LE MARIAGE DE LÉA
Albert
Edelfert 1887/ phot. Bodil Karlsson Nationalmuseum (Stockolm)
Ma
sœur avait un service à me demander. Elle m’avait même appelé
tout exprès.
– Tu
sais que Léa doit se marier ?
– C’est
ce qui se dit, oui.
– Le
mois prochain. Et elle voudrait récupérer, d’ici là, les lettres
qu’elle m’a adressées. Comme je vais quand même pas revenir
tout exprès de Nouméa pour les lui rendre, j’ai pensé à toi.
– Pas
de problème. Mais c’est si urgent que ça ? Ça peut pas
attendre ton retour ?
– Elle
y tient absolument. Faut dire que ce qu’il y a là-dedans… Enfin
bref, je compte sur toi. Elles sont dans mon secrétaire. Deuxième
tiroir gauche.
– Ce
qu’il faudra que tu m’expliques un jour, c’est pourquoi, à
l’époque d’Internet, des boîtes mail et tout et tout, vous
éprouvez encore le besoin de…
– Tu
connais Léa. Elle a jamais rien pu faire comme tout le monde.
– Ah,
ça !
Je
la connaissais, oui, enfin, c’était vite dit. À l’époque où
elles étaient cul et chemise toutes les deux, qu’elle passait
quasiment tous les jours à la maison, je m’employais plutôt à
l’éviter. C’était une fille insupportable de prétention et
d’arrogance. Elle avait excellente opinion d’elle-même, prenait
tout le monde de haut et tranchait de tout. Elle m’était
résolument antipathique. Je ne rêvais que d’une chose : lui
rabattre son caquet. Sans en avoir, malheureusement, jamais eu
l’occasion.
Les
lettres étaient bien là. Je suis aussitôt allé vérifier. Un gros
paquet. Des centaines de feuillets couverts d’une grande écriture
énergique bleue qui s’étalait de tout son long sur le papier.
J’en ai parcouru un, au hasard, sans en avoir vraiment, au départ,
l’intention. Par pur réflexe. Des mots qui ont pris sens. Qui en
ont appelé d’autres. Je suis arrivé au bas de la page. J’en ai
entamé une autre. Une troisième. Et… j’ai tout repris au début.
Le lendemain matin, aux aurores, je mettais un point final à ma
lecture.
Elle
est passée le mardi, en tout début d’après-midi.
– Je
viens chercher mes lettres.
– Oui,
ben ça, j’me doute. T’es pas là pour mes beaux yeux. Mais
assieds-toi ! T’as bien cinq minutes.
Elle
a hésité.
– Vite
fait ! J’ai plein de trucs à faire.
– Alors
comme ça, tu te maries.
– Je
me marie, oui.
– Et
t’es sûr de pas être en train de faire une grosse connerie ?
– Écoute,
le jour où j’aurai besoin de ton avis…
– Oh,
moi, tu sais, ce que j’en dis ! Parce que j’en ai
strictement rien à foutre. Mais enfin apparemment ce type, c’est
pas le top du top.
– Si
tu te mêlais de ce qui te regarde ?
– Il
est pas franchement intéressant, à ce qu’il paraît. Superficiel,
inconsistant, intellectuellement très limité, il a vraiment rien
pour lui, le pauvre.
– Tu
le connais pas. Et puis ce qui se raconte…
– Même
quand c’est toi qui le dis ? Qui l’écris plutôt ?
– Ah,
ben d’accord ! T’as lu mes lettres ! Non, mais c’est
pas vrai que t’as lu mes lettres !
– Qui
sont passionnantes.
– Mais
c’est dégueulasse ! T’avais pas le droit.
– Tout
de suite les grands mots. C’est fait pour être lu, des lettres,
non ?
– C’est
pas à toi qu’elles étaient adressées. Et t’es vraiment la
dernière personne à qui il me serait venu à l’idée de…
– Cela
étant, je comprends que tu veuilles les récupérer. Parce que si
elles tombaient entre les mains de ce pauvre garçon – on ne
sait jamais – et qu’il apprenne ce que tu penses vraiment de
lui, peut-être bien qu’il aurait plus vraiment envie de se marier.
Plus du tout même.
– Bon,
écoute ! Je suis pressée, là. Alors tu me rends mes lettres
et je file.
– Tu
l’épouses pour son fric, hein ? Ben, oui ! Forcément.
Il y a que ça qui plaide en sa faveur. C’est déjà pas si mal, tu
me diras. Surtout pour une fille comme toi. Qui n’aime rien tant
que de se vautrer voluptueusement dans le luxe. Seulement il faut
bien payer ça de quelques sacrifices. Il baise vraiment si mal que
ça ?
– Ça
te regarde pas. Bon, mais allez, faut vraiment que j’y aille.
– J’invente
rien, hein ! C’est écrit. Noir sur blanc. De ta propre main.
Oh, mais comme tu dis : c’est juste un mauvais moment à
passer. Suffit de fermer les yeux et de penser à autre chose. Ou à
quelqu’un d’autre. De ce côté-là, t’es rodée maintenant. Ça
fait deux ans que tu supportes ses lamentables étreintes .Et que tu
vas t’éclater allègrement ailleurs. Sans rechigner à la besogne,
dis donc ! Parce que quatre liaisons, depuis que t’es avec
lui, ça commence à faire. Sans compter les petits à-côté. Les
coups d’un soir sans lendemain. Faut dire que ça, tant que t’étais
convaincue qu’il y avait aucune chance qu’il te demande en
mariage, tant que tu te contentais de profiter d’un pognon qu’il
te lâchait à foison, ça portait pas vraiment à conséquence. Au
pire, s’il avait découvert le pot-aux-roses, il t’aurait
larguée. Et comme t’étais de toute façon persuadée que c’était
ce qui finirait par arriver… Sauf que, maintenant, on n’est plus
du tout dans le même cas de figure. Tu vas devenir la Madame d’un
monsieur bardé de fric, héritier de l’affaire de papa et
vraisemblablement promis à un bel avenir politique. Tu vas faire
quoi du coup ? Te déguiser petite épouse modèle ? Et
fidèle. Te contenter d’écarter docilement les cuisses, chaque
fois que ton seigneur et maître éprouvera le besoin de venir se
vider les couilles ? En t’emmerdant à cent sous de l’heure.
Ou bien est-ce que tu vas continuer à jouer avec le feu ? Avec
tous les risques que ça va désormais comporter. Tu la connais la
réponse. On la connaît tous les deux. Même si, dans un premier
temps, tu réussis à faire profil bas, ça va vite te redémanger.
Et tu repartiras à la chasse au mâle. En prenant mille et mille
précautions pour qu’il ne se doute de rien. C’est malhonnête,
reconnais ! Profondément malhonnête. Parce qu’il est ce
qu’il est, ce monsieur, mais il est quand même en droit de savoir
qui il épouse au juste. Qui tu es vraiment. À quoi il s’expose.
Ça lui permettra de prendre sa décision en toute connaissance de
cause.
– Ce
qui signifie ? Qu’est-ce que t’es en train d’essayer de me
dire, là ?
– Que
ça me pose un problème de conscience. Maintenant que je suis au
courant…
– Tu
vas quand même pas…
– Lui
donner tes lettres à lire ? Je me pose la question. Et je crois
bien que si.
– T’es
vraiment le roi des salauds.
– Tu
penses ce que tu veux, mais, au moins, je serai en paix avec ma
conscience.
– Ta
conscience ! Non, mais alors là, cette fois, on aura vraiment
tout entendu. Ta conscience !
– Il
faut qu’il sache. C’est indispensable. Pas seulement qu’il a
quatre-vingt-dix-neuf chances sur cent d’être cocu à tour de
bras, mais aussi – et surtout – dans quelle piètre
estime tu le tiens. Ta lettre du 3 juillet et celle du 9 septembre
sont tout à fait significatives à cet égard. De vrais morceaux
d’anthologie. Ah, il va apprécier.
– Tu
le feras pas. Tu me fais marcher.
– J’hésite.
Pas sur le principe, non, mais sur les modalités. Est-ce que je lui
envoie une photocopie de l’ensemble ? Ou bien uniquement des
morceaux choisis ? Est-ce que je le fais tout de suite ou est-ce
que j’attends la veille du mariage ? Je pourrais aussi les
adresser à tous les invités dont j’aurais, d’ici là, réussi à
me procurer l’adresse. C’est une bonne idée, non ? Ambiance
garantie le jour J.
– Oui,
bon. Si on jouait cartes sur table plutôt ? C’est quoi le but
de toute cette pantomine ? Qu’est-ce que tu veux ? De
l’argent ?
– Non,
mais ça va pas ! Tu me prends pour qui ?
– Quoi,
alors ? Tu veux me tirer, c’est ça ?
– Non,
plus, non. Par contre, je te flanquerais bien une bonne grosse fessée
déculottée. Depuis le temps que ça me démange.
– Une
fessée ? Non, mais ça va pas ? T’es complètement
barré, toi, par moments, dans ta tête.
Et
elle s’est enfuie en claquant la porte. Furieuse.
(
à suivre)
LE MARIAGE DE LÉA (2)
Albert
Ritzberger, 1898 Junge Frau am Sofa liegend
Elle
est revenue le lendemain matin.
– Oui,
il faut qu’on parle. Parce que tu peux pas me demander une chose
pareille.
– La
preuve que si !
– Non,
mais tu te rends compte ?
– Parfaitement.
Ah, c’est sûr que pour une fille comme toi qui trimballe partout
ses grands airs supérieurs, qui proclame en permanence, haut et
fort, qu’il n’y a que sa petite personne qui compte, que le reste
de l’humanité est quantité méprisable, pas facile de devoir
ravaler son orgueil pour venir gentiment offrir son petit postérieur
dénudé à une bonne claquée. Mais c’est justement ce qui fait
tout l’intérêt de la chose. Pour l’exécutant d’abord. Moi,
en l’occurrence. Et, accessoirement, pour l’exécutée. Ça lui
remet quelque peu les neurones en place.
– C’est
ignoble. Tu es ignoble.
– Tu
penses ce que tu veux, mais tu te décides. On va pas tourner comme
ça pendant des heures autour du pot.
– Tu
le feras pas n’importe comment. Je suis sûre que tu lui diras rien
à Paul.
– Tu
verras bien.
– Il
y aurait pas moyen ?
– De
quoi donc ?
– Autre
chose. À la place.
– C’est-à-dire ?
– Je
sais pas, moi ! Une petite pipe, par exemple. je me défends pas
mal là-dessus, à ce qui se dit.
– La
fessée.
– Ou
même… Je suis à toi, si tu veux. Hein ? Ça te dit pas ?
– Non.
La fessée.
– Ce
que tu peux être chiant quand tu t’y mets !
– Qu’est-ce
tu fais ? Tu t’en vas ?
– Oui.
– Je
peux mettre la machine en marche alors ?
– Non.
Attends !
– Jusqu’à
demain, mais pas plus.
Il
était huit heures du soir, le lendemain. Bien sonnées.
– Ça
y est ? T’es décidée ?
– S’il
y a pas moyen de faire autrement.
– Il
y a pas moyen, non.
– Bon,
mais alors tu te dépêches. Qu’on en finisse.
– Ça,
c’est à moi de voir. Et moi, j’aurais plutôt envie de faire
durer au contraire. Bon, mais allez ! Tu te désapes. Et tout.
T’enlèves tout.
Le
pull. Rageusement.
– Oh,
oui, mais doucement… Doucement… Qu’on en profite. On va être
obligés de tout reprendre à zéro sinon.
Elle
s’est contenue. Elle s’est contrainte. Le pantalon. Qu’elle a
soigneusement plié et déposé sur la chaise.
– C’est
déjà mieux.
Le
sous-tif parme. En me tournant le dos. Elle l’a jeté sur la chaise
derrière elle.
– Doucement…
Doucement… On n’est pas pressés, j’t’ai dit. On a tout notre
temps.
La
petite culotte assortie. Toujours en me tournant le dos.
– T’as
un très beau cul ! Ça va être un vrai régal que de le faire
rougir. Allez, viens là maintenant !
Ce
qu’elle a fait de mauvaise grâce, la lippe boudeuse.
– Oh,
mais souris un peu !
Je
l’ai gardée un long moment immobile devant moi. Le temps de me
repaître tout à loisir de son adorable petite chatte rasée dont
les replis rosés s’aventuraient audacieusement à l’extérieur.
– C’est
pour moi que tu l’as mise complètement à nu comme ça ?
C’est gentil.
Elle
a haussé furieusement les épaules.
– Sûrement
pas, non.
– Pour
Paul alors ? Il aime ? Il apprécie ? Ça lui donne
envie d’aller y mettre le nez ? Quoique… c’est pas le
genre de type que t’imagines vraiment dans le rôle. Il trouve ça
sale, je suis sûr. Ou inconvenant. Non ?
– Ça
va durer longtemps ?
– Quand
je pense que tu m’as carrément proposé la botte hier. S’il
savait ça ! Non, tu la mérites, avoue, ta fessée ! Et
pour plein de raisons. Dis-le que tu la mérites.
– Je
la mérite.
– Ah,
non, mieux que ça !
– Je
la mérite. Là. Voilà. Tu es content ?
– On
va dire que oui. Même si c’est pas vraiment ça qu’est ça.
Et
je l’ai fait basculer sur mes genoux. Lui ai délicatement effleuré
les fesses, du bout des doigts.
– Décidément,
je les adore. Elles valent vraiment le coup d’œil. Si, c’est
vrai, hein ! Normal qu’elles les fassent craquer, les mecs. Un
cul pareil, c’est souvent qu’ils doivent vouloir y venir dedans,
non ? Non ? Tu veux pas le dire ? Oh, mais t’as le
droit d’avoir tes petits secrets, hein ! J’ai bien les
miens, moi aussi. Tiens, par exemple, si tu savais le nombre de fois
où, dans mes rêveries, je t’ai eue, comme ça, le cul à l’air,
en travers de mes genoux. Ah, qu’est-ce que j’ai pu t’en mettre
des fessées en imagination ! Et des sacrément corsées !
Tu étais tellement imbuvable aussi, tellement prétentieuse que
c’était impossible de pas en avoir envie. Et maintenant, c’est
pour de bon. Non, mais tu te rends compte ? Pour de bon !
Ce pied que je vais prendre !
J’ai
lancé une première claque. À toute volée.
Elle
a sursauté, poussé un petit cri de surprise.
J’ai
aussitôt enchaîné. À rythme lent, régulier. À coups bien
appuyés, mais pas trop. Juste ce qu’il fallait. Une fesse après
l’autre. Patiemment. Méthodiquement.
Elle
ne réagissait pas, la tête enfouie dans les coussins, comme absente
de ce qui était en train de lui arriver.
J’ai
poursuivi. Imperturbablement. Mes doigts s’inscrivaient sur sa peau
en longues traînées rosées qui ont progressivement viré au rouge,
puis à l’écarlate.
J’ai
accéléré le rythme et l’intensité des coups. Son derrière
s’est imperceptiblement soulevé. Plus haut. De plus en plus haut.
En soubresauts désordonnés qui l’ont fait s’entrouvrir, offrant
à mes regards, par intermittences, ses douces crénelures intimes.
Elle
s’est mise à gémir. En plaintes rauques. Profondes Qui ont pris
de l’ampleur. Se sont muées en cris.
– Tu
sais que tu as une voix magnifique ? Il serait dommage de ne pas
lui offrir l’occasion de s’envoler dans les aigus.
Et
j’ai donné ma pleine mesure. Elle aussi.
Je
l’ai aidée à se redresser.
– Les
meilleures choses ont une fin. Malheureusement…
Elle
est allée se rhabiller. Sans un mot.Le visage dur, fermé.
Quand
elle a eu fini, elle est venue droit sur moi, la main tendue, paume
en l’air.
– Mes
lettres !
Je
les lui ai données.
– Mais…
Faut que tu saches. J’ai fait des photocopies. Au cas où l’envie
de te tanner le cul me reprendrait. Ce qui a toutes les chances
d’arriver d’ailleurs.
Elle
m’a lancé un regard furibard.
– T’es
vraiment une crevure. Une saloperie de petite crevure.
– À
bientôt, Léa.
Elle
a claqué la porte à toute volée.
BRÛLANTE PASSION
Antoine
Wiertz La liseuse de romans
– Qu’est-ce
que tu vas faire aujourd’hui, ma chérie ?
– Holà !
Je risque pas de m’ennuyer. J’ai du travail par-dessus la tête.
– Je
vais te manquer un peu ?
– Beaucoup,
oui, tu veux dire…
Il
approche ses lèvres. Elle tend les siennes.
– À
ce soir !
Son
pas dans l’escalier. La porte du bas. Elle est seule. Elle attend
un peu. Il lui arrive parfois d’avoir oublié quelque chose. Mais
non. Non. Cette fois, elle est vraiment seule.
Elle
monte. La chambre, sous les combles, est restée en l’état. Telle
que l’a laissée, quand il s’est brusquement enfui, abandonnant
tout derrière lui, l’étudiant qu’ils ont hébergé. Elle
plonge, avec volupté, ses mains dans la malle. Dans les livres. Des
dizaines de livres. Elle ferme les yeux. Elle en prend un. Au hasard.
Elle sait que, de toute façon, elle ne sera pas déçue. Elle se
déhabille, s’allonge sur le lit, s’installe le plus commodément
possible.
Deux
aristocrates. La tante et sa nièce de vingt ans. Louise et Apolline.
Elles fuient la Révolution. Quantité de malheurs, tous plus
éprouvants les uns que les autres, se sont successivement abattus
sur elles. Mais elles ont enfin réussi, après de multiples
péripéties, à embarquer pour l’Amérique. Accoudées au
bastingage, elles voguent, heureuses, vers la liberté et une vie
meilleure quand soudain, à l’horizon, un bateau de pirates…
Elles se précipitent dans leur cabine. Serrées l’une contre
l’autre, épouvantées, elles entendent le capitaine hurler des
ordres. On court sur le pont. On s’interpelle. L’affolement est
général. Des coups de feu finissent par retentir. Et un grand choc
les précipite au sol. Le navire a été éperonné.
À
nouveau des cris. Des cavalcades. Des pas qui approchent. Dans
l’embrasure de la porte apparaît une figure hilare et repoussante.
– Eh,
mais c’est qu’il y a encore du butin, là ! Allez,
amenez-vous par ici, vous deux !
On
les pousse sans ménagement. On les tire. Malgré leurs
protestations, on les fait remonter sur le pont. On les force à
passer entre deux rangs de pirates aux mines patibulaires qui les
dévisagent avec curiosité. Qui les déshabillent du regard. Qui
commentent. Qui s’esclaffent.
– Silence !
Le
chef a parlé. On se tait. On fait cercle autour d’elles. Il
s’approche. Tout près. À les toucher.
– Vous
avez de l’or, hein !
Non.
Elles n’ont pas d’or, non. Elles n’ont rien. Rien du tout.
Il
éclate de rire.
– Mais
bien sûr ! Bon, mais on va voir ça. Défrusquez-vous !
Qu’elles
se… ? Ah, mais non ! Non ! Il n’en est pas
question.
– Et
vous vous dépêchez ! Sinon, on le fait nous-mêmes. Et on vous
jette aussi sec par dessus bord après. Il faut bien que les poissons
mangent…
Elles
n’ont pas le choix. Elles s’y résolvent. Toute honte bue. Il y
va de leur vie. Et, la mort dans l’âme, elles retirent leurs
vêtements. Un à un. Tous les regards sont fixés sur elles. Se
repaissent effrontément du spectacle qu’elles offrent. On les
encourage de la voix et du geste. On se donne, de satisfaction, de
grandes bourrades dans le dos. Elles s’arrêtent d’un coup. Au
dernier moment. Au moment d’être nues. Elles ne peuvent pas. Elles
ne peuvent plus. Pas plus.
Elle
aussi, elle s’arrête. De lire. Trop d’images. Elle ferme les
yeux. D’images qui l’investissent. Qui l’habitent. Qui
prolifèrent. Elle les laisse se répandre en elle, y voguer à leur
guise, se les pianote en bas quelques instants, du bout des doigts.
Et elle retourne là-bas. Avec elles. Avec eux.
Le
chef est furieux.
– Maintenant,
ça suffit ! Vous nous avez assez amusés comme ça.
Il
fait signe à deux de ses hommes.
– Foutez-les
à poil. Et balancez-les à la mer !
– Non !
Oh, non !
Elles
ne leur laissent pas le temps d’arriver jusqu’à elles. Elles se
débarrassent, en toute hâte, du peu de vêtements qui leur restent.
Elles sont nues. Toutes nues. Devant eux. Devant tous ces hommes dont
les regards lubriques les fouillent, les explorent, les
engloutissent.
Du
bout de l’index sous le menton, il oblige la tante à relever la
tête.
– Vous
l’avez caché où ?
– Je
vous l’ai dit. Il y a pas d’or. Il y a rien. On n’a rien.
Il
se tourne vers la nièce.
– Mais
il y a un petit trésor, là.
Il
avance une main, veut lui saisir un sein. De l’autre, il lui
caresse les lèvres. D’un geste qu’il voudrait sensuel. Les
mâchoires de la fille se referment sur le bout de ses doigts. Et
elle serre. De toutes ses forces.
Stupéfait,
il hurle.
– Elle
m’a mordu. Cette petite saloperie m’a mordu.
Il
colle son visage contre le sien. Il éructe.
– Tu
vas me payer ça. Vous allez me payer ça. Toutes les deux.
Il
est furieux. Il donne des ordres. Qui sont tout aussitôt exécutés.
On les attache au mât. En vis-à-vis. Par les poignets. On amène
des fouets. Que deux pirates font claquer en l’air.
– Vous
allez chanter ! Je peux vous dire que vous allez chanter…
Allez, exécution, vous autres !
Les
fouets s’abattent. Sur leurs dos. Sur leurs fesses. Sur leurs
cuisses. Y déposent de longues boursouflures blanchâtres.
Elle
repose le livre. Son souffle est court. Son cœur bat à tout rompre.
Et elle chevauche son oreiller. Qui s’emballe. Qui l’emporte. Qui
la dépose, épuisée, mais ravie, sur des berges enchantées.
Elle
referme le livre. Elle le repose dans la malle avec les autres. Sur
le dessus. Demain, la suite. Elle reviendra demain.
Dans
leur lit, il a envie. Il s’approche d’elle, se presse contre
elle, cale sa queue gonflée contre ses fesses.
– S’il
te plaît, mon chéri, s’il te plaît, sois gentil, pas ce soir !
J’en peux plus. J’ai eu une journée éreintante.
PETIT MATIN
Henri
Gervex "Rolla" 1878, Musée des Beaux-Arts de Bordeaux
Il
a tiré les rideaux, ouvert la fenêtre. La douce lumière de
septembre a inondé la chambre.
Elle
s’est brusquement redressée.
– Ah,
c’est toi !
– C’est
moi, oui ! Mais c’est quoi, tout ce bazar ? Il s’est
passé quoi, ici ?
– Ici ?
Je t’ai fait cocu, mon chéri. J’en ai profité que t’étais
pas là. T’es content ?
– Non,
mais tu te fous de moi, là !
– Ah,
mais non ! Non. Pas du tout. Et dans notre lit en plus, je l’ai
fait. Le lit conjugal. C’était bien plus excitant.
– Tu
peux pas être sérieuse deux minutes ? Et m’expliquer ?
– Mais
je suis sérieuse. Très sérieuse. J’ai ramené un mec, cette
nuit. Je voulais qu’il reste à t’attendre ce matin, mais il a
préféré partir.
– Non,
mais alors là, c’est la meilleure !
– J’en
avais trop envie, attends ! Non, et puis ce qu’il y a surtout,
c’est que c’est plus ce que c’était, maintenant, quand tu me
donnes la fessée. Tu fais ça du bout des doigts. Tu t’investis
plus. On dirait presque que tu t’ennuies.
– Hein ?
Mais pas du tout !
– Je
suis frustrée, moi, du coup. Et, pour être franche, j’y trouve
plus mon compte. Je t’ai tiré la sonnette d’alarme, pourtant.
Plusieurs fois. T’en as pas tenu le moindre compte.
– Mais
si ! Seulement…
– Alors
je me suis dit qu’il fallait que je te donne une bonne vraie raison
de m’en coller une, qu’avec un peu de chance ça te remettrait
les paluches en batterie.
– Et
c’est qui, ce type ? On peut savoir ?
– Un
type.
– Mais
encore ?
– Qu’est-ce
que tu veux que j’en sache ? Un type. Je lui ai pas demandé
ses papiers. Il m’a plu. Et puis voilà !
– Tu
l’as rencontré où ?
– En
boîte. C’est encore le meilleur endroit pour ça. Tu danses, tu te
tortilles tant et plus et, cinq minutes après, t’as vingt mecs au
garde à vous dans leur pantalon qui ne rêvent que d’un truc,
c’est de venir se vider les couilles en toi. T’as plus qu’à
faire ton choix.
– Oui,
alors si je comprends bien, il suffit que j’ai le dos tourné pour
qu’aussitôt…
– Oh,
mais c’est pas systématique non plus, hein !
– Systématique
ou pas, je vais t’en faire passer l’envie, moi, tu vas voir !
– J’espère
bien !
– Pousse-toi !
Laisse-moi une petite place !
Il
lui a soulevé les jambes, s’est glissé sous elle, assis, son
derrière posé sur ses genoux.
– C’était
bon, n’empêche ! Comment c’était bon ! Je regrette
pas. Ah, non, alors !
– Tourne-toi !
Mets-toi sur le ventre !
Elle
l’a fait. Tout en continuant à parler.
– Ah,
ils ont pas dû beaucoup dormir, à côté, les pauvres !
Il
lui a négligemment posé une main sur les fesses.
– Surtout
que… plusieurs fois on a remis ça. Quatre. Cinq. Je sais plus au
juste. J’avais bien un peu perdu la tête. Faut dire qu’il savait
y faire, le salaud, et que ça a sacrément de la sève à cet
âge-là…
– Quel
âge ?
– Vingt.
Tout rond. Depuis samedi.
– Alors
ce sera vingt claques !
Et
la première s’est abattue, à toute volée, lui arrachant un petit
cri de surprise.
– Ah,
il assurait un max, ça, on peut pas dire. Et pas seulement. Tout
tendre il était, tout câlin. Et ça, moi, c’est un truc…
Deux.
Trois. À pleines fesses.
– Aïe !
Hou, la vache ! Ça promet.
Quatre.
Cinq. Elle a gémi.
– Ah,
t’en voulais… Eh, ben tu vas en avoir !
Six.
Sept. De plus en plus fort. Retentissantes.
– J’m’en
fous ! J’en ai bien profité. Non, mais comment elle était
bonne, sa queue !
Huit.
– C’est
pas souvent qu’on en trouve d’aussi efficaces.
Une
neuvième. Qui lui a arraché un cri.
– Hou…
Celle-là ! Et d’aussi agréables à reluquer. Je suis pas
fan, ça, en général. Mais là, elle en valait vraiment la peine.
J’ai fait des photos du coup. Je te les montrerai, si tu veux.
Dix.
Onze.
Un
autre cri. Plus profond. Plus rauque.
– Tu
l’as sucé, j’parie !
– Ah,
ben oui, ça, évidemment ! Qu’est-ce tu crois !
Douze.
– Et
elle avait sacrément bon goût…
Treize.
– T’as
avalé ?
– Tout.
Quatorze.
Quinze. Seize.
– Oh,
la vache ! Oh, la vache ! Oh, celles-là ! T’as
retrouvé la main, dis donc, mon cochon !
– Il
t’a pris le cul ?
– Non.
– Menteuse !
Dix-sept.
Dix-huit.
– Non,
mais ce n’est que partie remise, si tu veux. J’ai son 06. Je
l’appellerai.
Dix-neuf.
– Je
te retrouve. Enfin, je te retrouve ! Non, mais comment c’est
bon !
Vingt.
– Et
voilà !
– Il
doit être rouge, non ?
– Écarlate.
Qu’est-ce tu fais, là ?
– Ben,
je me lève. Je vais voir ce que ça donne dans la glace.
– Non,
non, tu restes là. C’était que les hors-d’œuvres. La vraie
fessée, c’est maintenant qu’elle va commencer.
– Chouette !
Comme quoi, j’ai bien fait, hein, finalement !
ATTENTE
Tanoux
Afternoon coffee
C’est
le moment qu’elle préfère. L’avant. Quand elle sait que ça
viendra. Inéluctablement. Que le temps, jusque là, s’étire tout
à loisir.
On
passe tranquillement sur la route, devant le portail. Il y a des cris
d’enfants au loin. Des oiseaux s’interpellent dans les arbres.
Les cloches de l’église scandent les heures. Félicien, son homme
à tout faire, scie du bois, pour l’hiver, derrière la grange.
Elle l’entend. Des bouffées d’air tiède lui apportent, de temps
à autre, l’odeur entêtante de la sciure.
Tout
à l’heure, elle ira voir. Où ça en est. Où il en est. Elle fera
la moue.
– Vous
n’avez pas beaucoup avancé, Félicien…
Il
relèvera la tête, offusqué.
– Mais,
Madame…
Elle
ne le laissera pas terminer.
– Votre
travail laisse de plus en plus à désirer, Félicien. Vous devriez
songer à vous reprendre. Dans votre intérêt.
Il
ne protestera pas. Au contraire…
– Certainement,
Madame…
À
sept heures, tandis qu’il dînera, à l’office, en compagnie de
Sidonie, la cuisinière, et de Blanche, la femme de chambre, elle
viendra en rajouter une couche. Devant elles.
– Vous
avez arrosé, Félicien ?
– Oui,
Madame…
– On
ne dirait pas. Le jardin crève de soif. Quant aux chevaux, il y a
huit jours que vous ne les avez pas brossés. Au moins. Ils sont dans
un état pitoyable.
– Je
vous assure, Madame…
– Taisez-vous !
Et veuillez noter, une bonne fois pour toutes, que je n’ai pas
l’intention de vous payer à ne rien faire.
Il
promettra, tout penaud, de prendre désormais, son travail à cœur.
À
dix heures, ce soir, ou peut-être onze, voire à minuit, on frappera
à la porte, en bas, d’un poing résolu. On laissera passer quatre
ou cinq secondes et on recommencera. Avec plus de détermination
encore.
– Oui,
voilà. Voilà. Qu’est-ce que c’est ? Qu’est-ce qui se
passe ? Qui est-ce ?
– Félicien…
Elle
déverrouillera la porte, retirera la chaîne.
– Vous !
Ici ! À cette heure-ci ! Mais qu’est-ce que vous
voulez ?
– Comme
si tu le savais pas !
Il
la repoussera, à petits coups, du plat de la main, sur les épaules,
jusqu’à ce qu’elle s’affale sur le fauteuil devant la
cheminée. Elle voudra se relever. Il l’en empêchera. Fermement.
– Ah,
on fait moins la fière, hein !
– Écoutez,
Félicien…
– Non.
C’est toi qui vas m’écouter. Parce que j’en ai plus qu’assez,
figure-toi, de tes réflexions permanentes. Des accusations de
paresse et d’incompétence que tu ne cesses de porter contre moi.
Et devant témoins. Sans arrêt tu me rabaisses. Sans arrêt tu
m’humilies. Pourquoi ?
– Je
ne sais pas. Je…
– Tu
sais pas. Eh bien moi, je sais pourquoi je vais te rendre la
pareille. Pourquoi je vais, à mon tour, t’humilier. Pour que tu
voies ce que ça fait. Pour t’ôter à tout jamais l’envie de
recommencer. Déshabille-toi !
– Hein ?
– T’as
parfaitement compris. Je t’ai dit de te déshabiller.
Elle
le fera. Parce que son ton ne souffre pas la moindre réplique. Parce
qu’elle ignore ce qu’un refus de sa part aurait au juste comme
conséquences et que cela l’effraie. Elle se lèvera et elle le
fera. Elle retirera sa robe. Elle la passera par-dessus la tête,
elle prendra tout son temps pour la plier, la déposer soigneusement
sur le fauteuil et ôter le reste. Elle sera nue devant lui. Qui se
sera assis dans l’autre fauteuil. Qui la contemplera longuement
– ostensiblement – avant de lui faire signe
d’approcher.
– Viens
là !
Elle
obéira.
– Plus
près !
Tout
près.
Il
la saisira par les poignets, la fera basculer par-dessus les
accoudoirs. La première claque la surprendra. Une claque sèche, à
pleine croupe, qui la fera sursauter. D’autres suivront aussitôt.
En rafale. En pluie. En grêle. Brûlantes. Elle gémira de douleur
et de honte. Une honte crue. Insoutenable. Ça durera. Longtemps. Son
derrière ne sera plus qu’un gigantesque brasier. Ça s’arrêtera
enfin.
– Magnifiques
couleurs. Joli travail. Je suis content de moi. Très.
Il
glissera un doigt dans le sillon entre les fesses. Il le parcourra.
De haut en bas. De bas en haut. Il recommencera. Plus bas. Encore
plus bas. Il s’arrêtera à l’entrée de son petit trou de
derrière. Il en prendra résolument possession. Il l’investira. Il
s’y installera.
– Si
tu recommences, c’est là que je viendrai.
Et
il y fera longuement tournoyer son doigt.
Cela
la trouble. Beaucoup. Bien sûr qu’elle recommencera. Cela va de
soi. Ce qu’il faudrait aussi, c’est qu’un jour il la punisse
devant Blanche et Sidonie. Qu’elle en soit profondément mortifiée.
Elle y pensera. Sérieusement. Très sérieusement.
Elle
soupire. Mais ce qu’il faudrait surtout, c’est que ça ait lieu
pour de bon, tout ça. Qu’il finisse par la punir pour de vrai.
Que, ce soir, il vienne frapper vraiment à la porte. Seulement…
Elle
se lève. Elle va lentement là-bas. Derrière la grange. Il lui
tourne le dos. Il ne l’entend pas arriver. Elle le regarde faire.
Un long moment. Et puis…
– Vous
n’avez pas beaucoup avancé, Félicien…
PARTIE CARRÉE
James
Tissot. La partie carrée, 1870
C’est
souvent qu’on en parlait de nos hommes toutes les deux. De ce
qu’ils disaient. De ce qu’ils faisaient. De comment ils se
comportaient avec nous.
Pulchérie,
elle, c’était tous les jours qu’elle y attrapait. Au moins.
Quand c’était pas deux fois par jour. Voire trois.
– Sans
arrêt, il en est, mon Maximilien, de la comédie. Il pense qu’à
ça. N’importe où ça l’attrape. N’importe quand. Et comme
moi, de mon côté, faut pas m’en promettre…
J’étais
pas en reste. Avec mon Timothée aussi, c’était un sacré feu
d’artifice.
– Et
il a de ces idées en plus ! On se demande où il va chercher
tout ça…
On
se racontait nos ébats avec eux. De plus en plus souvent. Avec de
plus en plus de détails. Ce qui n’assouvissait pas vraiment notre
curiosité. Ce qui l’attisait au contraire. La portait à
incandescence.
Pulchérie
haussait les épaules.
– On
cause… On cause… Mais ça permet pas de se rendre vraiment
compte, tous ces discours. Ce qu’il faudrait, c’est pouvoir jeter
un coup d’œil sur le matériel, tiens ! Qu’on sache à quoi
s’en tenir. Qu’on se représente bien avec quoi ils opèrent, en
fait, quand on en parle.
– Tu
veux dire…
– Que
ce serait bien que toi, tu voies comment mon Maximilien il est fait
et que moi, je voie comment ton Timothée il est fait, oui. Ça te
choque ?
Ça
me choquait pas, non. Pas du tout. Et même… je trouvais l’idée
séduisante. Seulement on allait procéder comment ?
C’était
bien là le hic. On échafaudait toutes sortes de plans, on
envisageait toutes sortes de solutions, toutes plus farfelues les
unes que les autres. Aucune ne nous satisfaisait vraiment.
– C’est
cousu de fil blanc.
– Ils
vont nous rire au nez.
Non,
on trouvait décidément pas.
Pulchérie
n’avait pas pour autant l’intention de s’avouer vaincue.
– Il
y aurait encore mieux, mais tu voudras jamais.
– Dis
toujours…
– Ce
serait de se les prêter. Une fois. Juste une fois. En présence
l’une de l’autre, évidemment. Pas question de se faire quoi que
ce soit derrière le dos. On saurait de quoi il retourne au juste
comme ça. D’expérience. On pourrait en parler, après, en toute
connaissance de cause.
C’était
une idée qui, je dois bien le reconnaître, m’avait déjà, à
plusieurs reprises, effleuré l’esprit. Qui, à force de
l’entendre, elle, vanter tant et plus les performances de son
Maximilien, revenait m’habiter de plus en plus souvent. Et la
perspective de me pâmer dans ses bras m’enchantait positivement.
Quant à Timothée, j’étais curieuse de savoir s’il se
montrerait aussi passionné et imaginatif avec une autre qu’il
l’était avec moi. Alors oui. Oui. Pourquoi pas ?
Et
on a préparé un pique-nique. Qu’on a voulu au bord de l’eau.
– Ce
sera plus romantique.
Avec
du vin. Beaucoup de vin.
– Histoire
de mettre tout le monde en forme.
– Et
si ?
– Si
quoi ?
– S’ils
n’entrent pas dans le jeu…
– T’as
déjà vu ça, toi, un homme se défiler quand on lui offre une
occasion pareille sur un plateau ? Tu rêves, ma chérie.
On
n’a effectivement pas eu besoin de forcer beaucoup notre talent .
On a ri. On a feint d’être un peu pompettes. On a soutenu leurs
regards. Il y a eu des sourires. Du désir dans leurs yeux. Pulchérie
s’est délibérément appuyée contre Timothée. J’ai laissé ma
tête dodeliner sur l’épaule de Maximilien. Leurs mains sont
parties en reconnaissance, se sont faufilées dans nos corsages, en
ont extirpé nos seins sur lesquels leurs visages se sont penchés,
leurs bouches se sont égarées. Ils ont poussé plus loin leurs
avantages, se sont glissés sous nos jupons, emparés de nos cuisses,
de nos fesses, de nos réduits d’amour. Maximilien m’a fait
languir. A indéfiniment prolongé. J’ai perdu la tête. Je me suis
offerte. Ouverte. Et j’ai proclamé furieusement mon plaisir dans
ses bras. Pulchérie aussi, en arrière-fond, en écho, dans ceux de
Timothée.
Maximilien
s’est redressé et tourné vers lui.
– Faut
que je te dise quelque chose. D’important. Qui va pas te faire
plaisir.
– Quoi
donc ?
– C’est
pas facile.
– Je
peux tout entendre.
– Ta
femme te trompe.
– Elle ?
Alors là, ça m’étonnerait. C’est vraiment pas son genre…
– Et
pourtant…
– Tu
es sûr ?
– Certain.
– La
garce ! Non, mais quelle garce ! Oh, mais ça va pas se
passer comme ça… Je vais y mettre bon ordre… Remarque, je
voudrais pas dire, mais la tienne, de son côté…
– Aussi ?
– Ben
oui…
– Ah,
on n’a vraiment pas de chance, tous les deux.
– En
attendant, faut sévir. Faut absolument sévir.
– Oui,
une bonne fessée, ça s’impose.
– Et
ça tombe bien ! Elles ont déjà le derrière à l’air.
On
s’est un peu défendues.
– Pas
ici ! Pas ici ! Il peut passer du monde.
Pas
beaucoup. Pas vraiment.
Et
ils ont tapé. Maximilien sur les fesses de Pulchérie et Timothée
sur les miennes. Pas très fort au début. Juste de petites claques
en surface. Ils y ont pris goût. On y a pris goût. Ça s’est
emballé. De plus en plus vite. De plus en plus fort. Ça a rebondi.
Ça a mordu. Ça a brûlé.
Ça
s’est arrêté.
– Bon,
ben va falloir assurer maintenant, les garçons, hein ! Parce
que ça nous a remis en appétit, ce truc.
– Ah,
oui, alors ! Et pas qu’un peu !
Et
on a été à nouveau dans leurs bras.
UN COUPLE PARFAIT
Felix-Armand
Heullant, In Gedanken, 1905
– Vous
ne lisez plus, ma mie ?
– Si,
si ! Je lis…
Elle
tourne précipitamment une page.
– Non,
vous ne lisez plus. Plus vraiment. Depuis un bon moment déjà.
Quelque chose vous préoccupe donc ?
– Non.
Rien. Je vous assure…
Une
autre.
– Ne
serait-ce point la pensée de ce jeune homme qui vous a si
aimablement invitée à danser, au bal, l’autre soir ?
– Lui ?
Non point.
– Un
autre alors ?
Elle
repousse son livre.
– C’est-à-dire
que…
– Vous
songez à sortir. Vous y prenez décidément goût.
– Y
verriez-vous quelque inconvénient ?
– Vous
savez bien que non. Absolument aucun. Vous êtes jeune. Je ne le suis
plus. Alors allez ! Allez retrouver qui vous voudrez. Je n’y
mets qu’une seule condition, et vous la connaissez, c’est qu’en
contrepartie, au retour, vous m'offriez vos fesses à claquer.
– M’y
suis-je jamais refusée ?
– Jamais,
en effet.
Elle
reprend son livre, soupire, le repose. Le reprend encore.
– Cette
contrepartie…
– Eh
bien ?
– Ne
serait-il pas possible que…
– Que ?
Elle
hésite. Elle bredouille.
– Que
ce soit dès maintenant. À présent.
– À
présent ? Mais…
Elle
se lève.
– Ne
me posez pas de questions, je vous en conjure. Ne me demandez rien.
– Il
n’est pas besoin de questions. Il se trouve très vraisemblablement
que la dernière fois que vous vous êtes rencontrés, vous et lui,
quelques vestiges du traitement que vous aviez précédemment subi
subsistaient encore, qu’il les a aperçus, que cela l’a ravi et
mis, à votre égard, dans de bien meilleures dispositions encore
qu’à l’ordinaire.
– Taisez-vous !
Je vous en supplie, taisez-vous !
– Dispositions
dont vous avez su tirer le meilleur parti. Tant et si bien que vous
vous êtes juré – à moins que vous ne le lui ayez juré à
lui – de lui offrir dorénavant la vision d’un derrière
beaucoup plus coloré. Festonné de fessées toutes neuves. Est-ce
bien cela ?
Elle
ne répond pas. Elle baisse la tête.
– Est-ce
bien cela ?
Elle
croise brièvement son regard.
– Oui.
– Eh
bien, Madame, dès lors ne tergiversons pas. Troussez-vous !
Elle
se retourne. Elle s’agenouille. Elle se penche. Elle met son
fessier à nu.
Un
fessier qu’il flatte longuement de la main.
– De
quels jolis dégradés de rouges et de grenats nous l’allons
décorer. Ce sera un tableau absolument charmant.
Un
fessier dont il prend résolument possession.
– Vous
êtes prête ?
Elle
fait signe que oui. Oui.
– Ce
sera beaucoup plus long que d’habitude. Et beaucoup plus cuisant.
Nous allons faire du très bel ouvrage aujourd’hui. Il ne sera pas
déçu. Et, par conséquent, vous ne le serez pas non plus. Quant à
moi…
Il
lance une première claque. Vigoureuse. À pleines fesses.
– Je
vais me régaler.
AU PLAISIR DES DAMES (1)
Henri
Herbert La Tangue. In the Orchard, 1893
– Et
c’est souvent qu’ils se baladent à poil comme ça, tes voisins ?
– À
longueur de journée. S’il fait beau, évidemment. Soi-disant
qu’ils sont naturistes. Oh, mais ils sont très corrects, hein !
Ils sont d’abord venus me demander si ça me dérangeait pas. Comme
je leur ai dit… « Mes pauvres enfants ! Vous faites bien
ce que vous voulez. De toute façon, j’y vois plus grand-chose,
moi, maintenant, vous savez ! »
– Tu
parles ! À d’autres ! T’y vois comme à vingt ans.
– Oui,
mais, comme ça, ils se sentent plus libres.
– Et
toi, tu peux te rincer l’œil tout ton saoul.
– Si,
à mon âge, on peut même plus s’offrir le plaisir de reluquer des
beaux mecs, alors qu’est-ce qu'il reste comme satisfaction dans la
vie ? Il y a plus qu’à crever.
– Faut
reconnaître qu’ils sont sacrément bien foutus. Moi, si j’avais
des voisins comme ça…
– Tu
passerais ta vie au jardin. C’est bien ce que je fais.
– Non,
mais regarde-moi ces petites fesses ! Elles sont pas à
croquer ?
– Tu
prêches une convaincue.
– Si
je devais choisir…
– Tu
pourrais pas. Moi non plus. J’aurais à peine opté pour l’un que
je regretterais de ne pas avoir choisi l’autre.
– De
toute façon, la question se pose pas. Qu’est-ce qu’ils peuvent
bien avoir à fiche de nous, tu parles ! D’autant qu’ils
doivent avoir toutes les filles qu’ils veulent à leurs pieds.
– Peut-être.
– Non ?
T’as l’air dubitative. Remarque, deux types qui vivent comme ça
sous le même toit, il y a quand même pas mal de chances pour qu’ils
soient homos.
– Je
sais pas. D’un côté, il y a des trucs qui me donneraient à
penser que oui.
– Quels
trucs ?
– Ben,
par exemple, c’est souvent que Gilles, il fait la sieste dehors…
– Lequel
c’est, Gilles ?
– Le
plus petit. Le brun. Et que Nicolas le regarde dormir. Et qu’il
bande en le regardant. Il arrête pas de bander.
– Oui,
oh, ben alors !
– Mais,
d’un autre côté, souvent il y a des filles qui passent. Qui
restent tout le week-end. Et, quand elles repartent, ils ont le
derrière tout rouge.
– Comment
ça ?
– Ben,
ils se sont pris une fessée. Faut quand même pas que je te fasse un
dessin ?
– C’est
pas vrai ! Et ils sortent dans le jardin comme ça ?
– Ils
sont persuadés que j’y vois quasiment rien, je te rappelle…
– C’est
qui, ces filles ?
– Je
n’en ai pas la moindre idée.
– Peut-être
qu’elles savent des trucs sur eux. Et qu’elles les font chanter.
Ou la fessée ou on vous dénonce.
– J’y
ai pensé aussi.
– Ou
bien alors ils adorent qu’on leur tanne le cul. Que des femmes leur
tannent le cul.
– Je
croirais plutôt ça.
– Et
toi, pendant ce temps-là, tu restes tranquillement assise là, à
regarder tout ça de loin ! Si c’est ça, mais faut y aller.
Faut foncer.
– Je
sais pas, je…
– Mais
bien sûr que si ! Parce qu’ils attendent qu’une chose, si
ça tombe. C’est que tu leur en colles une. Tu penses bien que
c’est pas un hasard s’ils viennent te balancer comme ça leurs
petits derrières tout rouges sous le nez.
– Tu
crois ?
– C’est
pas que je crois, c’est que je suis sûre. Bon, mais allez !
On lance l’opération « voisins ». Et je te parie
qu’avant trois jours ils viennent nous offrir leurs fesses,
docilement allongés en travers de nos genoux…
(à
suivre)
AU PLAISIR DES DAMES (2)
William
Etty Male Nude Kneeling from the back; 1835-1845
– À
l’abordage !
– T’as
l’air bien décidée. Tu vas où comme ça ?
– Chez
tes voisins. Leur porter un cageot de prunes. Ce qui me donnera
l’occasion de voir les leurs de plus près. Et d’entamer un
dialogue qui, je l’espère, sera constructif. Tu viens avec moi ?
– J’ai
plein de trucs à faire.
– Bon,
ben je te raconterai alors ! À tout de suite.
– T’en
as mis un temps !
– Oh,
fallait bien ça.
– Pour ?
Eh bien, raconte, quoi !
– En
tout cas, ils sont charmants. Et hyper bien foutus. De près ça
saute encore plus aux yeux. Comment tu te régales ! T’as
loupé quelque chose, là. T’aurais dû venir.
– Vous
avez discuté ?
– On
n’a même fait que ça. Et je peux te dire que le Nicolas, il s’y
connaît sacrément bien en peinture. Quant à Gilles, on est tombés
d’accord. Je vais faire son portrait. En pied.
– Comment
ça, tu vas faire son portrait en pied ? À poil ?
– Évidemment,
à poil ! Quel intérêt, sinon ? Demain on commence. Tu
pourras venir si tu veux. C’est vraiment pas le genre de type que
ça va déranger.
– T’as
causé… T’as causé… Et tu l’as pas beaucoup peint le Gilles
du coup.
– Mais
toi, par contre, t’as beaucoup reluqué en douce.
– Ça
s’est vu, tu crois ?
– Je
sais pas. Je crois pas qu’ils aient fait attention. Tu t’en fous
n’importe comment. Qu’est-ce ça peut faire ?
– Oui,
non, mais quand même ! Faudrait pas qu’ils aillent
s’imaginer…
– Que
quoi ? Que tu les trouves à ton goût ? T’es sûrement
pas la première. Et c’est le genre de chose qui fait plutôt
plaisir, non ? Tout le monde adore ça. En attendant, moi, tu
peux être tranquille que je vais prendre mon temps, mais alors là,
vraiment tout mon temps. Sous toutes les coutures je vais le peindre
le Gilles. Et l’autre aussi, là, le Nicolas, bien pris, il va y
attraper pareil. Faut pas qu’il s’imagine qu’il va s’en
sortir comme ça. Ah, tu peux t’attendre à m’avoir un bon moment
à squatter chez toi.
– Tout
le temps que tu voudras. C’est pour la bonne cause.
– T’aurais
dû venir. Parce que t’as vraiment loupé quelque chose, là.
– Oui,
mais comme je t’ai dit. Pas à chaque fois.. Toi, t’as une raison
pour y aller. Moi, j’en ai pas. Et j’aurais trop l’air de
vouloir surveiller tout ce qui se passe.
– Remarque,
dans un sens, valait peut-être mieux que tu sois pas là
aujourd’hui. Qu’on soit que tous les deux. Il était plus à
l’aise pour parler.
– Pour
parler de quoi ?
– Je
lui ai dit que t’avais remarqué qu’ils avaient les fesses rouges
des fois.
– T’as
pas fait ça !
– Ben
si ! Pourquoi ? Ce qui l’a beaucoup amusé… « Comme
quoi, elle est pas aussi miro qu’elle le prétend ! » Et
j’ai eu le fin mot de l’histoire. Ils font de la lutte tous les
deux. À haut niveau. Ils sont taillés pour, faut dire.
– De
la lutte ? Oui. Et alors ? Je vois pas le rapport.
– Mais
si ! C’est que les deux filles, là, quand elles viennent,
elles se prennent chacune un champion. Ils combattent. Et le gagnant,
celle qui l’avait choisi, elle l’emmène dans la chambre. Quant à
l’autre, il reste sur la béquille. Et la fille qui comptait sur
lui, ben elle le punit. D’autant plus vigoureusement qu’elle se
sent plus frustrée. C’est un jeu entre eux, quoi, en somme.
– Ah,
je comprends mieux.
– Ça
te laisse rêveuse, on dirait.
– Un
peu.
– On
jouerait bien, nous aussi, non ?
– Oui,
mais faut pas rêver.
– Eh,
qui sait ? Si on s’y prend bien… Moi, je suis bien décidée
à tenter le coup. D’autant qu’on y mange ce soir. Ils nous
invitent.
(à
suivre)
AU PLAISIR DES DAMES (3)
Félix
Vallotton. Quatre torses, 1916
– Géniale,
cette soirée, non ?
– Ah,
oui alors !
– Et
puis, ils cuisinent sacrément bien, en attendant, pour des mecs.
– Sans
compter que, dans le jardin, c’est une chose, mais de les avoir là,
à poil, dans leur cuisine, à aller et venir, à s’asseoir, à se
relever…
– Ah,
ça t’a plu, ça, hein !
– Pas
à toi, peut-être ?
– À
un moment, la conversation avait pris un tour sacrément coquin,
n’empêche. Et sûrement que si on avait un peu insisté…
– Ils
se seraient mis à combattre pour nous.
– Je
crois aussi, oui. Oh, mais ce n’est que partie remise si on veut.
Et si on sait manœuvrer…
– On
saura. D’autant que c’est à leur tour de venir demain soir. Et
pas question de les laisser repartir sans avoir fait avancer le
schmilblick.
– L’impression
qu’ils donnent, c’est qu’ils seraient pas contre, hein,
finalement.
– Mais
pas avec les mêmes règles du jeu. À nous de la ramasser, la
fessée, sur ce coup-là. À celle de nous deux, du moins, qu’aura
fait le mauvais choix.
– Ce
qu’est nettement moins drôle que de la leur donner.
– Et,
si j’ai bien compris, c’est le gagnant qui la lui flanquerait.
Pour la punir de pas avoir pris parti pour lui. Avant d’aller
s’enfermer dans la chambre avec l’autre. Machiavélique, non ?
– Oui,
mais tout ça, c’était plutôt dit sur le mode de la plaisanterie.
Faut pas y attacher trop d’importance.
– Oui,
oh, alors là, j’en mettrais pas ma main au feu. On ne plaisante
jamais complètement au hasard. Il y a toujours un fond de vérité
derrière.
– Tu
crois ?
– Évidemment !
Oh, mais je vais en avoir le cœur net, n’importe comment. Et pas
plus tard que cet après-midi. En continuant son portrait à Gilles.
Quand on n’est que tous les deux, il se lâche complètement.
– Alors ?
– Ben
alors, c’est quand on veut. Ils demandent que ça.
– C’est
sûr ?
– Sûr
et certain ! On fait quoi ? C’est toi qui décides. Ce
sont tes voisins.
– D’un
côté…
– Ça
te tente bien. Depuis le temps que tu les reluques et que tu rêves
de te pâmer dans leurs bras, mais, de l’autre…
– Avec
la chance que j’ai, je vais forcément miser sur le perdant.
– Et
une fessée, on peut pas dire que ça te tente. Oui, mais ça, quand
on joue, on n’est jamais sûr de gagner. Ce serait trop facile.
– Tu
choisirais lequel, toi ?
– Gilles…
Ça coule de source.
– Je
crois quand même que Nicolas est plus costaud.
– Oui,
oh, ben alors ça, je suis bien tranquille que non.
– Si !
Il est plus râblé. Plus nerveux. Il en ferait qu’une bouchée de
ton Gilles, je suis sûre.
– On
parle dans le vide, là, n’importe comment.
– Pas
tant que ça, moi, je pense…
– On
vérifie ?
– On
vérifie.
– Eh
bien, allez, alors ! Ils nous attendent.
– Comment
ils y ont mis tout leur cœur, n’empêche ! On voyait
vraiment qu’ils voulaient tous les deux gagner.
– Et
qu’est-ce que ça a duré ! Ah, on a eu le temps
d’en profiter…
– Jamais
je serais allée imaginer que Nicolas se défonce autant pour moi.
Qu’il ait autant envie de moi finalement.
– Sauf
qu’à l’arrivée…
– Oui,
bon, ça va. Pas la peine d’en rajouter. D’autant que ça
s’est joué à pas grand-chose au bout du compte.
– Mais
le résultat est là. Gilles était le plus fort. Et alors je te
dis pas après…
– Ben
ça, on a entendu.
– Un jeune mec
comme ça, beau, bien musclé, bien monté, bien
endurant, j’avoue que, même dans mes rêves les plus fous, je
pensais pas que ça redeviendrait un jour possible. Faut dire aussi
que tu nous as bien aidés. Parce que t’avoir collé une
fessée juste avant, ça l’avait sacrément mis en appétit.
– Et
il y est pas allé de main morte, c’est le moins qu’on
puisse dire. Ça va peut-être te surprendre, mais, en
attendant, c’était pas si désagréable que ça.
– C’est
bien ce qu’il m’a semblé. Ben, il y a plus qu’à recommencer
alors !
– C’est
quand tu veux. Et quand ils veulent.
– Même
si c’est encore Gilles qui gagne ? Ce qu’est couru d’avance.
– Même…
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