QUINZE
ANS APRÈS
1-
Philibert
a voulu savoir.
– Mais
alors, finalement, il y a combien de temps que t’en as pas donné
de fessées ?
– Ça
dépend de ce que t’entends par là… Si c’est des fessées
tape-cul, il y a pas longtemps. Un mois. À peu près. Une
désillusion. Une de plus. Je commence à avoir l’habitude. Mais
une vraie fessée investie, bouleversante, pleine de sens, il y a une
éternité.
– Quinze
ans en fait, hein !
– J’aurais
jamais dû…
– Quoi
donc ?
– Couper
les ponts, comme je l’ai fait, avec Hélène et Marie-Clémence.
Mais bon… J’étais amoureuse. On fait n’importe quoi quand on
est amoureuse. Et quand on s’en rend compte, il est trop tard.
– Je
peux te parler franchement ?
– Tu
sais bien que oui.
– Tu
les idéalises trop toutes les deux. Tu te calfeutres dans l’espoir
de retrouver très exactement ce que tu as vécu avec elles. Et, sous
prétexte qu’elles n’en sont pas la copie conforme, tu passes
sûrement, du coup, à côté de relations qui, une fois
approfondies, pourraient se révéler très gratifiantes pour toi.
– Peut-être.
Je sais pas.
– Oh,
que si ! Et j’ai bien envie de te faire faire la connaissance
de Coxan. Histoire que t’arrêtes de tourner obstinément en rond
dans ton passé.
– C’est
qui, ce Coxan ?
Un
ami à moi. Un passionné de vidéos de fessées. De fessées
administrées par des mains féminines sur des croupes féminines.
Uniquement.
– Tu
m’en diras tant !
– Seulement,
il n’y trouve pas vraiment son compte. Il est le plus souvent déçu.
Parce que les modèles simulent. La douleur, la honte ou le plaisir.
C’est selon. Et ça se voit. Comme le nez au milieu de la figure.
– Ben
oui. Forcément. Pour elles, c’est un boulot comme un autre. Ni
plus ni moins. Un boulot pour lequel elles sont payées.
– C’est
pourquoi il voudrait se constituer sa petite collection personnelle.
N’y trouveraient place que des femmes prenant vraiment du plaisir à
être fessées et à être vues, et filmées, en train de l’être.
– Et
comment il sera sûr qu’elles ne friment pas ?
– Parce
qu’il ne retiendra que celles qui accepteront de jouer le jeu sans
la moindre contrepartie financière.
– Et
qui courront gratuitement le risque de voir leur cul rougi se balader
partout sur Internet ? Il rêve ton ami, non ?
– Il
a prévu des garde-fous. Un contrat en bonne et due forme. Qui
stipulerait qu’il s’engage à ne faire, de ces vidéos, qu’un
usage strictement privé. Sous peine de devoir verser à ses
victimes, s’il ne tient pas ses engagements, de très lourdes
indemnités.
– Mouais…
Et il compte les trouver où, ces heureuses élues ?
– D’abord,
avant tout, ce qu’il voudrait, c’est se trouver une
fesseuse-recruteuse. Quelqu’un de fiable, de déterminé, en qui il
pourrait avoir la confiance la plus absolue.
– Et,
évidemment, t’as pensé à moi.
– J’ai
eu tort ?
– Pas
forcément. Ça dépend. Il consisterait en quoi, au juste, mon
rôle ?
– Tu
te doutes bien un peu, non ?
– En
gros, oui. Mais pratiquement, concrètement, il s’agirait de
procéder comment ?
– Le
mieux, si t’es d’accord sur le principe, ce serait que t’en
discutes avec lui.
– À
condition que ça ne m’engage à rien.
– C’est
bien comme ça que je l’entendais.
2-
C’était
un type d’à peu près mon âge. Jovial. Chaleureux. Au regard
clair. À l’abord franc. Qui, d’entrée de jeu, m’a fait
claquer la bise.
– Depuis
le temps que Philibert me parle de vous !
Et a
absolument tenu à nous offrir le restaurant. Gastronomique le
restaurant. Avec atmosphère feutrée et serveurs pingouins.
Il a
attaqué d’emblée, avant même que les hors d’œuvre nous aient
été servis.
– Philibert
vous a expliqué…
– En
gros. En très gros.
– Oui.
Ce que je voudrais, c’est que ce soit des femmes de tous les jours.
Des employées. Des institutrices. Des dirigeantes d’entreprise.
N’importe. Mais pas des modèles. J’en ai soupé des modèles.
Non. Des femmes au foyer. Des mères de famille. Des femmes mariées.
Des célibataires. Des divorcées. De ces femmes qui ont des
fantasmes plein la tête, qui les caressent à longueur de nuit, mais
qui n’ont jamais osé passer à l’acte. Votre rôle, à vous,
consistera à les convaincre de le faire.
– S’il
s’agit, pour moi, d’aller écumer les bars ou les boîtes de
nuit…
– C’est
hors de question. Ce n’est de toute façon pas là que les femmes
qui nous intéressent se trouvent. Ou très rarement. Non. Ce que
nous allons faire… Passer des annonces. Pas forcément, d’ailleurs,
sur des sites spécialisés. Au contraire même. J’ai ma petite
idée. Des annonces dans le registre : « Jeune femme
aimerait discuter fessée avec d’autres femmes » C’est
tout. Pas la peine, dans un premier temps, d’en dire davantage.
Discuter, c’est rassurant, ça, discuter. Uniquement discuter. Et
avec une femme, qui plus est. Elles vont se sentir en parfaite
sécurité. Et je suis convaincu que nous serons extrêmement surpris
du nombre de réponses que nous allons recevoir. À vous ensuite de
dialoguer. De prendre votre temps. De faire le tri. Et de ne
conserver que celles qui vous sembleront susceptibles d’entrer dans
le jeu et d’accepter, à terme, que vous leur claquiez le derrière.
Il vous suffira ensuite d’user de patience, de vous montrer
rassurante et persuasive, de les amener, pas à pas, là où nous
souhaitons qu’elles se rendent.
– Ça
paraît simple comme ça, mais…
– Ce
le sera. Je suis absolument convaincu que vous vous en sortirez haut
la main. Et que ce sera un moment particulièrement exaltant.
– Peut-être
le plus exaltant finalement.
– Il
y a toutes les chances en effet. Peut-être n’arriverons-nous à
nos fins qu’avec un très petit nombre d’entre elles. Une sur
cinq. Une sur dix. Mais quel bonheur ce sera, pour vous comme pour
moi, quand vous réussirez à la coucher enfin en travers de vos
genoux, pour lui infliger une éclatante première fessée.
– À
laquelle il vaudra mieux que vous n’assistiez pas.
– Non.
Bien sûr que non. Ça flanquerait tout par terre. Après, plus tard,
quand vous aurez pris votre vitesse de croisière toutes les deux,
c’est quelque chose que vous lui suggérerez, si vous sentez que
c’est une proposition susceptible d’éveiller des échos en elle.
Que je puisse enfin entrer à mon tour en scène.
– Uniquement
comme spectateur ?
– Cela
va de soi. Jamais il ne sera question de rien d’autre.
– Il
me faudra sans doute néanmoins vaincre bien des réticences.
– Vous
les vaincrez. Ça prendra le temps que ça prendra, mais vous les
vaincrez. Et, une fois que je serai dans la place, à moi alors, avec
votre aide, de faire en sorte qu’elle accepte de se laisser filmer.
– J’aurai
bien entendu droit à une copie ?
– Cela
va sans dire… Tout vous paraît clair ?
– Parfaitement.
– Et…
vous êtes partante ?
– Je
le suis.
– Si
vous avez la moindre question, le moindre doute, vous n’hésitez
pas. Vous m’appelez ou vous me laissez un mail. Ou même vous
passez. Toutes mes coordonnées sont là. Et… ah, oui… je vais
lancer les annonces dès ce soir. Ça peut aller vite. Très vite. On
ne peut pas savoir.
3-
Dès
le lendemain matin, j’avais cinq messages dans ma boîte. Dont deux
ont tout particulièrement retenu notre attention. D’abord une
certaine Andréa, vingt-cinq ans, caissière dans une grande surface,
qui disait passer le plus clair de son temps devant des vidéos de
fessées. « Une véritable drogue ! À peine rentrée du
boulot, je me précipite devant mon écran. Le week-end, je me terre
chez moi. Je ne vois personne. Je ne pense plus qu’à ça. Je ne
vis plus que pour ça. Alors en parler avec quelqu’un qui partage
la même passion ? Oui, oui et encore oui. »
Coxan
était aux anges.
– Ça
va le faire, celle-là ! Je suis sûr que ça va le faire. Te
loupe pas, hein ! Surtout te loupe pas !
– C’est
ça ! Mets-moi bien la pression !
– Mais
non, mais…
Eugénie,
quant à elle, avait quarante ans, un mari et des fantasmes plein la
tête. Des fantasmes dont elle ne s’était, jusque là, ouverte à
personne. « Ils me faisaient bien trop honte. Je me disais que
j’étais pas normale. Et puis de voir que je suis pas la seule, ça
me rassure. Au moins un peu. Alors peut-être que d’en parler, ça
me permettra de l’apprivoiser complètement. Peut-être. Je sais
pas. »
– Elles
n’en ont jamais reçu. Ni l’une ni l’autre. Je suis sûr
qu’elles n’en ont jamais reçu. Si tout se passe bien, tu vas
avoir la primeur. Génial, non ?
À
Andrea j’ai répondu que j’étais moi aussi ravie de pouvoir
« en » parler. « Parce que rester toute seule dans
son coin avec ça ! D’où mon annonce. » Je me suis
empressée de lui préciser que mon intérêt portait exclusivement
sur des fessées données par des femmes à d’autres femmes.
– Non,
parce que si ça l’intéresse pas, si elle est plutôt branchée
fessées flanquées par des mecs, inutile qu’on perde notre temps.
Oh,
elle, hommes ou femmes, ça lui était égal. Du moment que c’était
un fessier féminin qui ramassait.
– Alors,
ça va, on continue. Suffira d’influencer dans le bon sens.
Très
vite, elle a proposé qu’on procède à des échanges de vidéos.
« Puisque ça nous passionne toutes les deux. » Des
vidéos qu’on commentait. De plus en plus librement. Ce qu’elle
aimait, elle, c’était les entendre couiner. « Non, mais t’as
vu ça comment elle braille celle-là ? Ah, les voisins doivent
être à la fête. » « Et l’autre, là ! Elle a
une de ces façons de piauler. J’adore, moi. Pas toi ? »
Coxan
haussait les épaules.
– Tu
parles ! C’est du flan. Elles font semblant. Par contre, t’as
pas remarqué un truc ?
– Si !
Qu’elle m’envoie pratiquement que des vidéos de fesseuses. Pas
d’hommes fesseurs.
– Parce
qu’elle sait que c’est ce que tu préfères. Non, autre chose.
– Je
vois pas.
– Sur
toutes, absolument toutes, on a, en même temps que la fessée,
d’imprenables aperçus sur l’intimité très largement
entrebâillée des demoiselles.
– Et
tu en tires quoi comme conclusion ?
– Rien.
Pour le moment. Quoique…
Eugénie,
elle, était constamment sur la défensive. Dès qu’elle s’était
avancée un tant soit peu à découvert, elle battait aussitôt
précipitamment en retraite. Il m’a fallu plus d’un mois pour la
faire enfin parler, à force de patience, de ses fantasmes. « Il
y en a un surtout, c’est sans arrêt qu’il revient. Presque tous
les jours. Je tombe amoureuse. Il est marié. Je le sais pas. Mais
elle croit que si, sa bonne femme. Que j’ai tout manigancé pour
lui piquer. Et elle me fond dessus, comme une furie, un soir, sur un
parking, avec deux copines à elle. Cette fessée qu’elles me
flanquent ! »
– Par
contre, elle, quand elle se lâche, elle se lâche…
– Tu
crois que ?
– C’est
un souvenir qui a fini par devenir fantasme ? Peut-être. Qui
sait ?
4-
Bon,
mais commenter des vidéos de fessée, comme ça, quasiment tous les
soirs, c’était bien. C’était même très bien. Mais les
regarder ensemble, côte à côte, ç’aurait été encore mieux,
non ?
Elle
ne demandait pas mieux, Andrea. Ah, non, alors ! Au contraire.
Ça faisait même déjà un sacré moment que, de son côté, ça la
démangeait de me le proposer.
– La
seule chose, c’est que, si ça t’ennuie pas, je préfèrerais que
ça se passe chez toi. À cause des voisins. Parce que, chez moi, les
murs sont quasiment en carton-pâte.
Coxan
s’est frotté les mains, ravi.
– Ce
qui signifie, à l’évidence, qu’elle ne compte pas se contenter
de regarder sagement des vidéos en ta compagnie. Ça sent la fessée
à plein nez, ça… Maintenant, à toi de bien savoir mener ta
barque.
– Salut !
Toute
blonde toute menue, souriante, l’air mutin.
– Eh
ben, entre ! Reste pas là ! Assieds-toi ! Mets-toi à
ton aise !
– Ça
fait tout drôle… En douce que je te voyais pas du tout comme ça…
– Ah,
oui ! Et tu me voyais comment ?
– Je
sais pas… Mais pas comme ça… Plus grande. L’air plus sévère.
Plus intimidante en fait.
– T’es
déçue ?
– Oh,
non ! Non ! Pas du tout, non. Va pas croire ça…
J’ai
lancé une vidéo.
– Allez,
on perd pas de temps. On entre dans le vif du sujet.
C’était
l’histoire d’une jeune femme qui avait accepté une peine de
substitution : cinquante coups de badine en lieu et place de
trois ans de prison. La caméra s’attardait complaisamment sur les
préparatifs : lecture du jugement, déshabillage. Une femme
médecin lui faisait subir un examen médical en règle. Puis deux
assistantes prenaient tout leur temps pour l’installer sur la table
d’exécution, lui enserrer poignets et chevilles dans des bracelets
en cuir, lui attacher la taille avec une longue ceinture, les genoux
avec une autre.
Andrea
a frissonné.
– T’as
tout le temps d’appréhender quand ça dure des éternités comme
ça… Ce qui fait partie de la punition, faut croire.
– Le
pire moment… Ou le meilleur, c’est selon.
Elle
a levé les yeux sur moi, hoché la tête, souri.
L’exécutrice
s’est enfin présentée. Elle a vérifié que tout était bien en
place, les bracelets et les liens suffisamment serrés. Elle a choisi
soigneusement une badine parmi un lot d’une demi-douzaine, l’a
fait claquer en l’air, s’est lentement approchée.
Le
premier coup est tombé.
Andrea
a fermé les yeux, tressailli.
Les
autres ont aussitôt suivi, méthodiques, réguliers.
Elle
les a regardés s’inscrire, fascinée, en longues traînées
rosâtres sur les fesses impuissantes de la condamnée.
La
femme médecin a réclamé une interruption, vérifié que la
condamnée était en état de supporter son châtiment, fait signe
que oui… oui… il pouvait se poursuivre.
– T’as
aimé ?
– Oui.
– Ça
a pas l’air.
– Oh,
si, si ! Seulement…
– Seulement ?
– Je
préfère quand elles crient…
– Elle
a bien crié…
– Pas
vraiment. Pas comme j’aime. C’était trop étouffé. Pas assez
abandonné. Non, et puis aussi…
– Et
puis aussi… entravée comme elle l’était, elle pouvait pas se
contorsionner et gigoter, laisser voir tout son saoul tout ce qu’elle
a à montrer. Et ça, t’adores…
– Hein ?
Mais comment tu le sais ?
5-
Elle
m’a regardée, stupéfaite, et m’a reposé la question.
– Non,
mais comment tu le sais ?
– Sur
pratiquement toutes les vidéos que tu m’envoies, les nanas
s’exposent généreusement, pendant la fessée, dans toute leur
vérité. Il y a une chance sur mille, avoue, pour que ce soit
imputable au seul hasard.
– Je
le fais pas exprès.
– Raison
de plus !
Elle
a légèrement rougi.
– Je
peux te poser une question, Andrea ?
– Bien
sûr… Vas-y !
– T’en
as déjà reçu ?
Elle
s’est agitée sur le canapé, a croisé, décroisé, recroisé les
jambes.
– C’est-à-dire…
Oui… Enfin, non… Toute seule, mais je sais pas si ça compte pour
de bon.
– C’est
pas vraiment la même chose.
– Non,
c’est pas vraiment la même chose. Parce que, même si on se dit
qu’on va se taper fort, on le fait pas autant que si c’était
quelqu’un d’autre. Et puis on peut pas avoir honte pareil.
– Ça
te dirait ?
Elle
a soutenu mon regard.
– Hein ?
Ça te dirait ?
– Maintenant ?
– Et
pourquoi pas ?
– Oui,
mais alors, faut que je te demande… Si je te dis d’arrêter, tu
le fais pas, hein ! Ni si je te dis de taper moins fort.
D’accord ?
– Lève-toi,
Andrea !
Elle
l’a fait, ses yeux dans les miens. J’ai rassemblé ses deux
poignets dans ma main et je l’ai doucement, tout doucement, attirée
vers moi.
– T’es
venue pour ça, hein ?
– Non.
Si ! Quand même un peu.
– Un
peu beaucoup, oui. Dis-le !
– Je
suis venue pour ça.
– Pour
quoi ?
– Pour
que tu me donnes la fessée.
– Une
fessée comment ?
– Cul
nu.
– Cul
nu, oui.
J’ai
glissé mes mains sous la robe, me suis emparée des rebords de la
culotte que j’ai lentement descendue, accompagnée jusqu’en bas.
Elle en est sortie, un pied après l’autre.
– Penche-toi !
Elle
a basculé en travers de mes genoux. Je l’y ai confortablement
installée. J’ai relevé la robe. Très haut. Au-dessus des reins.
– Mais
c’est que t’as un cul de rêve ! Il y manque juste un peu de
couleur, mais ça, on va y remédier. Et sur-le-champ.
J’ai
lancé une première claque. Sèche. Appuyée.
– Aïe !
Hou, la vache !
Elle
s’est crispée dans l’attente de la seconde. Que je l’ai
interminablement fait attendre. Que j’ai brusquement abattue. Une
troisième. Une quatrième. En pluie. En grêle. En rafales. En
tornade hurlante et mugissante.
6-
Elle
s’est relevée en se frottant vigoureusement les fesses.
– Hou
là là là là là ! Comment ça me cuit !
– Tu
pleures.
– Oui,
mais ça fait rien, ça ! Tant pis. Tant mieux. Comment c’est
bon que ça cuise. J’aurais jamais cru. Enfin, si ! Je me
doutais. Mais pas à ce point-là.
– Viens !
Dans ma chambre. Viens ! Je vais te passer de la crème.
Sur
le ventre. Sur mon lit. La tête dans mon oreiller.
J’ai
étalé. Doucement massé.
– T’as
pas arrêté quand je t’ai suppliée.
– C’est
ce que tu m’avais demandé.
– J’avais
peur que tu le fasses. Comment j’ai trop aimé.
– Ça
te soulage, la crème ?
– Un
peu, oui.
– En
tout cas, qu’est-ce que t’as braillé !
– C’est
vrai ? Je me suis pas rendu compte. Ça craint, non, pour tes
voisins ?
– Alors
ça, j’en ai strictement rien à battre. Et qu’est-ce que t’as
gigoté ! Je n’ignore plus rien de ton anatomie. Qu’est-ce
qu’il y a ? Ça va pas ?
– Oh,
si, si ! Seulement si tu continues comme ça avec la crème, et
avec ta main, il va se passer quelque chose.
– Oh,
tu crois ?
Et
j’ai poursuivi. Et il s’est passé : elle s’est soulevée,
a ondulé sous mes doigts, doucement gémi son plaisir, la tête
enfouie dans l’oreiller.
– C’était
bon ?
– Un
peu que c’était bon. Tu es machiavélique.
Au
matin, on s’est réveillées l’une auprès de l’autre.
– Quelle
heure il est ? Oh, là là ! Va falloir que j’y aille. Le
devoir m’appelle.
– Oui,
mais pas avant de m’avoir fait voir l’étendue des dégâts.
Elle
s’est retournée sur le ventre.
– Alors ?
– Impressionnant !
Tu verras ça dans la glace de la salle de bains, mais
impressionnant… Ça a viré déjà. Ça a commencé.
J’y
ai passé un doigt.
– Ah,
non ! Remets pas ça ! Pas maintenant. Jamais je vais
pouvoir aller travailler, moi, sinon…
– Tu
serais pas mieux là, avec moi ?
– Si !
Bien sûr que si ! Mais j’ai pas le choix. Déjà que ma paye
est toute maigrichonne.
– File
vite alors !
– Aujourd’hui,
remarque, ça va pas être désagréable du tout de me dire que j’ai
le cul en feu et que personne se doute de rien. Les collègues qui
vont continuer à me raconter leurs petites histoires. À se prendre
la tête pour des conneries. Les clients, à la caisse, qui seront à
cent mille lieues d’aller imaginer… J’adore… On se reverra,
hein ? On recommencera…
– Évidemment !
La question se pose même pas.
– Non,
parce que… Pour une fois qu’il se passe quelque chose
d’intéressant dans ma vie…
Coxan
s’est frotté les mains.
– Tu
es géniale. Absolument géniale. On va y arriver. Je suis sûr qu’on
va y arriver. Et tout le monde va y trouver son compte. En plus !
– Tu
crois pas si bien dire…
– Parce
que ?
– Parce
que tu sais ce qu’elle m’a demandé ? Que, la prochaine
fois, on l’enregistre sa fessée. Qu’elle puisse la réécouter,
après, chez elle, tout à loisir.
7-
Avec
Eugénie, c’était une autre paire de manches.
– On
arrivera à rien, je t’assure, Coxan. Parce que pour parler, ça,
elle parle… Elle fait même que ça. Quant au reste : même
aller boire un café quelque part toutes les deux, pas question. Elle
se défile systématiquement. C’est d’un décourageant ! Et
t’as vraiment l’impression de perdre ton temps à force.
– Oui,
mais si, au final, ça débouche sur ce qu’on espère, ce n’en
sera que plus savoureux.
– Alors
ça ! J’imagine franchement pas cette nana se laissant filmer
en train de recevoir la fessée. Faudrait déjà qu’elle accepte
qu’on lui en flanque une. Et c’est loin d’être gagné.
– C’est
quoi, le problème, à ton avis ? Le mari ? Elle a peur
qu’il s’aperçoive de quelque chose ?
– Il
y a peut-être un peu de ça, oui, mais ce que je crois surtout,
c’est que c’est la fantasmeuse de base. Et qu’elle sautera
jamais le pas. Qu’elle en a jamais eu vraiment l’intention.
– Et
c’est quoi ses fantasmes ?
– SON
fantasme, tu veux dire ! Il y en a qu’un. Auquel elle revient
toujours. Obsessionnellement. Elle couche avec le mari d’une autre.
Qui découvre le pot-aux-roses et qui se venge en lui flanquant une
mémorable fessée.
– Eh,
bien, invente-toi un petit copain ! Raconte-lui que tu vas te
marier avec. Que c’est imminent. Et je te parie qu’avant quinze
jours tu l’auras rencontrée. Qu’elle fera des pieds et des mains
pour que tu le lui présentes. Ce que tu feras…
– Mais…
– Mais
c’est un rôle que je jouerai à la perfection, tu verras… Et
avant trois mois on est arrivés à nos fins.
Il
n’avait pas tort. J’ai senti s’éveiller aussitôt chez elle un
intérêt manifeste pour cet amoureux d’invention.
– Ah,
oui ! Mais tu m’en as jamais parlé de ce type.
– Ça
s’est pas trouvé.
– Il
fait quoi ?
– Ingénieur.
– Et
alors, comme ça, vous allez vous marier…
– On
en parle…
Le
poisson était ferré.
Coxan
a poussé à la roue.
– Bats
le fer tant qu’il est chaud ! Rencontre-la !
Elle
ne s’y est pas refusée. Et on a passé l’après-midi ensemble. À
parler de lui, de lui et encore de lui.
On
s’est revues le surlendemain. Et encore la semaine suivante.
– Plus
je t’entends en parler et plus je me dis qu’il est en or, ce
type.
– Je
crois en effet que j’ai beaucoup de chance.
Elle
a fini par se lancer.
– Tu
sais ce qu’on pourrait ? C’est que tu me le présentes. Ça
donne envie à force de t’entendre en parler. Et puis tu sais
quoi ? J’ai une sorte de sixième sens. Quand je vois deux
personnes ensemble, tout de suite je sais si elles sont faites l’une
pour l’autre, si c’est appelé à durer. Je te dirai…
Coxan
était aux anges.
– Et
voilà ! Je te l’avais dit. Je te l’avais pas dit ?
C’est quasiment dans la poche. Bon, mais on va quand même la faire
mariner un peu. Qu’elle ait le temps d’en rêver. Dis-lui que je
suis en mission quelque part. Pour une quinzaine de jours. Au
Cambodge. Ou au Canada. N’importe où. On s’en fout.
8-
Il y
avait Andrea. Que j’avais revue. Deux fois. À qui j’avais,
chaque fois, administré une retentissante fessée. Dont j’avais,
comme convenu, enregistré les cris et les supplications. Qui en
était absolument ravie.
– Avec
le bruit des claques par là-dessus, ça fait un effet ! Tous
les soirs, je l’écoute. Dix fois de suite. Je m’en lasse pas.
C’est un peu comme si on était ensemble. Comme si on recommençait.
– Et
tu te caresses.
– Ben
oui, ça, forcément !
J’en
avais conservé une copie.
– Ça
t’ennuie pas ?
– Oh,
non ! Non ! Bien sûr que non. Tu l’écoutes ?
– Quelquefois,
oui.
– J’aime
bien que tu le fasses. J’adore…
– D’ailleurs,
à ce propos, ça t’ennuierait que je la fasse écouter à
quelqu’un ? Sans lui dire qui tu es, évidemment.
– À
qui ?
– Un
ami. Un passionné de fessée. Depuis toujours.
– Tu
peux. Bien sûr que tu peux, mais à une condition, c’est que tu me
racontes. Ce qu’il a dit. Ce qu’il a pensé. Tout.
Il y
avait aussi Eugénie.
Qui
maintenant voulait qu’on se voie tous les jours. Qui ne me parlait
plus que de mon amoureux supposé. Qui voulait tout savoir de lui.
Absolument tout. Comment on s’était rencontrés. Comment il me
faisait l’amour. Quand il allait enfin revenir.
– C’est
long !
– Il
fait pas toujours ce qu’il veut.
Coxan
se frottait les mains.
– On
la tient. Alors faisons-la mariner encore un peu. Je vais y passer
une semaine de plus au Canada, mais alors à mon retour…
Et
puis il y a eu Camille. Qui m’a contactée sans grande conviction.
– Parce
que moi, les fessées…
– C’est
pas ton truc.
– Non.
Enfin, si ! C’est un peu compliqué.
– Eh
ben, explique !
– Ce
dont j’ai besoin, c’est d’obéir. Sans discuter. Sans
réfléchir. Quoi qu’on veuille. Quoi qu’on me demande. Aussi
difficile que ce soit. Surtout, si c’est difficile. Faut qu’on
m’impose. Faut qu’on s’impose. Alors, bien sûr, les fessées,
ça peut en faire partie. Ça doit en faire partie. Mais faut que ça
aille au-delà. Bien au-delà.
– En
somme, si je comprends bien, ce à quoi tu aspires, c’est être
sous la coupe de quelqu’un, sous son emprise, vingt-quatre heures
sur vingt-quatre.
– C’est
exactement ça.
– Oui,
ben c’est à pas toi de décider.
Il y
a eu un long blanc au téléphone. Et puis :
– Oui,
vous avez raison. Entièrement raison.
– Tu
es où ? Tu habites où ?
– À
Angoulême.
– Alors
tu te débrouilles comme tu veux, mais demain, à quinze heures, tu
seras devant la fontaine Saint-Michel à Paris.
– J’y
serai.
– Et
tu vas en faire quoi, sans indiscrétion ?
– Je
sais pas. J’aviserai sur place. Quand je l’aurai vue. Mais
tiens-toi prêt, toi aussi. Parce qu’en voilà une avec qui, à mon
avis, on va pouvoir brûler les étapes.
9-
Je
l’ai d’abord observée de loin. Une petite brune à l’air
effacé. Qui faisait les cent pas devant la fontaine en regardant
fébrilement sa montre.
Je
l’ai fait attendre. Une bonne demi-heure. Et puis je me suis
approchée.
– C’est
toi, Camille ?
C’était
elle, oui.
– Alors,
viens !
Elle
m’a docilement suivie.
Je
l’ai entraînée jusqu’à Notre-Dame. Dont on a fait le tour.
Sans échanger le moindre mot. Je l’ai ramenée au point de départ.
Et j’ai recommencé. Quatre fois. Fontaine Saint-Michel ;
Notre-Dame. Notre-Dame ; Fontaine Saint-Michel. Toujours sans
lui adresser la parole. J’ai fini par m’asseoir à une terrasse
de café. Elle a hésité, tiré une chaise.
– Qu’est-ce
tu fais ?
– Ben…
– Quelqu’un
t’a dit de t’asseoir ?
– Non.
Elle
a précitamment remis la chaise en place.
– Tu
seras punie pour ça.
Quelque
chose de profondément intense a traversé son regard. Elle a baissé
la tête.
– Eh
ben, assieds-toi ! Tu vas pas rester plantée là…
Elle
l’a fait. Du bout des fesses.
– T’as
quel âge ?
– Dix-neuf
ans.
– Et
tu fais quoi ?
– Vendeuse.
– Dans
quoi ?
– Les
vêtements.
– C’est
tout le temps qu’il faut t’arracher les mots de la bouche comme
ça ?
– Vous
m’intimidez.
– Elle
est sévère avec toi, ta patronne ?
– Plutôt,
oui. Elle laisse rien passer. À personne.
– Elle
te donne des fessées ?
– Oh,
non ! Non !
– Mais
t’en crèves d’envie.
Elle
a marqué un long temps d’arrêt.
– J’y
pense des fois. Je pense que je vis chez elle. Et que je fais tout ce
qu’elle veut. Absolument tout. Et quand elle est pas satisfaite de
moi, elle me punit. Ou même, parfois, elle me punit comme ça, pour
rien. Juste parce qu’elle a envie. Mais ça n’arrivera pas en
vrai.
– Pas
avec elle, mais qui sait ?
Elle
a soutenu mon regard.
Je
me suis levée. Elle aussi. On s’est remis en marche.
– Tiens,
tu le vois, le vieux monsieur, là, qu’arrive en face ? Eh
bien tu vas lui dire…
– Lui
dire quoi ?
– Que
je t’emmène prendre une fessée.
Elle
l’a fait. Elle l’a dit. À haute et intelligible voix.
– Monsieur !
Monsieur ! Je vais avoir une fessée. Elle va me la donner.
Il a
hoché la tête, souri.
– Grand
bien te fasse, ma chérie…
Et
puis la femme à l’air revêche. Qui a haussé furieusement les
épaules.
– Petite
dinde, va !
Je
l’ai ramenée à la fontaine.
– Là !
Et maintenant, tu rentres à Angoulême. Mais on se revoit le
week-end prochain. Quelle chance tu as ! Tu vas pouvoir rêver
là-dessus toute la semaine.
10-
Andrea
a voulu savoir. Aussitôt. À peine la porte franchie.
– Tu
m’as pas dit. Tu lui as fait écouter à ton ami ?
– C’est
tout récent. De cet après-midi ça date.
– Et
alors ? Ça lui a plu ?
– Tu
parles si ça lui a plu ! Six fois il a fallu que je lui fasse
réécouter. « Qu’est-ce qu’elle chante bien ! »
il arrêtait pas de répéter. « Non, mais qu’est-ce qu’elle
chante bien ! Ah, tu devais y aller de bon cœur ! »
– Ah,
pour ça ! Près d’une semaine il m’a brûlé, le joufflu.
– Plains-toi !
– Oh,
non ! Non, je me plains pas. Au contraire. Il a rien dit
d’autre ?
– Il
m’a demandé s’il pourrait pas en avoir une copie. Histoire de
t’entendre pousser la chansonnette tout à loisir.
– Oh,
si il veut.
– Et
il m’a posé des tas de questions sur toi. Ce que tu faisais comme
boulot. Comment t’étais physiquement. Si t’en avais déjà reçu
avant des fessées. D’où ça t’était venu, cette envie. Et
quand je t’en donnais, c’était couchée sur mes genoux ? Ou
bien debout, appuyée contre ma cuisse ? Autrement ?
Toujours à la main ? Ou bien aussi au martinet ? Ou au
paddle ? Ou à la badine ? Et comment tu réagissais ?
Tu gigotais ? Tu battais des jambes ? Mais alors je te
raconte pas quand je lui ai dit que tu montrais tout. Et plus que
tout. Généreusement. Il m’a suppliée. Il pourrait pas voir ?
Assister ? Au moins une fois. Juste une fois.
– Et
t’as répondu quoi ?
– Que
c’était pas à moi de décider. Mais que ça m’étonnerait que
t’acceptes.
– Mais
c’est qui, ce type, finalement ?
– Je
t’ai dit. Un ami à moi.
– Vieux ?
– À
peu près mon âge.
– Tu
le connais d’où ?
– C’est
l’ex d’une copine. Qui lui en a fait voir de toutes les couleurs.
Quand elle l’a eu plaqué, on est restés en contact. Et puis
voilà.
– Ça
se passerait comment ?
– Comme
tu voudrais… Il peut rester caché si tu préfères.
– Oh,
non, non…
– Ou
bien rester derrière toi et faire tout un tas de réflexions sur ce
qu’il voit et ce qu’il entend.
– C’est
pas que ça me déplairait, mais ça craint quand même…
– Une
autre solution encore, ce serait qu’il se mette devant toi. Que tu
puisses croiser son regard…
– Oh,
la honte !
– T’aimerais
pas ?
– Si !
Peut-être. Je sais pas. Ça dépend.
– De
quoi ?
– De
lui. De comment il est. De comment je le sens.
– Suffirait
que tu le rencontres avant…
– Je
voudrais pas me sentir obligée…
– Avec
lui, il y a pas de risque ! C’est vraiment pas le genre de
type à te forcer la main. Bon, alors, qu’est-ce que je fais ?
Je nous organise une petite bouffe ?
– Si
tu veux, oui. Mais pas chez toi. Au resto. Que je me sente pas
coincée si le courant passe vraiment pas…
Coxan
était ravi.
– T’es
un amour. Un véritable amour. Ce sera quand ?
– Très
bientôt. Et j’ai une idée en plus !
– Ah,
oui ? Quoi ?
– Surprise !
Mais tu seras pas déçu, tu verras…
11-
Eugénie
a jeté son sac sur la banquette, s’est laissée tomber à côté.
– Alors ?
Ton amoureux ? Toujours pas revenu ?
– Il
rentre ce soir.
– Ah,
oui ? Sûr ?
– Sûr…
Elle
a fait la grimace.
– Tant
mieux pour toi… Mais on va moins se voir, du coup, toutes les deux.
– Il
y a pas de raison.
– Oh,
ben si, il y en a une, si ! Les mecs, ça veut qu’on reste
avec. Pas qu’on passe le plus clair de son temps avec les copines.
– Lui,
il est pas comme ça. Pas du tout.
– Oui,
oh, alors ça, je demande à voir.
– Tu
dis ça parce que tu le connais pas. Quand tu le connaîtras…
– Tu
me le présenteras ?
– Sans
problème. Quand tu veux. Demain, si tu veux.
Elle
s’était mise sur son trente-et-un. Petite robe légère
affriolante à mi-cuisses. Qui laissait voir les bretelles dentelées
du soutien-gorge et découvrait la naissance des seins. Et elle
sortait, à l’évidence, de chez le coiffeur. Son maquillage était
tout particulièrement soigné. Le grand jeu, quoi !
J’ai
réprimé un sourire. Et j’ai fait les présentations.
– Eugénie…
Coxan…
– Enchanté…
– J’ai
beaucoup entendu parler de vous.
Elle
lui a tendu la main.
– On
se fait la bise plutôt, non ?
– Volontiers.
Elle
a tout aussitôt pris la direction des opérations. Et de la
conversation.
– Alors ?
Comment c’est, le Canada ?
Elle
l’a religieusement écouté, le coude appuyé sur la table, le
menton dans la main, ses yeux plantés dans les siens.
– C’est
passionnant ! Et ça consiste en quoi, au juste, votre boulot ?
Il
s’est lancé dans de longues explications.
Qu’elle
a trouvées tout aussi exaltantes.
Je
me suis brusquement levée.
– Wouah !
Et mon rendez-vous chez le dentiste. Je l’avais complètement
oublié, celui-là.
Je
me suis penché sur Coxan, lui ai effleuré les lèvres.
– À
tout-à-l’heure, amour…
– Bon,
ben je viens au rapport… Alors ?
– Elle
m’a carrément dragué, oui… En y mettant quand même un peu les
formes. Mais c’était vraiment du rentre-dedans.
– Ce
qui t’a pas vraiment déplu, avoue !
– Je
crois pas que ce soit le genre de choses qui déplaise à grand
monde, si ?
– Et
donc, tu vas coucher avec ?
– Passage
obligé, dans son cas, vers la fessée.
– Et
mon rôle à moi, là-dedans, c’est cocue de service ?
– Ça
te dérange ?
– Pourquoi
veux-tu que ça me dérange ? On n’est pas ensemble, toi et
moi. Et donc, la suite du programme, c’est ?
– Je
la mets dans mon lit, tu nous surprends et tu lui en colles une…
– Dont
je peux te dire qu’elle va se souvenir…
12-
Camille
était là, devant la fontaine.
– J’ai
pris le train d’avant. Pour être sûre d’être à l’heure.
– Tu
sais quoi ? Ben, j’en ai rien à foutre. Du moment que j’ai
pas à t’attendre…
Elle
s’est tue. A trottiné silencieusement à mes côtés.
– C’est
quoi le programme aujourd’hui ? À ton avis ?
– Je
sais pas.
– Mais
si, tu sais ! Tu sais même très bien. C’est quoi ?
– Une
fessée.
– Bien
sûr, une fessée. Une bonne fessée cul nu, bien claquante, que je
vais te flanquer devant un ami à moi.
– Ah,
mais…
– Ça
te pose un problème ?
Elle
s’est aussitôt reprise.
– Oh,
non, non ! Pas du tout, non.
– J’aime
mieux ça… C’est quelqu’un de très sympathique, tu verras. Et
un fin connaisseur. Il va beaucoup apprécier.
– Déshabille-toi !
Ben, oui, qu’il te trouve à poil en arrivant. On gagnera du temps.
Elle
n’a pas protesté. Elle l’a fait.
– Mais
c’est que t’es pas mal foutue du tout !
J’ai
avancé la main. Effleuré un sein. Je me suis emparée du téton.
Qui a aussitôt gonflé sous mes doigts.
– Et
tu es très réactive. En plus !
On a
frappé.
– Ah,
c’est lui ! Eh, ben, entre !
Je
lui ai laissé tout le temps de se régaler les yeux. Et puis…
Bon,
allez ! Action… On lui fait à quoi ? Qu’est-ce tu
préfères ? Martinet ? Ceinture ? Paddle ?
– Oh,
à la main ! Pour la première fois, à la main, c’est mieux !
Je
me suis assise. Je lui ai fait signe. Elle est venue docilement
s’allonger en travers de mes genoux.
Une
main qui traîne un peu au hasard de la fesse. Qui se l’approprie.
La pinçote. La fait se crisper. Et qui s’abat d’un coup, sans
crier gare.
Je
l’ai aidée à se relever.
– Attends !
Fais voir ! Oui. Oui. Je suis pas mécontente. J’ai bien
travaillé. Toute la surface est prise. Et le rouge que j’ai obtenu
est absolument délicieux. Qu’est-ce t’en penses, toi, Coxan ?
– C’est
très réussi, oui. Et puis la jeune fille a si joliment donné de la
voix pendant le déroulement des opérations. C’était très
émouvant.
– Bon,
mais allez ! Tu te rhabilles, toi ! Et vous venez. Il y a
une surprise. Pour tous les deux.
– Allez-y !
Entrez !
– Mais
c’est…
– Un
magasin de fringues, oui. Tu seras pas dépaysée comme ça.
Une
femme d’une soixantaine d’années s’est avancée à notre
rencontre.
– Madame
Gorsalier ?
– Elle-même…
– Voici
la jeune fille dont je vous ai parlé au téléphone.
– Ah !
Très bien. Venez dans mon bureau. On sera plus tranquilles.
Elle
en a soigneusement refermé la porte.
– C’est
donc elle !
– Oui.
Elle a de l’expérience dans le secteur du vêtement. À Angoulême.
Mais, surtout, elle est extrêmement docile. Montre à la dame,
Camille ! Allez ! Baisse ta culotte ! Et tourne-toi !
– Madame
Gorsalier lui a posé sur les fesses un long regard gourmand.
– Et…
elle est disponible ?
– Elle
le sera très vite. Lundi matin, elle donne son préavis.
13-
Coxan
était estomaqué.
– Comment
tu m’as bluffé, là, avec cette madame Gorsalier. Tu l’as sortie
d’où ?
– D’Internet.
J’ai fouillé, j’ai fouiné. Et puis voilà…
– T’obtiens
tout ce que tu veux, toi, en fait. Et tu manques vraiment pas
d’imagination.
– Disons
que je me défends.
– Faudra
pas en oublier pour autant notre idée de départ.
– Non.
Bien sûr que non. Ça viendra. À son heure. Tu l’auras ton film.
Laisse-moi faire. Pour le moment, c’est d’Andrea qu’il s’agit
de s’occuper.
Andrea
qui avait d’abord voulu voir, avant de le rencontrer en ma
compagnie, des photos de Coxan.
– Il
fait rassurant. Et puis, ce qui ne gâte rien, il est beau mec. En
plus !
Qui
avait aussi voulu l’approcher, incognito, de plus près. Qui
s’était rendue pour ce faire, sous un prétexte bidon, à la
banque où il travaille.
– Ça
me faisait drôle, mais drôle, tu peux pas savoir, de me dire que ce
type, il m’avait entendue me prendre une fessée et qu’il savait
pas que c’était moi !
– Bon !
Et alors ? Conclusion de ta petite enquête ?
– A
priori je suis pas contre qu’il assiste…
– T’es
pas contre ou t’en as envie ?
– J’en
ai plutôt envie.
Et
on s’est retrouvés, tous les trois, dans ce même restaurant
gastronomique où on avait fait connaissance, lui et moi.
Il
l’a tout de suite reconnue. Et menacée du doigt.
– Alors,
comme ça, on est venue m’espionner ?
Elle
a rougi, s’est troublée.
– Mais
non, mais…
– Mais
si ! Ça faisait vraiment téléphoné cette histoire de bons de
caisse de votre grand-père. Bon, mais l’essentiel, c’est que
j’aie passé l’examen avec succès. Ce qui semble être le cas.
Elle
n’a pas répondu. On s’est assis.
– Bon.
On va pas tourner dix mille ans autour du pot.
Et
je leur ai tendu, à l’un comme à l’autre, une paire
d’écouteurs.
– Mettez
ça !
Et
j’ai lancé l’enregistrement de la fessée d’Andrea.
Leurs
regards se sont d’abord évités, puis furtivement croisés. De
plus en plus souvent rencontrés. Finalement gardés.
Ça
s’est achevé. J’ai relancé. Depuis le début. Leurs yeux ne se
sont pas quittés. Jusqu’à la fin.
Ils
ont retiré les écouteurs. Comme à regret.
Coxan
a paru revenir de très loin.
– Je
ne m’en lasse pas. C’est toujours aussi émouvant de t’écouter
piauler. Avec le bruit des claques en arrière-fond. Et t’écouter
en t’ayant là, en face de moi, en train de faire la même chose,
c’est un véritable bonheur.
J’ai
cru bon d’intervenir.
– Qu’est-ce
que ce sera quand tu verras alors !
– D’autant
que, d’après ce que tu m’as dit…
J’ai
posé un doigt sur mes lèvres.
– Chuuut !
– Et
il viendra quand, ce moment béni ?
– Quand
Andrea voudra. C’est elle qui décide…
Elle
nous a regardés, l’un après l’autre.
– Maintenant.
Tout-à-l’heure. Quand on aura fini de manger.
14-
J’ai
fait durer le repas. Aussi longtemps que possible. J’ai encore
voulu qu’on aille boire un verre, quelque part, avant de rentrer.
Je pouvais sentir physiquement leur attente. D’une impatience
extrême chez Coxan. Mêlée d’une pointe d’appréhension chez
Andrea.
Par
contre, aussitôt la porte refermée sur nous…
– Viens
voir là, Andrea !
Elle
s’est docilement approchée.
– Tu
n’as pas honte ?
Elle
a baissé la tête. Elle n’a pas répondu.
– Hein ?
Tu n’as pas honte ? Accepter de te faire fesser, comme ça.
devant quelqu’un que tu connais à peine. Ta conduite est
inqualifiable. Tu en as bien conscience, j’espère ?
– Oui.
Un
tout petit oui.
– Tu
vas être punie pour ça… Déshabille-toi !
Elle
a levé les yeux sur Coxan. Les a aussitôt détournés.
– Devant
lui, oui. Ça fait partie de la punition. Allez !
Et
elle l’a fait. Le pull, passé par-dessus la tête. Le pantalon
dont elle est sortie, une jambe après l’autre. Elle s’est
arrêtée.
– Tout !
T’enlèves tout.
Le
soutien-gorge qu’elle a jeté sur le fauteuil, derrière elle. Le
string. Qui a suivi le même chemin. Et elle restée là, à
attendre, tandis que Coxan lui dévorait les fesses des yeux.
– Tu
sais que c’est pas poli du tout ce que tu fais ? On ne tourne
pas le dos aux gens comme ça. C’est d’une incorrection ! Eh
bien ? Tu entends ce que je te dis ?
Elle
s’est lentement retournée. A esquissé un geste pour se dissimuler
les seins avec ses bras, l’encoche avec ses mains. A finalement
renoncé.
Je
les ai laissés, face à face, profiter longuement l’un de l’autre.
– Bon,
mais allez ! Action !
Elle
est venue se coucher docilement en travers de mes genoux. A paru
vouloir dire quelque chose.
– Oui,
Andrea ? Qu’est-ce qu’il y a ?
– On
enregistre pas ?
J’ai
eu un petit rire.
– T’en
crèves d’envie, hein ? Ben, tu sais pas ? On va faire
encore mieux. Coxan va filmer.
Elle
a eu comme un frémissement de plaisir.
– Ah,
ça te plaît, ça, hein, comme idée ! Eh ben, Il y a plus qu’à
assurer le spectacle.
Ce
que je me suis employée à faire. À grandes claques bondissantes
qui s’imprimaient sur son derrière. Qui, très vite, lui ont
arraché de plaintifs gémissements.
– Comédienne,
va !
Et
j’ai tapé plus fort. Plus vite. De plus en plus fort. De plus en
plus vite.
Elle
a crié. À pleins poumons. A battu des jambes. Trépigné. S’est
soulevée du derrière. Haut. Très haut.
– Ça
va, Coxan ? Tu te régales ?
Il
s’est contenté de me gratifier d’un large sourire.
J’ai
poursuivi, à plein régime, durant encore trois ou quatre minutes
pendant lesquelles elle a rugi. S’est agitée comme une perdue.
Trémoussée tant et plus.
– Là !
Et tiens-le-toi pour dit !
Elle
s’est relevée en se frottant les fesses.
– Hou
là là là !
A
fait trois fois le tour de la pièce en sautillant.
– Mais
hou là là là !
A
fini par s’emparer, au passage, de son string qu’elle a entrepris
d’enfiler.
– Qu’est-ce
tu fais ? Non, non. Reste comme ça. T’es très bien comme ça.
Viens regarder le film plutôt…
Elle
s’est précipitée.
15-
Madame
Gorsalier n’était pas mécontente de Camille.
– C’est
vrai qu’elle est docile. Extrêmement docile. On peut pas dire le
contraire.
Mais
elle n’en était pas vraiment satisfaite non plus.
– Non,
parce que, sur le plan professionnel, on peut pas dire que ce soit ça
qu’est ça. Elle ne sent pas les clientes. Pas du tout. C’est
pourtant le b-a ba du métier. Et puis alors elle te vous a une de
ces visions de la mode ! Quatre ou cinq ans de retard. Au moins.
Mais bon, elle n’est là que depuis trois jours. Je peux pas lui
demander l’impossible non plus.
Sur
le trottoir, on a marché toutes les deux en silence.
– Eh
bien, raconte ! Ça se passe comment ?
– Faudrait
que vous me posiez-moi des questions. Je sais pas dire, sinon.
– Elle
est très sévère avec toi, Madame Gorsalier ?
– Encore
assez. Et puis elle me parle toujours dur.
– C’est
pour ton bien. C’est ce qu’il te faut.
– Je
sais, oui.
– Tu
t’es pris des fessées ?
– Une.
– Devant
du monde ?
– Mes
deux collègues. Perrine et Aglaé.
– Qui
ont réagi comment ?
– Elles
ont pas arrêté de rire, et, après, de se moquer. Tout le temps
maintenant elles m’en parlent. « Range les fringues,
Camille ! Sinon tu vas encore avoir panpan cucul. »
– Tu
t’entends bien avec elles ?
– Ça
va. Elles aussi, elles me commandent. Et elles me parlent sévère.
– Tu
dois être ravie. C’est bien ce que tu voulais, non ? Obéir,
obéir et encore obéir. Te voilà comblée.
– Oui.
– Ça
a pas vraiment l’air. Tu dis ça sur un ton !
– Non.
Si ! Mais ce que j’aimerais, c’est que ce soit plus. C’est
que ce soit tout le temps. Nuit et jour.
– Ça
viendra. T’habites où ?
– Un
foyer de jeunes travailleurs, par là. Pour le moment, j’ai trouvé
que ça.
– Il
y a des horaires, là-dedans, non ?
– Si…
– Alors
va vite…
Coxan
était un peu déçu que je l’aie pas ramenée.
– Tu
deviens bien gourmand…
– Mais
non, mais…
– Psychote
pas ! Tu l’auras ton film. On en fait ce qu’on veut de cette
fille. Il y a que comme ça qu’elle prend son pied. En se mettant
totalement à disposition.
– Ça,
j’avais compris, merci.
– C’est
d’ailleurs pour ça que j’ai pas voulu la ramener Parce que je me
méfie.
– Tu
te méfies ! Et de quoi donc, grands dieux ?
– De
moi. Parce que je me connais. C’est trop tentant une nana comme ça.
Je l’aurais laissée passer la nuit ici. Et puis celle d’après.
J’aurais joué tant et plus avec. Ce serait rentré comme dans du
beurre. Ça m’aurait amusée. Je l’aurais laissée quitter son
foyer, s’installer ici. Et quinze jours après, j’en aurais eu
assez. Trop facile. Trop prévisible. Terriblement ennuyeux
finalement… Je sais comment ça se passe, j’ai déjà donné. Et
j’en aurais été encombrée. Alors non. Non. Que quelqu’un
d’autre la prenne sous sa coupe. Madame Gorsalier, par exemple.
Qu’elle l’héberge. Ou l’une des deux vendeuses. D’ailleurs
je vais pousser à la roue dans ce sens.
– Et
sa fessée, du coup, on la filmera devant sa propriétaire…
– Voilà !
T’as tout compris.
16-
Andrea
avait l’air un peu déçue.
– T’es
toute seule ? Il est pas avec toi, Coxan.
– Ben,
non, il est au boulot. Pourquoi ?
– Oh,
comme ça. Pour rien.
– On
le verra ce soir.
– Tu
sais ce que je me demande ? C’est si la vidéo qu’on a
faite, l’autre jour, il se la regarde.
– Ah,
ben ça, forcément. Mets-toi à sa place !
– Il
t’en a parlé ?
– Un
peu.
– Il
en dit quoi ?
– Que
c’est un spectacle très émouvant. Dont on ne se lasse pas.
– Il
aime quand je crie ?
– Il
adore. Mais ce qu’il apprécie surtout, c’est ce que tu montres.
Et comment tu le montres. Faut reconnaître que, de ce côté-là, tu
as fait fort. Vraiment très très fort.
– Je
sais, oui.
– Parce
que tu la regardes, toi aussi, hein ?
– Quelquefois.
– Quelquefois
ou souvent ?
– J’essaie
de deviner ce qu’il pense, ce qu’il sent, ce qu’il se dit en me
voyant.
– Ce
que beaucoup d’hommes penseraient, sentiraient ou se diraient à sa
place.
– Et
justement. Des fois, j’imagine qu’il y en a d’autres qui
regardent avec lui. Que ça les excite. Qu’ils font des tas de
commentaires. Ça se pourrait, hein !
– Quoi
donc ? Qu’il la montre ? Ah, non, non ! Il s’est
engagé à ne pas le faire. Et, le connaissant, je suis absolument
certaine qu’il tient sa promesse.
– Oui,
mais bon… Ce serait pas un drame non plus. On voit pas ma tête.
Juste mes cheveux. Qu’est-ce tu veux reconnaître quelqu’un à
ses cheveux ?
– Oh,
toi, je te vois venir. Ça te tente bien, hein ?
– Ben…
On
est arrivées les premières. On s’est installées dans
l’arrière-salle du café. Tout au fond. Il n’y avait presque
personne. Juste un jeune type, pas très près, plongé dans ses
cours, et puis, encore plus loin, deux filles lancées dans une
conversation animée à voix basse. On s’est commandé un café et
on a attendu. Un petit quart d’heure.
Il
nous a superbement ignorées et il est allé s’asseoir en compagnie
d’un petit brun frisé à l’air sympathique à la table juste en
face de la nôtre. Ils ont parlé de choses et d’autres. Du match
du PSG. Des travaux de la voie sur berge. Des frelons asiatiques.
Et
puis le brun s’est impatienté.
– Bon,
mais c’est pas tout ça. Tu montres ?
La
main d’Andrea s’est crispée sur mon genou.
Coxan
a sorti son smartphone, tendu des écouteurs au type, lancé la
vidéo. Ils sont restés un long moment silencieux, les yeux rivés à
l’écran. Et puis le type a constaté…
– Oh,
la vache ! Qu’est-ce qu’elle se prend, la fille !
– Je
te l’avais dit…
– Une
sacrée dérouillée ! C’était quoi la raison ?
– Je
sais pas. Elles ont jamais voulu me dire. Un truc entre elles.
Peut-être une histoire de mec. C’est souvent ça avec les nanas.
– Comment
elle braille ! Et puis alors… Oh, putain ! T’as de ces
aperçus.
– Et
t’as encore rien vu.
– Oh,
putain ! Oh, putain ! Oh, putain !
Andrea
m’a enfoncé ses ongles dans la cuisse.
17-
– S’il
avait su qu’il l’avait là, juste en face de lui, la fille !
– T’en
serais morte de honte.
– Ah,
ça, c’est sûr !
– Ce
qui t’aurait pas déplu tant que ça, avoue !
– Je
sais pas. Je me rends pas compte.
– La
seule façon de savoir…
– Oh,
non ! Non ! Ou alors, après, plus tard, pas tout de suite.
– Quand ?
– C’était
qui, ce type, en fait ?
– Ça,
faudra que tu demandes à Coxan.
Qui
n’en savait pas plus que nous.
– Ben
non ! Non ! Je l’ai trouvé sur Internet. Alors aucune
idée de comment il s’appelle, d’où il habite et de ce qu’il
fait dans la vie. Et pareil dans l’autre sens.
– Si
bien que t’as plus de contact avec…
– Si !
Par mail. Il a été absolument ravi de notre après-midi. Et il me
réclame la vidéo à cors et à cris.
– Envoie-lui !
– T’es
sûre, Andrea ?
– Oui.
Envoie-lui ! Qu’est-ce ça risque ? Il sait pas qui je
suis. Il le saura jamais. Et on me voit que de dos dessus. Alors,
oui, envoie-lui !
– Comme
tu voudras.
– Il
doit quand même avoir une drôle opinion de moi, Coxan.
– C’est
quelqu’un qui a l’esprit très ouvert.
– Oui,
mais quand même ! Je me dis que je fais fort des fois.
– C’est
dans ta tête.
– Tu
crois que je pourrais lui demander un truc ?
– Quoi
donc ?
– Qu’il
me donne accès à sa boîte mail. Que je voie ce qu’il dit de moi,
le type.
– Ça
m’étonnerait que ça lui pose problème.
– C’est
drôle des mecs qui discutent d’une nana entre eux, n’empêche…
On se rend pas vraiment compte en fait.
– De
quoi donc ?
– De
ce qu’ils parlent vachement cru.
– Et
pas nous, peut-être, quand on parle d’eux ?
– Oui,
si, c’est vrai. Mais là, ce qu’il y a, c’est que je le vois
écrit.
– Et
ça te gêne ?
– Oh,
non, non ! J’ai pas dit ça. Non. Et tu sais qu’à cause de
moi, il voit quasiment plus sa copine ?
– Comment
ça ?
– Ben,
elle lui fait tellement d’effet, ma vidéo, qu’il préfère
rester avec moi et avec ma fessée plutôt que d’aller la
retrouver.
– Carrément !
– Et,
en plus, quand il va la voir, il s’est tellement donné avec moi
qu’il est plus en état de faire quoi que ce soit avec elle.
– Eh,
ben dis donc !
– Alors
tu sais ce que j’aimerais du coup ? C’est qu’on recommence
avec un autre. Mais pas exactement pareil. Coxan lui montrerait la
vidéo. Et puis il lui proposerait : « Tu veux voir la
tête qu’elle a, la fille ? Mais alors tu déconnes pas,
hein ! Parce qu’elle m’arracherait les yeux si elle savait
que je t’ai fait voir. » Et il nous ferait rencontrer sous un
prétexte bidon. Trop génial comme situation, non ? Il croit
que je suis pas au courant, le mec. Alors que c’est moi qu’ai
tout manigancé.
– T’es
redoutable dans ton genre.
– Et
après, t’imagines les mails ? Oh, faut qu’on le fasse. Faut
vraiment qu’on le fasse.
18-
Coxan
avait passé la soirée avec Eugénie.
– Et ?
– Et
c’était pas du tout ce à quoi je m’attendais, eu égard à sa
prestation de la dernière fois. Elle a carrément rétropédalé.
Pour la décider à accepter un rendez-vous, ça a carrément été
la croix et la bannière. Elle avait tout un tas de scrupules par
rapport à toi, la pauvre chérie !
– Tu
m’en diras tant !
– Il
a fallu que j’insiste encore et encore. Parce que c’était en
tout bien tout honneur qu’on allait se rencontrer, oui, bien sûr,
mais quand même ! Tu risquais de mal le prendre si tu
l’apprenais. J’avais beau me mettre en quatre pour la rassurer…
Mais tu le saurais pas ! Tu saurais rien. Comment tu pourrais le
savoir ? Elle n’était, malgré tout, pas vraiment convaincue.
Je croyais ? Mais évidemment ! Évidemment !
– Elle
a dû prendre un pied possible à se faire supplier comme ça !
– C’est
clair…
– Et
alors ?
– Et
alors elle a fini par rendre les armes. Et par accepter, bon gré mal
gré, de dîner avec moi.
– Quelle
comédienne !
– Ah,
ça, tu l’as dit !
– Et,
c’est là, une fois sur place, qu’elle t’a sorti le grand jeu.
– Oh,
non, non ! Elle est beaucoup plus subtile que ça. Elle m’a
fait ça en mode drague larvée. Maquillage feutré. Tenue sexy sage.
Sourire discrètement enjôleur. Et elle a parlé de toi. Dans des
termes, mais des termes… Que tu es une fille d’exception. Une
amie sur qui elle peut vraiment compter. Que j’ai tout intérêt à
te garder parce que des comme toi, j’en trouverai pas deux. Et
tralali et tralala…
– Le
truc classique, quoi ! Tu rassures le mec sur tes intentions.
Comme ça, après, tu peux avancer tes billes. Il se méfie plus.
– C’était
à peu près ça, oui. Parce qu’au dessert, elle est entrée en
confidences. Elle était pas toute rose sa vie. Vivre toute seule,
c’était pas drôle tous les jours. Ah non, alors ! Personne à
qui parler. Jamais. À part les murs. Au boulot ? Oui, ben alors
là ! Au boulot, à part les mecs et les fringues, elles avaient
aucun sujet de conversation, les filles. C’était pourtant pas
compliqué ce qu’elle demandait. Juste quelqu’un avec qui parler
une heure ou deux, comme ça, de temps en temps.
– Et,
bien sûr, tu t’es proposé.
– Tu
es très perspicace.
– Ce
qu’elle a accepté avec enthousiasme.
– Pas
avec enthousiasme, non. Du bout des lèvres au contraire. Elle
voulait pas me déranger. Que je me croie obligé. Ça faisait des
mois que ça durait. Alors un peu plus, un peu moins…
– Et,
au final, vous avez décidé de vous revoir.
– Samedi
prochain.
– Tant
et si bien que, samedi prochain, tu la passes à la casserole.
– Peut-être.
Et puis peut-être pas. Tout va dépendre…
– Tu
crois qu’elle va encore… Oui, t’as sûrement raison. Parce que,
d’un côté, elle crève d’envie de me faire cocue, mais, de
l’autre, ça la démange de faire durer tant et plus. Mais on peut
bien tourner les choses dans tous les sens qu’on veut, on sait
bien, de toute façon, comment, à l’arrivée, ça va finir. Et ce
sera pain bénit pour toi tout ça. Parce que tu vas jouer sur les
deux tableaux. Tu vas la mettre dans ton lit. Et, dans la foulée, tu
vas profiter de la fessée que je lui flanquerai pour avoir jeté son
dévolu sur toi.
– Elle
aussi, si tu vas par là, elle joue sur les deux tableaux.
– Et
même les trois… Parce que qu’est-ce tu paries que d’ici samedi
elle aura voulu me voir ? Histoire de mouiller sa petite culotte
en se disant, tout en parlant de toi avec moi, que je suis au courant
de rien.
Mon
portable a sonné.
– Qu’est-ce
que je disais ! C’est elle…
19-
Je
me suis garée le long du trottoir, devant le magasin, et j’ai
attendu qu’elle sorte.
– Camille !
Son
visage s’est éclairé.
– Ah,
c’est vous !
– C’est
moi, oui ! Monte ! Tu pourrais quand même me donner des
nouvelles de temps en temps, non, tu crois pas ?
– C’est
que…
– C’est
que quoi ? C’est quand même pas bien compliqué d’appuyer
sur les touches d’un portable. Si ?
– J’ose
pas. Vous appeler, j’ose pas.
J’ai
mis le moteur en marche.
– Et
c’est moi qui suis obligée de me déplacer. Ah, ben bravo !
Bon, mais on réglera ça tout à l’heure. Raconte-moi plutôt…
Comment ça se passe ?
– Bien.
– Mais
encore ? Je vois… Va falloir que je te tire les vers du nez.
Comme d’habitude. Alors dis-moi ! Tu t’es pris une fessée
depuis la dernière fois ?
– Oh,
plusieurs !
– Combien ?
– Deux…
Non. Trois.
– Pourquoi
t’as d’abord dit deux ? Il y en a une dont tu voulais pas
parler ?
– Mais
non !
– Bien
sûr que si ! Laquelle ?
– Je
sais pas. Je…
– Laquelle ?
– Celle
que Perrine m’a donnée.
– Nous
y voilà ! C’était quand ?
– Ce
matin.
– Où ?
Au magasin ?
– Non.
Chez elle.
– Qu’est-ce
tu faisais chez elle ?
– C’est
là que j’habite maintenant. C’est elle qui me commande. Pour
tout. Comment je m’habille. Ce que je mange. À quelle heure je me
couche, tout ça…
– Ce
qui te convient parfaitement, j’imagine.
– Oh,
oui ! J’ai plus rien à décider. À me demander. C’est
reposant. C’est rassurant.
– C’était
pourquoi cette fessée ce matin ?
– Je
sais pas.
– Comment
ça, tu sais pas ?
– Non,
je sais pas. J’ai fait quelque chose qui lui a pas plus, mais je
vois pas quoi. Faut que je cherche et que je trouve, elle m’a dit.
– Sinon ?
– Elle
a pas précisé, mais ce que je voudrais pas, c’est qu’elle me
flanque dehors.
Je
me suis arrêtée.
– Descends !
Je
l’ai poussée sous une porte cochère.
– Fais
voir ! Ta fessée… Fais-la voir !
Elle
a jeté un rapide coup d’œil autour d’elle. Et elle m’ a obéi.
Elle a descendu pantalon et culotte jusqu’à mi-fesses.
– Plus
bas !
Jusqu’à
mi-cuisses.
– Ah,
oui, dis donc ! Ah, oui !
C’était
d’un rouge intense. Sur toute la surface. Avec, par endroits, des
plaques plus sombres. Noirâtres. Ou violacées. J’en ai suivi le
pourtour. Du bout des doigts.
Il y
a eu une course précipitée dans un escalier, à droite.
D’instinct,
elle a voulu tout remonter. Je l’en ai empêchée.
– Non !
Elle
s’est arrêtée net. Le pas, dans l’escalier, aussi.
J’ai
poursuivi, un bon moment encore, l’exploration de son derrière
endolori.
– C’est
bon. Tu peux te reculotter.
Ce
qu’elle s’est empressée de faire.
– Tu
vas lui dire à Perrine ?
– Oh,
ben oui ! Oui. Je lui dis tout.
– Ce
qui va te valoir une autre fessée.
– Oh,
ben ça, sûrement, oui.
20-
Andrea
était tout excitée.
– Il
va venir ? C’est vrai ? Là ? Maintenant ?
Coxan
a regardé sa montre.
– Dans
vingt minutes, il devrait, si tout se déroule comme prévu, faire
son apparition. Je feindrai la surprise. Lui aussi. « Depuis le
temps… Qu’est-ce tu deviens ? Etc. » Et je l’inviterai
à boire un verre avec nous.
– Mais
c’est qui au juste ce type ?
– Un
certain Félicien. Qui se dit entraîneur de hand. Mais bon, il peut
bien raconter ce qu’il veut.
– Il
a quel âge ?
– La
quarantaine. Peut-être un peu plus.
– Et
alors, comme ça, il m’a vue ?
– Et
plutôt deux fois qu’une. Quatre, même. Quatre fois il a fallu que
je la lui repasse la vidéo de ta fessée. Il s’en lassait pas.
– Il
commentait ?
– Ah,
pour ça, oui !
– Qu’est-ce
qu’il disait ? Ben, raconte, quoi !
– Que
t’as un sacré beau cul. Un cul que le rouge met superbement en
valeur. Et puis alors quand tu le gigotes ton popotin, que ça laisse
voir bien à fond comment t’es faite, alors là, non, mais alors
là, ça ferait damner un saint !
– Il
bandait ?
– Ça,
j’avoue que j’ai pas trop fait attention, mais sûrement, oui…
N’importe quel mec normalement constitué devant un spectacle comme
celui-là…
– Comment
j’aurais aimé voir sa tête !
– Là
où elle valait surtout son pesant d’or, sa tête justement, c’est
quand je lui ai proposé de te rencontrer. « La rencontrer ?
Comment ça, la rencontrer ? » « Ben, boire un verre
avec elle. Histoire que tu découvres son charmant petit minois. »
Je peux te dire qu’il s’est pas fait prier. « Mais alors
motus et bouche cousue, hein ! Aucune allusion à cette vidéo.
Tu ne l’as jamais vue. » Il a juré ses grands dieux. Bien
sûr ! Évidemment ! Ça coulait de source.
– Ce
que tu nous as pas dit, par contre, c’est ce qu’il croit.
– Comment
ça ?
– La
raison pour laquelle elle me la donnait, Lisa, cette fessée, il te
l’a pas demandée ?
– Si !
Bien sûr que si !
– Et
t’as répondu ?
– Que
j’en savais rien au juste. Que vous aviez éludé, l’une comme
l’autre, quand je vous avais posé la question. Et que j’avais
pas insisté.
– Si
bien qu’il peut tout imaginer. Ce qu’est pas plus mal,
finalement…
– Comment
ça faisait drôle ! Parce qu’attends, on était là, à
échanger des banalités, à discuter de trucs sans la moindre
importance alors que le mec, forcément, il pouvait penser qu’à
ça. Et moi, de mon côté, pareil.
– Il
y pensait d’autant plus que je lui ai glissé à l’oreille, quand
il est arrivé, que je suis allé à sa rencontre, que t’en avais
reçu une autre ce matin même.
– Ah,
ben d’accord ! En tout cas, jamais on aurait pu aller imaginer
qu’il savait. Il a rien laissé paraître. Rien du tout. À aucun
moment.
– Tu
le regrettes ?
– Non.
Bien sûr que non. Mais ce que je me demande, c’est comment il va
réagir maintenant. Ce qu’il va te dire.
– Je
te raconterai.
– Il
va vouloir me revoir, tu crois ?
– Alors
ça, ça ne fait pas l’ombre d’un doute.
21-
– C’est
moi !
Eugénie.
– Je
te dérange pas ?
– Pas
du tout, non.
– J’en
ai pas pour longtemps n’importe comment. Je t’ai juste apporté
quelques vidéos.
Elle
m’a tendu une clef USB.
– Ben,
assieds-toi quand même !
– C’est
des japonaises. Toute une série. De femmes mariées qui corrigent,
en public, la maîtresse de leur mari. Qui lui foutent le cul à
l’air et hop, ça dégringole.
– Ah,
c’est ton truc, ça, hein !
– Non,
mais comment elles en prennent pour leur grade, les filles. Ils ont
beaucoup moins de complexes que nous, les Japonais, eux, là-dessus.
Et puis alors ce qu’il y a aussi, c’est qu’ils mégotent pas
sur les figurants. T’en as, chaque fois, toute une flopée. Et qui
se contentent pas de faire nombre. Ils réagissent. Tu vois sur leur
tronche ce que ça leur fait ce spectacle.
– Tu
veux vraiment pas t’asseoir ?
– Si !
Oui. Et fais-moi un café, tiens, tant que tu y es ! N’empêche
que qu’est-ce que j’aimerais que ça m’arrive à moi !
Pour de bon.
– Il
doit bien y avoir moyen…
– Ben,
c’est pas si simple en fait. D’abord parce qu’il y a Jérôme,
mon mari. Et que, du coup, j’ai pas les coudées vraiment franches.
C’est pas le genre de type à apprécier que je le trompe. Et puis
même, à supposer que je parvienne à passer entre les mailles du
filet, ça veut pas dire pour autant que sa réaction à la légitime
de mon amant, ce serait de me flanquer une fessée déculottée dans
la rue.
– Disons
que c’est pas vraiment le cas le plus courant.
– Ce
qu’il faudrait, en fait, c’est que je prenne les choses dans
l’autre sens. Qu’avant de me jeter à la tête d’un mec, je
sois sûre que ce qu’elle va faire sa bonne femme, c’est rameuter
ses copines pour me tomber dessus.
– Oui,
alors, Eugénie, je vais être très claire avec toi. Il est hors de
question que tu t’approches de Coxan. près ou de loin.
– Quoi !
Non, mais attends ! Jamais, au grand jamais, il me viendrait une
idée pareille enfin ! Tu es mon amie – ou c’est tout
comme – et ça, à mes yeux, c’est sacré.
– Je
n’en doute pas, mais mettre les points sur les i, ça peut pas
faire de mal. Non ? Tu crois pas ?
– Tu
te fais un film, là, complètement. Parce que ton Coxan, je l’ai
vu une fois en tout et pour tout. Et encore ! En ta présence.
Et puis tiens, si tu veux vraiment le fond de ma pensée, c’est
vraiment pas le genre de type avec qui j’aurais envie qu’il se
passe quoi que ce soit. Il me branche vraiment pas.
– Et
c’est beaucoup mieux comme ça. Pour tout le monde.
– Quelle
heure il est ? Oh là là, je me sauve. On m’attend.
Regarde-les, les vidéos. Tu me diras…
– Allô !
Lisa ?
– Oui,
Coxan. Qu’est-ce qui se passe ?
– Je
viens quasiment de me faire violer.
– Eugénie,
j’parie ! Qui n’a rien eu de plus pressé, en sortant de
chez moi, que de se précipiter chez toi.
– Et
qui m’a carrément sauté dessus.
– La
bonne copine que voilà ! T’as pris ton pied au moins ?
– Elle,
oui ! Et pas qu’un peu.
– Tu
réponds pas à ma question.
– Quand
une nana se pâme dans tes bras, ça ne peut pas ne pas te mettre
dans tous tes états.
– Je
vois…
– On
fait quoi maintenant ? On passe à l’étape suivante ?
– Non.
On va prendre notre temps. Tout notre temps. Que chacun y trouve son
compte…
22-
Andrea
n’en revenait pas.
– C’est
tous les jours qu’il lui envoie des mails à Coxan. Plusieurs fois
par jour. Pour parler de moi. Que de moi. Il est complètement accro
en fait, hein !
Il
était effectivement accro. Et dithyrambique.
– Une
pure merveille, cette fille ! Une pure merveille !
Il
suppliait.
– Envoie-la
moi, la vidéo. Fais-moi un double. Et je serai le plus heureux des
hommes.
Il
insistait encore et encore.
– À
personne je la montrerai. Je le jure.
Andrea
s’est voulue compréhensive.
– Oh,
tu peux bien, le pauvre ! Il en a tellement envie. On voit pas
ma figure n’importe comment dessus.
Et
les vœux de ce Martial ont été comblés.
Coxan
avait une idée.
– Mais
vous voudrez jamais…
– Dis
toujours ! Si tu le dis pas…
– Ce
serait qu’on lui en redonne une de fessée à Andrea.
Oh,
si c’était que ça, elle, elle demandait pas mieux, hein, au
contraire !
– Même
que ça commence à me manquer. Et pas qu’un peu.
– Sauf
qu’on va pas reproduire éternellement la même scène. Faudrait
introduire un peu de variété. Ça va vite devenir lassant sinon, à
force…
– C’est
à dire ?
– Ben,
déjà, à la main c’est bien, oui, c’est même très bien, mais
il y a aussi toutes sortes d’autres possibilités.
Elle
aussi, elle y avait pensé.
– Seulement,
ça doit faire mal le martinet, non ?
– Ça
dépend, mais l’avantage, avec le martinet, c’est que tu
tortillerais et contorsionnerais tellement dans tous les sens que tu
en laisserais voir bien plus encore que ce que tu as déjà montré.
J’ai
précisé.
– Et
puis les traces boursouflées que laissent, à plein derrière, les
cinglées sont généralement du plus bel effet.
Coxan
avait également envisagé autre chose.
– Ça
te dirait pas de te regarder en train de la recevoir ?
– Comment
ça ?
– On
t’installerait bien confortablement sur le canapé, nez à nez avec
l’écran de l’ordinateur. C’est en direct, comme ça, que tu
verrais les lanières s’abattre et ton gentil petit derrière
tressauter de tout son cœur. Hein ? Ça te tente pas ?
– T’en
as de martinet ?
Coxan
s’est empressé d’aller le chercher.
– Fais
voir !
Elle
en a longuement caressé le manche, a fait claquer les lanières en
l’air, s’en est caressé les jambes.
– Alors ?
Décidée ? On y va ?
– Pas
tout de suite, non. Un autre jour.
Elle
lui a tendu le martinet, s’est ravisée.
– Tu
peux me le laisser ?
– Oh,
si tu veux…
– Que
je me fasse à l’idée… Que je l’apprivoise…
23-
Un
petit tour, discrètement, dans le bureau de Madame Gorsalier.
Histoire de la mettre au courant et d’obtenir son accord.
– Il
y a pas de problème. Aucun problème. Au contraire.
Et
je me suis mise à la recherche de Camille. Qui était en train
d’installer des robes sur les portants.
– Ça
va comme tu veux ?
Ça
allait, oui.
– Regarde-moi
quand je te parle…
Elle
a relevé humblement la tête.
– Il
y a un ami à moi qui va venir procéder à quelques achats. C’est
toi qui vas t’occuper de lui.
– Oui…
– Tâche
de te montrer serviable. Et aussi compétente que possible. C’est
quelqu’un de très exigeant.
Quand
Coxan a fait son apparition, une bonne vingtaine de minutes plus
tard, elle s’est précipitée vers lui.
– Monsieur ?
Il
l’a toisée. De la tête aux pieds.
– Quand
j’aurai besoin de vous, je vous ferai signe.
Et
il a tranquillement déambulé à travers le magasin. Pendant un long
quart d’heure. Avant de se mettre soudainement à hurler.
– Elle
est où, l’autre ? Qu’est-ce qu’elle fout ?
Camille
a aussitôt surgi.
– Ah,
ben, c’est pas trop tôt ! On peut pas dire que le client soit
roi, là-dedans.
– Je
suis désolée. Je…
– Venez
me montrer plutôt… Je trouve pas ma taille.
Ils
ont disparu, tous les deux, entre les rayons.
À
nouveau un hurlement.
– Non,
mais c’est incroyable de voir ça ! La directrice ! Où
est la directrice ?
– Un
problème, Monsieur ?
– Et
comment ! Votre vendeuse est d’une arrogance…
– Excusez-vous,
Camille ! Excusez-vous immédiatement !
– Je
demande à Monsieur de bien vouloir m’excuser…
– Et
maintenant, dans mon bureau ! Dans mon bureau tout de suite !
Elle
a obéi, tête basse.
On a
suivi, Coxan et moi.
Madame
Gorsalier a refermé la porte.
– J’en
ai assez, Camille. Plus qu’assez. Vous n’en faites qu’à votre
tête. Vous n’écoutez rien ni personne. Vous prenez vos collègues
de haut. Vous vous comportez de façon inqualifiable avec les
clients. C’est en permanence que votre comportement laisse à
désirer et que je suis obligée de vous reprendre. Vous n’allez
pas avoir l’indécence de prétendre le contraire, j’espère…
– Non…
D’une
toute petite voix.
– Il
n’y a qu’une chose que vous comprenez. Une seule qui soit, au
moins pour un temps, efficace. Et vous savez laquelle.
– La
fessée.
Les
yeux baissés.
– La
fessée, oui ! Déculottez-vous, Camille !
24-
À
peine Camille avait-elle commencé à déboutonner son pantalon qu’on
a gratté à la porte.
– Entrez !
C’était
Perrine, hilare, en compagnie d’Aglaé.
– On
peut pas assister ?
– Oh,
si vous voulez… Mais fermez le magasin alors !
Ce
qu’elles se sont empressées d’aller faire.
– Là…
Ça y est !
Camille
est sortie de son pantalon, une jambe après l’autre. A cherché,
du regard, un endroit où le poser. Fini par l’abandonner par
terre, à ses pieds.
Je
suis intervenue.
– Ah,
ben voilà une jeune fille soigneuse au moins… Un vrai plaisir de
voir ça !
Elle
l’a précipitamment ramassé, serré contre elle, indécise.
Perrine
a avancé la main.
– Donne !
Elle
a donné.
– La
culotte !
Elle
l’a retirée, la lui a tendue.
– Le
reste aussi !
Elle
a marqué un temps d’hésitation.
– Le
reste aussi, j’te dis ! Ce sera mieux. Pour tout le monde.
Madame
Gorsalier était aussi de cet avis.
– Ce
sera mieux en effet…
Aglaé
a battu des mains.
– Oh,
oui ! Oui ! Tout ! Allez, à poil !
Le
chemisier. Le soutien-gorge. Tout. Elle nous a fait face. Et elle a
attendu, immobile, en silence.
Madame
Gorsalier s’est tournée vers Coxan.
– C’est
vous qui avez eu à vous plaindre d’elle. Alors c’est vous qui
donnerez le signal du début des opérations.
Il
n’était pas pressé. Il a pris tout son temps pour examiner, d’un
œil de connaisseur, l’anatomie de Camille. Qu’il a manifestement
appréciée.
Quelque
désir qu’il en ait eu, il n’a pourtant pas pu faire durer
éternellement.
– Allez !
Madame
Gorsalier a ordonné à Camille de se pencher en travers du bureau.
Elle a aussitôt lancé une première claque, à toute volée, qui
lui a arraché un petit gémissement. Une autre. Une troisième. Une
quantité d’autres. En rafale. Qui tombaient à pleines fesses. Qui
s’y sont imprégnées. D’abord en longues traînées rosâtres,
puis, peu à peu, en rouge ardent, sur toute la surface. Camille
ponctuait chaque claque d’un petit grognement rauque et d’un
léger soubresaut du derrière. Madame Gorsalier a accentué la
cadence. Les coups se sont faits plus appuyés encore. Camille a
crié, s’est plus franchement soulevée, laissant de temps à autre
entrapercevoir furtivement ses replis intimes.
– Là !
Et que ça te serve de leçon !
Elle
s’est redressée, énergiquement frotté les fesses.
Sous
les yeux ravis d’Aglaé.
– Je
peux te dire que ça va te brûler un moment, ma petite !
Madame
Gorsalier a froncé les sourcils.
– Qu’est-ce
tu fabriques ? Rhabille-toi !
Elle
a aussitôt obtempéré.
– Bon…
Et maintenant tu retournes t’occuper de ce monsieur… Et tâche
qu’il soit satisfait de la façon dont tu vas te comporter avec
lui… Si tu veux pas qu’on en rajoute une couche…
25-
Coxan
avait passé la soirée avec Eugénie.
– Encore !
– Jalouse ?
J’ai
haussé les épaules.
– Idiot !
Oui, bon, ben raconte, quoi !
– Je
l’ai fait monter un peu en pression.
– C’est-à-dire ?
– Que
j’ai refusé de la laisser venir chez moi. C’était beaucoup trop
dangereux. Parce que… je voulais pas l’inquiéter, mais je me
demandais si tu commençais pas à te douter de quelque chose. Ah,
oui ? J’étais sûr ? Sûr, non. Mais il y avait tout un
tas d’indices concordants qui me donnaient à penser que tu te
posais vraiment des questions.
– Et
elle a réagi comment ?
– Elle
a voulu que je précise. Qu’est-ce qui me faisait penser ça ?
Je suis resté dans le vague. Rien de vraiment significatif. Tout un
tas de petits détails insignifiants qui, mis bout à bout,
finissaient par prendre sens. Bref, je te sentais en alerte. Mieux
valait être prudents.
– Et
donc ?
– Et
donc j’ai insisté pour qu’on se voie à l’hôtel. Loin d’ici.
En prenant mille précautions. Qui l’ont beaucoup amusée. Je me
faisais un film, tu parles ! Et quand bien même ! Quand
bien même tu finirais par découvrir le pot-aux-roses. Ça
changerait quoi ? Je m’en suis étranglé. Hein ? Mais
tout enfin ! Tout ! Ah, oui ? Ben elle, elle voyait
vraiment pas où était le problème. J’étais adulte, non ?
Eh bien alors ! J’étais capable d’assumer. De savoir ce que
je voulais et ce que je voulais pas. De m’imposer. J’ai fait la
moue. C’était pas si simple. Mais si c’était simple, si !
Elle, il aurait fait beau voir que son mari lui interdise de mener sa
vie à sa guise. Alors là ! Pas moi ? J’allais me
laisser mener par le bout du nez ? Rentrer maison !
Coucouche panier ! Et on bouge plus. Ah, ben bravo !
Bravo !
– Je
me demande où elle veut en venir, là…
– Elle
joue le jeu. Tout simplement. Son truc, c’est de se faire mettre la
fessée pour la punir de coucher avec le mec des autres. Elle rentre
à fond dans le rôle.
– Mouais…
– Dès
le départ, quand on a imaginé de lui faire croire qu’on était en
couple, on savait bien qu’il y avait toutes les chances que ça
tourne comme ça, non ? C’était même le but.
– Sauf
qu’en réalité, ce qu’elle cherche à faire, c’est à te
mettre le grappin dessus. En beauté. Et reconnais qu’entre coucher
et faire des pieds et des mains pour foutre un couple en l’air, il
y a quand même une sacrée marge, non ?
– On
s’en fiche. On n’est pas vraiment ensemble.
– Non,
mais elle le croit. Et elle en a strictement rien à battre. Faut
vraiment qu’elle soit tordue, avoue ! Qu’est-ce tu paries
que ça la fait jouir d’essayer de nous séparer ?
– Grand
bien lui fasse !
– Oui,
ben moi, ça me fait pas rire. J’ai horreur qu’on se foute de ma
gueule derrière mon dos. Alors tu sais pas ? Eh bien, on va
siffler la fin de la récréation.
– C’est-à-dire ?
– Qu’on
va la lui flanquer sans tarder sa fessée. Et je peux te dire qu’elle
va pas être piquée des vers. Que le cul va la gratter un bon
moment. Et après, chacun sa route. Je veux plus entendre parler
d’elle. De quelque façon que ce soit.
– Et
t’envisages ça pour quand ?
– Le
plus tôt possible.
26-
Andrea
a passé la tête par la fenêtre ouverte.
– Coucou !
C’est moi !
– Ben,
entre !
– Je
l’ai !
Le
martinet. Qu’elle a déposé, avec un grand sourire, sur la petite
table de la salle de séjour, devant la télé.
– Ah,
alors ça y est ! Tu t’es enfin décidée !
– Je
l’ai toujours été. Depuis le début.
– Seulement
c’est tellement bon d’attendre. D’imaginer encore et encore les
choses avant qu’elles n’arrivent. D’en profiter à l’avance.
C’est pas ça ?
– Si !
Bien sûr que si !
– Bon,
ben reste plus qu’à passer à l’acte. J’appelle Coxan.
– Il
est peut-être pas libre.
– Oui,
oh, ben alors, pour ça, pas besoin de t’en faire qu’il va
l’être. Il va accourir toutes affaires cessantes.
– Et
voilà… Ça y est ! On est opérationnels.
– Si
tu nous expliquais un peu ? C’est quoi tout ce fourbi ?
– Alors
cette caméra, là, c’est le direct. Grâce à elle, Andrea va
pouvoir suivre, comme si elle y était, si j’ose dire, le déroulé
des opérations. Elle verra tomber les cinglées au moment même où
elles la mordront. Et où elle les sentira passer.
– Et
celle-là ?
– Celle-là,
elle va nous offrir un joli petit plan d’ensemble. On l’y verra
tout à la fois en train de se faire travailler le derrière et en
train de suivre tout ça, les yeux rivés à l’écran, de très
très près.
– Il
y en a une troisième…
– Oui,
oh, alors celle-là… Ce que j’aimerais, si tu en es d’accord,
bien sûr, Andrea… Celle-là, ce serait pour un gros plan sur ta
petite frimousse. Pour voir s’y inscrire… tout ce qui va s’y
inscrire au cours de cette séance. Étant bien entendu que, comme je
m’y suis formellement engagé, ça restera à usage strictement
personnel.
Elle
a esquissé un petit sourire mutin.
– Je
pourrai quand même en avoir une copie ?
– Douze,
si tu veux.
J’ai
constaté.
– Bon,
ben il y a plus qu’à, alors…
Il y
avait plus qu’à, oui…
– Tu
te déshabilles ?
Il
l’a filmée en train de le faire. De replier soigneusement ses
vêtements et de les déposer sur la chaise, près de la cheminée,
l’un après l’autre, au fur et à mesure qu’elle les retirait.
Elle
est restée nue, quelques secondes, à regarder intensément la
caméra et puis elle est allée s’allonger de tout son long sur le
canapé, a fixé l’écran de l’ordinateur droit dans les yeux.
– Je
suis prête.
J’ai
levé le martinet, fait mine de l’abattre. À deux reprises. À
trois reprises. Elle s’est, chaque fois, crispée des fesses.
Je
l’ai vraiment abattu. Pour de bon. À pleine croupe.
– Aïe !
Hou, la vache !
Un
second coup. Plus énergique. J’ai pris tout mon temps. Un
troisième. Un quatrième que je lui ai fait interminablement
attendre.
– Plus
vite ! Plus vite !
Plus
vite. En rafale.
Elle
ne quittait pas l’écran des yeux.
– Et
plus fort ! Plus fort !
Ça
s’est enfoncé, au cœur des fesses, en longues traînées
boursouflantes. Ça a débordé sur les cuisses.
Elle
s’est légèrement hissée sur les genoux. Avec un grand râle.
– Je
vais jouir ! Je vais jouir ! Je jouis…
27-
On
était, Coxan et moi, tranquillement installés à une terrasse de
café.
– Tiens,
regarde qui c’est qu’arrive ! Ben alors, Camille, on dit
plus bonjour !
Elle
s’est arrêtée net.
– Je
vous avais pas vus.
– Fais
la bise à Coxan au moins.
– Ah,
oui, pardon…
Elle
s’est penchée. Lui a tendu la joue.
– Qu’est-ce
tu fais dans le coin ? Tu travailles pas aujourd’hui ?
– C’est
mon jour de repos.
– Ben,
assieds-toi ! T’as bien deux minutes.
Elle
l’a fait. Du bout des fesses.
– C’est
pas vrai que ça te cuit encore !
– Ça
me cuit plus, non. Mais c’est sensible.
– Beaucoup ?
– Pas
mal.
– Tant
mieux. Parce que t’avais mérité, avoue !
– Oui.
– Et
s’il n’avait tenu qu’à moi, je peux te dire que tu t’en
serais pas tirée à si bon compte. Traiter les clients avec une
telle désinvolture ! Non, mais cette fois, on aura tout vu.
Elle
a baissé la tête.
Je
la lui ai fait relever. Du bout du doigt.
– D’ailleurs,
moi, je crois bien que tu lui dois encore une petite compensation à
Coxan. Vu la façon inqualifiable dont tu t’es comportée avec lui.
Non ? T’es pas de cet avis ?
– Si !
– Et
quoi comme compensation ?
– Je
sais pas.
– Eh
bien moi, je sais ! Il y a une caméra de surveillance dans le
bureau de Madame Gorsalier. Une caméra qui a tout filmé l’autre
jour quand t’as reçu ta fessée. Alors ce que tu vas faire… Tu
vas aller lui demander la bande à ta patronne. Et tu vas bien
gentiment venir l’offrir à Coxan.
– Oui.
– Eh
bien, vas-y ! Qu’est-ce t’attends ?
Elle
s’est levée.
– Et
n’oublie pas de faire faire un paquet cadeau.
Elle
le lui a tendu. À bout de bras.
– Ah,
non, pas comme ça, non ! À genoux tu vas te mettre.
Elle
a jeté un rapide coup d’œil autour d’elle.
– Ben
oui, il y a du monde, oui ! Mais ça fait rien ! Qu’est-ce
ça peut faire ?
Elle
s’est agenouillée.
Coxan
n’a pas pris tout de suite le paquet. Il l’a d’abord longuement
sermonnée. Il lui a fait promettre de faire des efforts – tous
les efforts qu’elle pourrait – pour mieux se comporter à
l’avenir.
– C’est
dans ton intérêt à toi. Tu en as bien conscience, j’espère ?
Oui.
Oui. De la tête.
Des
gens passaient. Ralentissaient. Arboraient parfois de petits sourires
moqueurs. Certains s’arrêtaient. Commentaient.
Il
s’est bien écoulé une bonne dizaine de minutes avant qu’il
consente enfin à accepter son présent.
– C’est
quoi ?
– Vous
savez bien.
– Pas
du tout, non.
– Ma
fessée.
– Ah,
oui ? C’est gentil. Ça me touche beaucoup. Ben, tu sais pas ?
On va aller regarder ça ensemble alors. Tous les trois. Ah, si, si,
j’y tiens…
28-
Elle
nous a docilement suivis.
– Entre !
Et mets-toi à l’aise !
Elle
m’a regardée sans comprendre.
– Ben,
oui ! Désape-toi !
Ce
qu’elle s’est empressée de faire.
Une
fois en sous-vêtements, elle s’est arrêtée. A hésité.
– T’attends
quoi ?
– Non.
Rien.
Toute
nue. À poil.
– Tourne-toi !
Fais voir s’il reste des traces. Oui… Si ! Un peu quand
même… Là, c’est tout noirâtre. Et puis là, au milieu. Ça te
fait mal quand j’appuie ?
– Un
peu.
– Et
là ?
– Aïe !
Oui.
On
l’a fait s’installer entre nous deux, sur le canapé, et Coxan a
lancé la vidéo. Une vidéo d’excellente qualité.
– Elle
a les moyens, dis donc, ta patronne…
On
s’est concentrés sur les images.
– Elle
est pas trop à l’aise, en attendant, sur ce coup-là, la Camille !
– Oui.
Comment elle se dandine d’un pied sur l’autre…
– Et
toi qui la fais attendre tant et plus. Exprès, je suis sûre.
– Ben,
tiens ! C’est le meilleur moment, là, juste avant que ça
commence.
Je
me suis tournée vers elle.
– Et
toi, ma chérie, ça te plaît ?
– Oui.
– T’as
pas l’air vraiment convaincue.
– J’aime
que ça vous plaise.
– Ah,
ça y est ! Madame Gorsalier entre en scène.
– Comment
elle fait ça bien, n’empêche !
– Oui,
préparation du terrain d’abord… À petites claques bien sèches
et pas trop fortes. Que ça le rende sensible. Et après, on peut y
aller carrément.
– Ce
qu’elle fait manifestement de très bon cœur.
– Ah,
ça ! Et Aglaé ! Regarde Aglaé, là, sur le côté. Elle
en perd pas une miette. Non, mais cet air ravi qu’elle a !
– Et
voilà… Ça a pris sa vitesse de croisière. J’adore. J’adore
comment tu le trémousses ton petit popotin chaque fois que ça
tombe. Pas toi, jeune fille ?
– Si !
– Ah,
tu vois ! Bon, mais on approche du bouquet final, là !
Comment tu piaules ! Un véritable enchantement… Oh, fini,
déjà ! Quel dommage ! Ah, oui, c’est vrai, faut encore
que tu te frottes les fesses. Ça fait du bien, ça, hein ! Ça
soulage…
L’écran
est redevenu noir.
– En
tout cas, merci, hein ! C’est un riche cadeau que tu m’as
fait là… Je sens que je vais en faire un usage immodéré.
– Oh,
mais elle t’en fera d’autres des cadeaux, va ! Parce que tu
crois qu’une petite leçon comme ça va lui avoir suffi ?
Penses-tu ! Alors là, je suis bien tranquille. Retourne faire
tes achats là-bas…
– J’y
compte bien.
– Et
tu verras qu’il y aura rien de changé. Son comportement sera
toujours aussi déplorable. Ah, il va falloir qu’elle lui en mette
encore et encore des fessées, Madame Gorsalier, pour arriver enfin à
un résultat. Et des bien plus sévères que celle-là… Qu’on
pourrait d’ailleurs se repasser, en attendant, non ? Qu’est-ce
t’en penses, Camille ?
– Je
veux bien, oui.
29-
Andrea
m’a sauté au cou.
– Il
m’arrive plein de trucs.
– Quels
trucs ?
– Oh
là là, attends ! Je vais te raconter tout ça. En détail.
C’est rapport à Martial.
– J’en
étais sûre… Eh bien, vas-y ! Je suis tout ouïe.
– J’ai
eu envie de le voir. À cause des mails de fou qu’il envoie à
Coxan à mon sujet. Mais toute seule. Que lui et moi. Et je me suis
dit que, si ça tombe, il y était tout le temps fourré, maintenant,
au café où on s’était rencontrés tous les quatre. Que c’était
là qu’il venait penser à moi. Et lui écrire à Coxan. Je m’y
suis pointée. Eh, ben bingo ! Il était là. Oh, mais alors sa
tête quand j’ai passé la porte ! Sa tête !
– J’imagine…
– Il
s’est précipité à ma rencontre. « Vous me reconnaissez
pas ? Martial ! De l’autre jour, vous savez… »
J’ai fait mine de chercher, sourcils froncés. « Ah, oui,
oui… Bonjour ! Vous allez bien ? »
– Et,
évidemment, il a voulu t’offrir un verre.
– Ah,
ben ça ! Près de deux heures on a discuté du coup. Comment ça
me faisait trop drôle de me retrouver là, en face de lui, et de me
dire que tous les soirs il me regardait, en boucle, me prendre ma
fessée. Et qu’il savait pas que je savais. Que tous les mails
qu’il adressait à Coxan, je les lisais. Que, quelquefois, c’était
même moi qui les dictais, les réponses.
– Et
vous allez vous revoir, je suppose…
– C’est
déjà fait, ça. Le lendemain. Et encore hier. Et puis ce matin.
Mais qu’est-ce qu’il est intéressant à parler en attendant.
– Seulement
à parler ?
– Oui.
Non. Tu te doutes bien qu’à force de passer du temps ensemble
comme ça…
– Vous
ne vous êtes pas contentés de vous regarder dans le blanc des yeux.
– Voilà,
oui. Comment il est doux ! Et câlin. C’est la première fois,
moi, un type avec qui je me sens aussi bien. Je lui ai dit alors, du
coup.
– Tu
lui as dit quoi ?
– Ben,
pour les fessées, tout ça ! Je me sentais vraiment trop mal.
Fausse.
– Il
l’était autant que toi, si tu vas par là.
– Oui,
enfin bref, il valait mieux repartir sur de bonnes bases.
– Et
il a réagi comment ?
– Il
s’est senti soulagé parce que lui aussi, de son côté, ça
commençait à lui peser tous ces mensonges. Et du coup, dans la
foulée, je lui ai montré la vidéo de la fessée où, en même
temps, je me regarde en train de la recevoir.
– Il
a dû apprécier…
– Tu
parles ! Il m’a carrément sauté dessus, oui ! Jamais
j’avais vu un mec dans un état pareil. Quatre fois on a remis ça.
Quatre fois ! Dont deux avec la vidéo qui tournait. Le bruit
des cinglées du martinet en arrière-fond. Mes gémissements. Tout,
quoi ! Il m’a mise complètement sur les rotules.
– Et
maintenant ?
– Ce
qu’il aimerait, c’est te voir me donner une fessée en vrai.
– Oui,
oh ben ça, c’est pas bien compliqué. Non, mais ce que je voulais
dire, c’est : ça va aller où, vous deux ?
– C’est
bien là toute la question. Si je l’écoute, il est fou amoureux de
moi. Il me promet monts et merveilles. Mais ça…
– T’as
peur qu’il soit pas sincère ?
– Oh,
non ! Non. Il l’est sincère. J’ai pas le moindre doute
là-dessus. Non. Mais le jour où il va me désirer moins, ce qui va
forcément arriver, il va se passer quoi ?
– Est-ce
qu’il est absolument nécessaire de se poser ce genre de questions
à l’avance ? Profite ! Tu verras bien…
– Oui.
Je suis idiote. Tu as raison.
– Évidemment
que j’ai raison.
30-
Eugénie
a levé les yeux au ciel.
– Qu’est-ce
que t’es encore allée inventer…
– J’invente
rien du tout.
– Mais
j’en ai rien à battre de ton Coxan. Strictement rien.
– Oui,
ben ça, t’as plutôt intérêt… Parce que sinon…
– Sinon
quoi ?
– Tu
le sais très bien.
Elle
a haussé les épaules et claqué la porte.
La
chambre s’est éclairée. J’ai attendu une bonne vingtaine de
minutes sur le parking et puis je suis montée. Je suis entrée en
trombe, me suis précipitée vers le lit. J’ai arraché draps et
couvertures. Elle était nue.
– Ah,
t’en as rien à battre de Coxan ! Ah, t’en as rien à
battre, espèce de petite saloperie.
J’ai
brandi le martinet.
– Non,
attends ! Je vais t’expliquer…
– M’expliquer ?
Fous-toi bien de moi. En plus !
J’ai
cinglé. À pleines cuisses.
– Aïe !
Mais t’es folle !
Elle
s’est tournée sur le ventre.
– Je
suis folle, oui ! Complètement folle.
Et
j’ai tapé. De bonnes cinglées bien mordantes, bien
boursouflantes. À intervalles suffisamment longs pour qu’elle ait
le temps de les appréhender. Et irréguliers, pour qu’elle ne
sache jamais à quel moment au juste ça allait tomber.
– Regarde,
Coxan, regarde comme elle se crispe joliment des fesses en les
attendant. Qu’est-ce que je fais ? J’envoie ? J’envoie
pas ? Allez, j’envoie… Oh, et puis non ! Il y a rien
qui presse.
J’ai
fait durer comme ça, un bon moment. Et puis…
– Bon,
allez ! Assez joué.
Une
dernière bordée de coups. Une dizaine. À toute volée.
– Et
maintenant, tu dégages…
Elle
s’est rhabillée, en toute hâte, et elle a filé.
Je
me suis assise au bord du lit. Coxan m’a souri.
– Comment
ils brillent tes yeux !
– Peut-être,
oui.
– Et
t’as les pommettes en feu.
– C’est
que…
– Je
sais, oui. Du coup, j’ose à peine imaginer l’état des lieux…
ailleurs.
– Ailleurs ?
Oh, ben, ailleurs…
On a
éclaté de rire. Et je me suis retrouvée dans ses bras. Et il y a
eu ses mains sur moi. Ses doigts en moi. Et puis lui…
On
est restés enlacés.
– On
en a fait des choses, finalement, tous les deux, en si peu de temps.
– Et
on en fera d’autres.
– Oh,
ben oui, oui… On va quand même pas s’arrêter en si bon chemin.
– D’autant
qu’elles comptent sur nous, les filles.
– Et
puis on en trouvera d’autres.
– Mais,
dans un premier temps, on va d’abord se consacrer à nous. Qu’à
nous. Non ? Ça te dit pas ?
Oh,
que si, ça me disait ! Si !
Et
je lui ai doucement caressé les fesses.
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