à aucune autre… Sur la place
non plus… Nulle part… J’ai eu beau chercher des yeux…
Désespérément… Non… Nulle part… Il n’était pas là… Il
n’était pas venu…
– Eh
bien, petite Madame… On est perdue ?
Hilare,
au volant de sa voiture…
– Idiot !
Ah, c’est malin de me faire des peurs pareilles…
– Allez,
monte ! Je t’enlève…
Il a
refermé la porte sur nous…
– Il
y a si longtemps que je l’attends ce moment-là…
Il
m’a renversée sur le lit… Ses lèvres… Son désir contre ma
cuisse… Son impatience… Ma culotte repoussée sur le côté… Sa
main qui me cherche… Qui me fouille… Qui m’ouvre… Sa queue en
moi… Il y a déchargé… Tout de suite…
Il y
est resté…
– Je
suis désolé…
– C’est
pas grave !
– Ah,
ben si, c’est grave, si ! Mais c’est ta faute aussi… On
n’a pas idée de donner envie comme ça… Je maîtrisais plus
rien, moi !
– J’ai
vu ça, oui… Mais c’est pas désagréable du tout, tu sais, de
faire perdre complètement la tête à un type… C’est même très
jouissif…
– N’empêche
que t’as pas eu ton plaisir, toi, du coup !
– J’en
ai eu un autre… Différent… Mais il va y avoir une session de
rattrapage, je suppose, non ?
– Ah
ben, si ! Si ! Et comment !
Et
il s’est fait très doux… Il m’a lentement déshabillée…
Lentement parcourue… Partout… De ses mains… De ses lèvres qui
sont venues m’habiter en bas… Sa langue m’a prospectée…
Feuilletée… Aspirée… S’est aventurée plus loin… En
dessous… A cerné obstinément l’entrée de mon petit trou de
derrière… A paru renoncer… Est revenue à la charge… Précise…
Insistante… J’ai frémi… Ondulé…
– Tu
aimes ?
Si
j’aimais !
– Viens !
S’il te plaît, viens !
Et
je me suis retournée… Sur le ventre…
De
ce côté-là, oui…
Avec
mille précautions… Infiniment de délicatesse…
Je
me suis réfugiée dans ses bras…
– C’était
bon, mais bon !
– J’ai
vu ça, oui…
– Qu’est-ce
t’as ? T’as l’air tout triste…
– Oui…
Non… C’est que je me dis… C’est tellement bien nous deux…
– Et
c’est ça qui te rend malheureux ?
– J’ai
tellement peur que ça dure pas…
– Se
poser ce genre de question, c’est le meilleur moyen de tout gâcher…
20 heures
– Eh,
ben dis donc ! Lui offrir ton petit derrière, comme ça,
d’entrée de jeu…
– J’étais
bien… En confiance… Ça s’est fait tout seul… Naturellement…
– Dis
plutôt que tu crevais d’envie de lui mettre tes fesses rougies
sous le nez…
– Non…
Non… Je t’assure…
– Et
alors ? Il a réagi comment ?
– Rien…
Pas un mot… Il a vu pourtant… Il a forcément vu…
14 août
– Et
alors ? Le programme de ta journée ? C’est quoi ?
– Enzo
ce matin…
– Et
l’autre cet après-midi…
– Voilà,
oui…
– Tu
devrais quand même te garder un peu de temps…
– Du
temps ? Pour quoi faire ?
– Pour
en lever un troisième…
– Te
moque pas !
– Regarde-moi !
Regarde-moi en face et dis-moi que t’y as pas pensé…
– Peut-être
un peu, si !
– Seulement
un peu ?
– Ça
te fait pas ça à toi ?
– Quoi
donc ?
– De
te dire que sûrement il y a encore mieux ailleurs ?
– Il
y aura toujours sûrement mieux ailleurs…
– C’est
justement… Bon, mais allez ! Laisse-moi me préparer… Que je
vais être en retard sinon…
– Oh,
mais vas-y ! Vas-y ! J’adore te regarder faire… Et
dis-moi… Tu vas le retrouver où Enzo ?
– Bonne
question… J’en sais strictement rien… Il doit me récupérer
sur un parking de grande surface et m’emmener quelque part… Il a
jamais voulu me dire où… À l’hôtel sûrement… Pourquoi tu
ris ?
– Parce
que… T’imagines que ce soit celui où tu étais hier après-midi
avec l’autre ? Même hôtel…Même chambre…
– Ça
n’arrive que dans les romans ce genre de truc…
– Oui…
Oh, alors ça ! Qui sait ? Bon, mais en attendant comment
je vais faire pour vous retrouver, moi ? Parce que le but de
l’opération, c’est quand même que je vous tombe dessus, non ?
– Oh,
mais pas tout de suite… Une autre fois… Laisse-le se rassurer…
Ce n’en sera que meilleur…
10 heures 30
– Il
t’en a reparlé ?
– Qui,
Enzo ? De quoi ?
– Ben,
ton mari… De l’autre jour…
– Ça !
Évidemment ! Qu’est-ce tu t’imagines ? Qu’il va
laisser passer ça comme ça ? Non… Un sacré moment je vais
en entendre parler…
– Il
te dit quoi ?
– Qu’il
est ravi que je me sois trouvé un amant et que je m’éclate avec…
Mais non, idiot ! Qu’est-ce tu veux qu’il me dise ? Ce
qu’on dit dans ces cas-là… Il me fait des tas de reproches… Et
moi, je lui jure que c’était juste un moment d’égarement… Que
je sais pas ce qui m’a pris… Que ça se reproduira pas… Jamais…
Ni avec toi ni avec qui que ce soit d’autre…
– Il
te croit ?
– Mais
bien sûr qu’il me croit ! Je sais être très convaincante
quand je veux… Bon, mais allez ! On va pas passer notre temps
à parler de lui… On a beaucoup mieux à faire…
Midi
– C’était
bien ?
– Oui,
oh, sans plus ! Il était terrorisé – ça se voyait –
à l’idée que tu pouvais surgir d’un moment à l’autre… Il
débandait dès qu’il y avait du bruit dans le couloir…
– Ça
devait être gai…
– Comme
tu dis, oui… Il a quand même fini par arriver à ses fins, mais
bon… C’était pas ça qu’était ça…
– Ma
pauvre chérie ! Tu te rattraperas tout-à-l’heure, va !
Avec ton bel inconnu…
– Il
y a des chances, oui… Surtout si…
– Si
quoi ?
– Quand
je pense que je suis allée t’épouser ! T’es vraiment
complètement tordu comme mec, hein !
– Ça,
ça veut dire que tu vas retourner cet après-midi là où tu étais
ce matin… Dans la même chambre… Dans le même lit… Mais avec
l’autre…
– Si
tu m’en avais pas donné l’idée…
– Tu
aurais fini par l’avoir toute seule… Non ? Tu crois pas ?
14 heures
– Prends
à droite…
– À
droite, mais…
– Mais
c’est moi qui choisis… Toi, hier… Moi, aujourd’hui… Chacun
son tour… Allez, vas-y ! Tourne ! Et ensuite première à
gauche…
– Vos
désirs sont des ordres, petite Madame…
– Alors ?
T’en dis quoi de mon petit hôtel ?
– À
vrai dire, je m’en fiche complètement de l’hôtel… Du moment
que toi, t’es là…
Et
il m’a poussée vers le lit…
– Non,
attends !
– Attendre ?
Attendre quoi ? J’ai trop envie… Tu me rends fou… Toute la
nuit j’ai pensé qu’à ça… J’ai pensé qu’à toi… À
nous… À comment j’étais bien en toi… J’ai même…
– Même ?
– Coulé
pour toi… J’ai pas pu m’empêcher… Tu m’excites d’une
force ! J’ai jamais eu envie de personne comme ça…
Personne… Jamais…
– Moi
aussi ! Si tu savais !
Et
on s’est rués l’un sur l’autre… Agrippés l’un à l’autre…
Noués… J’ai joui… Il a joui… On a joui… Recommencé…
On
est retombés, épuisés… Sa main s’est posée, légère, au
creux de mes reins… Y a séjourné… Longtemps… S’est
aventurée vers les fesses… Qu’elle a parcourues et reparcourues…
Du bout des doigts… Apprises… Longtemps… Et puis ses lèvres…
Et une volée de petits pincements entre ses dents…
– Aïe !
– Ça
fait mal ?
– Un
peu, oui…
– Faut
dire que vu l’état dans lequel t’as le derrière !
– Mais
c’est pas vraiment désagréable non plus…
– Ah,
oui ? Oh, ben alors !
Et
il y est retourné… En suçotements… En mordillements… De plus
en plus profonds… De plus en plus déterminés… Je me suis
crispée… Raidie… Il s’est interrompu… A relevé la tête…
– Continue !
Oh, s’il te plaît, continue !
Il
ne s’est pas fait prier… Il a continué, une main glissée entre
mes cuisses… Le plaisir m’a emportée… Ravagée…
– C’est
qui qui te donne la fessée ?
– Ça,
c’est mon secret…
– Des
secrets ? Pour moi ? Non, mais alors là ! C’est
qui ?
– Je
te le dirai pas…
– Oui,
ben alors ça, c’est ce qu’on va voir…
Et
il m’a lancé une grande claque… À plein derrière…
– Oh,
tu peux bien tant que tu veux… Tu sauras rien n’importe comment…
– Tant
que je veux ? Tu sais pas à quoi tu t’exposes…
Et
il m’a flanqué une magistrale fessée… Il y a mis tout son cœur…
– N’empêche
que j’ai rien dit…
– Mais
j’ai quand même ma petite idée…
– Ah,
oui ? C’est quoi ?
– Ah,
ça, tu sauras pas… Moi aussi, j’ai mes secrets…
19 heures
– Alors ?
Ça s’est passé comme tu voulais ?
– En
beaucoup mieux même…
– Tu
vas me raconter… En détail… Mais pas ici ! Je t’emmène…
– Tu
m’emmènes ? Où ça ?
– Devine !
– Pas
là-bas au moins ?
– Ben
si ! Même chambre… Même lit… J’ai retenu…
– Non,
mais t’es vraiment retors d’une force, toi, dans ton genre…
– Ça
te dit pas ?
– Si !
C’est ça le pire…
– Un
amant le matin… Un autre l’après-midi… Et le soir le mari…
En bouquet final…
– Oui…
Ben, il y en a une, la patronne de l’hôtel, je te dis pas la tête
qu’elle va faire… Déjà que tout-à-l’heure…
15 août
– Ben,
d’où tu sors, Gilles ?
– J’étais
descendu faire un tour… En attendant que tu te réveilles… J’ai
pas eu le temps d’aller bien loin d’ailleurs : je suis tombé
sur la patronne en sortant de l’ascenseur… On a fait un petit
brin de causette tous les deux du coup… Et j’en ai profité pour
m’excuser… Non… C’est vrai… Parce que comment t’en étais
de la comédie cette nuit… T’as braillé d’une force…
– Oh,
quand même !
– Tu
t’es pas entendue ! Oh, mais comme je lui ai dit, hein !
Une femme qui retrouve son mari après une longue absence, c’est
forcément débridé…
– T’as
pas fait ça ?
– Bien
sûr que si !
– Elle
doit avoir une de ces opinions de moi !
– On
s’en fiche… Et même… Si on en rajoutait une couche ?
– Comment
ça ?
– Dans
la foulée, tu pourrais en ramener un autre cet après-midi… Ce
serait jamais que le quatrième…
– Oui,
ben alors là ! C’est pour le coup qu’elle nous en fait une
attaque…
– Avoue
que la situation te déplairait pas vraiment…
– Peut-être…
Je sais pas…
– Tu
parles que tu sais pas… Bon… Mais, en attendant, on a un petit
compte à régler tous les deux…
– Un
petit compte ?
– Fais
bien l’innocente…
– Non…
Je vois pas… Je t’assure…
– Je
sais encore reconnaître les fessées que je donne… Et celle qui te
décore actuellement le derrière, ce n’est pas moi qui te l’ai
infligée…
– Ah,
oui… Oui… Oh, ben tu te doutes… C’est l’autre, là, hier…
– Et
tu ne m’en as rien dit…
– J’y
ai pas pensé… J’ai oublié…
– À
qui tu veux faire croire ça ?
– Non,
mais si, c’est vrai, hein, je t’assure…
– Si
c’est vrai, alors c’est très inquiétant : tu commences à
avoir de gros problèmes de mémoire… Il faut soigner ça… Le
plus vite possible… Avant que ça s’aggrave… Heureusement qu’il
existe un remède… Très efficace… Tu vois de quoi je veux
parler ? Oui ? Eh bien allez alors ! En position !
– Comment
ça me brûle !
– Ah,
ben ça ! Forcément… Une hier après-midi… Une maintenant…
Par-dessus… Sans compter les précédentes… Qui n’avaient pas
eu le temps de s’estomper vraiment… C’est obligé que tu le
sentes passer…
– Non…
Et puis t’as tapé fort… Beaucoup plus fort que d’habitude…
– Ce
que t’avais pas l’air de trouver si désagréable que ça…
– Oh,
ben non… Non… T’as bien vu… Et puis ce qu’il y avait
surtout, c’était que la raison pourquoi tu me l’as fait, je m’y
attendais vraiment pas du tout… Et ça j’adore…
On
est descendus… De derrière son comptoir, la patronne a souri à
Gilles qui s’est lancé dans de grands discours…
Qu’elles
touchaient à la fin nos vacances…
– Eh,
oui… On est sur le départ… Va falloir reprendre le collier…
Qu’il
avait pourtant pas à se plaindre…
– Non…
Parce que je fais un boulot qui me plaît… Et ça, au jour
d’aujourd’hui, ça n’a pas de prix…
Et
qu’en plus c’était l’entente parfaite tous les deux…
– Sept
ans de mariage, sept ans de bonheur… Ah, pour ça, on risquait pas
d’aller voir ailleurs… Ni l’un ni l’autre… Ah, non alors !
– T’es
trop, toi, dans ton genre ! Aller lui servir un petit couplet
sur la fidélité… Alors qu’hier dans la chambre, là-haut, je me
suis tapé deux amants coup sur coup… Non, mais tu te rends
compte ? Je savais plus où me mettre, moi !
– T’adores
ça !
– Elle
a réagi comment ? J’osais pas trop la regarder…
– Elle
a pas réagi… Impassible… Imperturbable… Rien…
– Ah,
oui ?
– Ce
qui te donne envie de la pousser dans ses derniers retranchements,
hein ?
– Oui…
Enfin, non… C’est-à-dire… Faudrait qu’on ait du temps devant
nous pour ça… Et puis pour Enzo… Pour que tu puisses nous
surprendre tous les deux… Et comme va falloir rentrer, le mieux…
– C’est
de remettre tout ça à l’année prochaine…
– Voilà,
oui…
– Et
de prendre dès à présent la route du retour… Bon, ben allez !
Action !
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